La Corée du Nord marche dans les pas du nouveau guide

© RIA Novosti . Ilia Pitalev / Accéder à la base multimédiaLa cérémonie d'inauguration de la plus grand statue du pays de Kim Jong Il
La cérémonie d'inauguration de la plus grand statue du pays de Kim Jong Il - Sputnik Afrique
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"La journée du Soleil est la plus importante fête de ma vie", déclare Kim Jong Su venue avec ses amis sur la rive du fleuve Taedong au centre de Pyongyang pour voir le feu d'artifice à l'occasion du 100e anniversaire de Kim Il Sung, fondateur de la Corée du Nord. En fait, la journée du Soleil est précisément la fête du Grand guide, la principale fête du pays, dont le calendrier officiel débute à partir de cette date.

"La journée du Soleil est la plus importante fête de ma vie", déclare Kim Jong Su venue avec ses amis sur la rive du fleuve Taedong au centre de Pyongyang pour voir le feu d'artifice à l'occasion du 100e anniversaire de Kim Il Sung, fondateur de la Corée du Nord. En fait, la journée du Soleil est précisément la fête du Grand guide, la principale fête du pays, dont le calendrier officiel débute à partir de cette date.

Près de 250 journalistes du monde entier, du Brésil à la Turquie, des Etats-Unis jusqu'au Japon, ont été invités à Pyongyang pour cette célébration, ainsi que pour la succession du nouveau dirigeant Kim Jong Eun. Seuls les journalistes de la Corée du Sud n'ont pas été conviés, la Corée du Nord ne reconnaissant pas l'existence de ce pays, représentant sur toutes les cartes la péninsule coréenne comme un pays unique, rapporte de Pyongyang le correspondant spécial de RIA Novosti.

Les guides à l'allure militaire

La première chose que l'on voit en arrivant à l'aéroport de Pyongyang, ce sont d'immenses consignes pour les téléphones portables, qui sont confisqués à la frontière et placés dans des sachets scellés portant le nom des propriétaires qui les récupèrent le jour de leur départ. Moyennant la somme exorbitante de 100 dollars on peut louer pour quelques jours un portable avec une carte SIM locale.

A l'aéroport, tous les invités sont accueillis par des "guides", des représentants des agences touristiques d'accueil (il est impossible de se rendre en Corée du Nord sans recourir aux services des agences touristiques). La majorité des guides ont une allure militaire et parlent bien les langues les plus courantes du monde.

Il est impossible de rejoindre la ville sans un guide traducteur – il n'y a pas de taxis à l'aéroport (d'ailleurs à Pyongyang ils sont très rares), et les transports en commun ne viennent pas jusqu'ici.

Il faut également se déplacer en ville avec son guide. Non pas qu'il soit interdit de le faire tout seul, mais il a tendance à vous suivre partout. Pour votre confort.

Et pour le confort de tous les guides à l'aéroport il y a les listes des passagers qui arrivent, ce qui permet de trouver plus facilement son client.

Tous les guides, et d'ailleurs tous les habitants de Pyongyang, portent des insignes sur la poitrine. Généralement avec le portrait de Kim Il Sung. Certains, les plus avancés dans la mode locale, ou qui ont mérité un honneur spécial, portent à la fois deux portraits sur leur insigne, des deux dirigeants récents du pays, Kim Il Sung et son fils décédé l'année dernière Kim Jong Il. Il est impossible d'acheter un tel insigne comme souvenir. Seulement avec le drapeau de la Corée du Nord.

Les portraits des guides sont sacrés.

Kim Il Sung est appelé le Grand leader, et son fils Kim Jong Il – le Cher dirigeant, en accolant constamment ces "titres" à leurs noms. Mais le nouveau dirigeant, Kim Jong Eun n'a pas encore mérité une telle épithète. "Lui aussi, il est grand?", ai-je demandé à notre "guide". "Pas encore, a-t-il répondu en riant. La presse a écrit que pour l'instant il fallait l'appeler "cher camarade".

Une métropole sans publicités et embouteillages

Pyongyang est une ville étonnamment belle et d'une propreté absolue. On dit que cela n'a rien à voir avec les fêtes – simplement les Coréens salissent très peu, et même s'ils salissent quelqu'un ramasse immédiatement les déchets.

