Emmanuel Todd: il est logique que l'Europe occidentale se tourne vers la Russie

Emmanuel Todd: il est logique que l'Europe occidentale se tourne vers la Russie
Emmanuel Todd: il est logique que l'Europe occidentale se tourne vers la Russie - Sputnik Afrique
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Le journal russe «Izvestia» a publié le 31 aout l'interview avec Emmanuel Todd. Le célèbre historien et politologue français estime que le tournant de l'Europe occidentale vers les anciennes républiques soviétiques et, avant tout, vers la Russie, est logique. Selon lui, il ne reste que de s'en rendre compte au plus vite. Ici, le résumé de cette publication.

  L'opinion publique européenne libérale est restée fidèle à la mentalité de l'époque de «la guerre froide ». Mais les politiques sont plus adéquats, plus réalistes, note Todd. L'Allemagne est la plus proche de la bonne façon de construire les relations avec la Russie. Berlin a compris avant les autres le lien entre les besoins en matières premières russes et nécessité d'écouler leurs produits. S'il existe une entente entre Berlin et Moscou, les autres pays européens peuvent être rassurés, affirme le publiciste français.

 La France reste un des partenaires clés de Moscou. Le président Nicolas Sarkozy, arrivé au pouvoir en 2007, ne faisait pas fi de rhétorique antirusse dure, mais peu de temps après, il a fait revenir les relations avec le Kremlin au pragmatisme traditionnel. Aujourd'hui, à l'ordre du jour, il y a le dialogue stratégique sur l'acquisition des bateaux porte-hélicoptères « Mistral ».

 Quand est-ce que l'Europe tournera-t-elle, enfin, la page de la guerre froide ? En gros, je ne vois pas de problèmes particuliers, répond Todd. Mais par le biais des structures de l'OTAN et d'autres organisations, en Europe, on met en place l'approche américaine au dialogue avec Moscou. L'objectif est d'isoler la Russie de l'Union Européenne. Les Etats-Unis sont préoccupés à cause du changement de l'attitude : la Russie n'est plus perçue comme une menace.

 Le problème de l'Europe est qu'elle n'a pas de conception géopolitique, croit Todd. Comprenant qu'aucune menace n'émane de Russie, les partenaires européens ne peuvent pas revoir sa place et son rôle dans les relations internationales. En général, du point de vue des Européens, le rôle historique de Russie au XX siècle est plutôt positif. La Russie n'a pas attaqué l'Occident, par contre, elle a arrêté le nazisme, estime le publiciste.

 Après la signature du Traité de Lisbonne, a commencé la création des structures de la politique étrangère unie de l'UE. Autrefois, j'étais un eurosceptique, mais j'ai confiance en une Europe forte, répond le politologue français.

 Comment Todd voit-il l'avenir de la CEI ? A l'Ouest et à l'Est du continent, on note les tendances contraires à celles qui avaient lieu au début des années 90, note le politologue. Maintenant, l'intégration européenne piétine, et dans l'espace postsoviétique, la coopération se rétablit. Le rôle unificateur de Russie dans l'espace de la CEI - c'est un facteur géopolitique réel, affirme Todd.

 Enfin, tous ont compris que la rupture définitive entre l'Ukraine et la Russie signifierait pour Kiev un collapsus économique, rappelle le publiciste. En Asie Centrale, la situation est encore plus dramatique. Objectivement, l'effondrement de l'URSS était pour la région une catastrophe culturelle et sociale. Je n'ai pas l'étoffe d'un colonialiste, loin de là, mais je me souviens que l'Ouzbékistan, le Tadjikistan, la Turkménie et la Kirghizie étaient créés par la Russie pendant la période soviétique justement, ces républiques faisaient un tout avec elle, rappelle le politologue français.

 Selon Todd, l'épisode géorgien était un tournant pour toute la CEI. Il est absurde de parler d'une intervention militaire contre la Géorgie. Le principal est que les événements en aout de 2008 ont montré que politiquement, les Etats-Unis ne sont pas présents dans la région. L'influence de Washington dans l'espace postsoviétique n'est possible que si les Russes consentent à l'y admettre.

 Si on évalue le poids démographique et industriel de la Russie, du Kazakhstan, de l'Ukraine et de la Biélorussie, pris ensemble, il sera suffisant pour le développement de toute la région, souligne le publiciste français.

 Emmanuel Todd, un politologue et historien français célèbre, a connu la notoriété dans les années 1970, lorsqu'il avait prédit l'effondrement de l'URSS. L'auteur estime que «les Etats-Unis deviennent progressivement un problème pour le reste du monde. Ils sont devenus un facteur déstabilisant, engendrant partout confusion et conflits ». Dans sa recherche, Emmanuel Todd a prédit le déclin de la dernière superpuissance - des Etats-Unis.

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