Le style architectural de la capitale fait immédiatement penser à l'Union soviétique. On trouve également des gratte-ciels très récents, qu'on a voulu terminer pour l'anniversaire du guide, mais sans succès. Mais on est en Orient – les toits des gratte-ciels de Pyongyang sont des pagodes.

Les larges avenues sont dépourvues d'embouteillages – il y a peu de voitures. Et pratiquement à chaque coin de rue on voit des agents de la circulation en uniformes de parade avec collants blancs. On ignore leur utilité car des feux tricolores sont installés sur tous les croisements.

Les agents de la circulation ont pour compagnie des gardes au visage sévère qui se trouvent sur les trottoirs autour des sites importants (ils sont nombreux). Dans son premier discours public, Kim Jong Eun a dit la vérité: le pays vit selon les principes du Songun – il est transformé en camp militaire, et l'économie a pour tache de renforcer la défense.

On ne voit aucune publicité dans les rues. En revanche, on voit des affiches de propagande avec des visages énergiques de soldats. L'un d'eux pose devant une immense fusée, celle qui a tenté de lancer dans l'espace le satellite Kwangmyongsong-3 pour l'anniversaire du Guide nord-coréen, et qui s'est finalement désintégrée. Il ne fallait pas se hâter de faire coïncider le tir avec la date anniversaire", déclarent les experts.

Au centre de la ville, sur une île au milieu de la rivière qui traverse tout Pyongyang, se trouve un immense hôtel Yangaakdo de 46 étages. Tous les étrangers sont logés dans cet hôtel. De cette façon, s'ils veulent discuter avec des locaux (ce qui n'est pas interdit officiellement), il leur faudra marcher pendant une heure et demie.

Les Nord-coréens font payer les journalistes littéralement pout tout, en ayant parfaitement conscience de leur intérêt de leur pays. Le badge d'identité du journaliste à 20 dollars. Le brassard avec l'inscription "presse" en coréen pour 30 dollars. Il est interdit de refuser ces "documents".
Un centre de presse moderne doté d'une connexion internet ADSL est disponible pour les journalistes. Mais il faut payer 7 euros pour 30 minutes d'internet. En revanche, tous les sites sont accessibles, y compris ceux qui sont interdit en Chine voisine.

La fouille est de rigueur

La Corée du Nord est présentée aux journalistes de manière centralisée – on les fait voyager en bus avec interdiction de prendre des photos.

Les excursions sont organisées de la manière suivante: les guides (toujours de manière inattendue) annoncent à quelle heure il faut se rassembler dans le hall de l'hôtel. La destination est une surprise à chaque fois, mais il est également impossible de renoncer au voyage. La destination n'est annoncée que lorsque les bus arrivent.

Ainsi, les journalistes se retrouvent soudainement au stade de Kim Il Sung  où se déroule la réunion des représentants de l'Armée populaire de Corée, ou à la cérémonie d'inauguration de la plus grand statue du pays de Kim Jong Il, disposée à côté de la statue de son père, Kim Il Sung.

A une certaine heure commence l'inspection: toutes les affaires des journalistes passent d'abord aux rayons X, puis les journalistes passent au détecteur de métaux. Puis c'est au tour d'une dizaine de bonshommes "jumeaux" en tuniques rigoureuses avec des insignes rouges. L'un d'eux passe le journaliste au détecteur de métaux, un autre au détecteur de radiation, et un troisième utilise un appareil dont on ignore le rôle. Pendant ce temps, d'autres fouillent minutieusement les affaires du journaliste.

On m'a forcé à rapporter le téléphone portable de location à l'hôtel. Puis notre guide a expliqué pendant plusieurs minutes à l'homme portant l'insigne rouge à quoi servaient les préservatifs retrouvés dans le sac d'un journaliste.

On force de dévisser l'objectif de l'appareil, puis de le remettre à sa place et de faire une photo.

On surveille qu'aucun des "agents spéciaux" ne soit dans le cadre. Il vaut mieux prendre l'arrière plan en photo. En revanche, ces mesures de sécurité permettent de savoir si le personnage le plus important, le "brillant camarade Kim Jong Eun", sera présente à l'événement.

Le 15 avril, pendant la journée du Soleil, tous les journalistes étaient convaincus qu'ils verraient la Parade civile – la marche des athlètes et des formes géométriques formées par des gens en costumes traditionnels. La parade militaire était prévue pour le 25 avril, lorsqu'on célèbre la création de l'armée coréenne. Mais au tout dernier moment les plans ont été modifiés.

Sur la place de Kim Il Sung, tous les guides sont soudainement devenus sévères, ils ont encerclé les journalistes et les ont repoussés à l'emplacement prévu. Lorsqu'un opérateur a tenté de passer entre eux pour filmer la réaction du public, les "guides" l'ont attrapé par les manches et l'on remis dans le périmètre autorisé.

Seuls les représentants de la télévision et de la radio locaux bénéficient d'une certaine liberté. D'ailleurs, les chroniques officielles y sont toujours filmées sur une pellicule de 35 mm – elle ne se démagnétise pas et donne des images d'une qualité parfaite.

Sur les traces de ses pas

La musique a enfin retenti. Des colonnes de soldats sont apparues sur la place et se sont figées.

Des cabriolets avec des chefs militaires qui saluaient les soldats sont passés devant les rangs.

Chaque action sur la place était accueillie par les applaudissements des spectateurs, des hauts fonctionnaires, des officiers supérieurs et généraux et des délégations étrangères. La place répondait par les "Hourra!". Il était très facile de se repérer: les applaudissements et les "hourras!" étaient préenregistrés et sortaient par les enceintes au moment opportun.

L'enthousiasme a atteint son point culminant lorsque le nouveau leader de la nation Kim Jong Eun, imperceptible depuis le bas, est apparu sur la tribune. Un événement important a eu lieu – il s'est pour la première fois adressé en public à la nation. Jusqu'à présent, lors des cérémonies officielles il gardait le silence. Par exemple, le 14 avril, il a participé à la réunion des officiers au stade portant le nom de son grand-père, et même s'il était question de lui, il n'a rien dit.

La voix de l'homme politique débutant n'était pas confiante, et il lisait son discours écrit sur une feuille. La principale idée du discours du nouveau dirigeant nord-coréen (entendu dans le monde entier) est que la Corée du Nord n'a pas l'intention de s'écarter du chemin choisi.

"Le chapitre de l’histoire lors duquel les grandes puissances pouvaient imposer leur volonté aux petits pays est bien terminé. A présent, nous aussi, nous disposons d’une force qui constitue le fondement du bonheur de notre peuple", a dit Kim Jong Eun en faisant allusion à la possession de missiles et de l'arme nucléaire.

Le discours de vingt minutes du dirigeant a été interrompu plusieurs fois par des applaudissements, et après le slogan "En avant, vers une victoire définitive!", qui a marqué la fin du discours, la place a fait une ovation assourdissante. Puis, on a entendu un enregistrement scandant "Kim Jong Eun, Kim Jong Eun!", qui a été immédiatement repris par toute la place.

Après l'ouverture, les représentants de toutes les armes de l'Armée populaire de Corée, y compris les bataillons féminins, ont défilé sur la place. On a également vu passer des camions ZIL d'origine russe – avec des skieurs alpins, qui malgré la chaleur étaient revêtus de leur uniforme et portaient leurs skis.

Le public a très apprécié le défilé. "L'échec du satellite ne nous arrêtera pas, a assuré à RIA Novosti un commandant. Parce que nous sommes forts de la grande tradition du grand guide Kim Il Sung. Je ferai mon travail de mon mieux, et c'est un honneur et un devoir pour moi de défendre ma patrie."

Dans la soirée, Kim Jong Eun a une nouvelle fois réjoui ses électeurs en faisant une apparition sur la rive de Taedong pour admirer le feu d'artifice grandiose en l'honneur du 100e anniversaire de son grand-père.

Toute la rive, en face de la tour de Juche de 75 mètres, était remplie par les habitants de Pyongyang. D'ailleurs, tout le monde ne pouvait pas assister à cet événement, mais seulement ceux qui avaient reçu une invitation du parti ou du syndicat.

Au moment de l'apparition du nouveau dirigeant, les gens ont chanté une nouvelle chanson en son nom – Les traces de ses pas: "Nous vous invitons à suivre le camarade Kim Jong Eun…". D'ailleurs, les habitants de la Corée du Nord n'ont certainement pas la possibilité de choisir un autre chemin.

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