Anniversaire du Kosovo: confettis et lacrymo

© REUTERS / Marko DjuricaChildren wave Albanian (R) and Kosovar flags on the "Newborn" monument during a celebration marking the eighth anniversary of Kosovo's declaration of independence from Serbia, in Pristina February 17, 2016.
Children wave Albanian (R) and Kosovar flags on the Newborn monument during a celebration marking the eighth anniversary of Kosovo's declaration of independence from Serbia, in Pristina February 17, 2016. - Sputnik Afrique
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Le Kosovo fête ses huit ans dans l’euphorie et les gaz lacrymogènes. Il y a huit ans, ce petit territoire des Balkans obtenait son indépendance, suite au conflit qui a éclaté entre 1998 et 1999 et à l’intervention de l’OTAN.

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Le 17 février, jour de son anniversaire, des manifestations réclamant la démission du gouvernement sont venues perturber les festivités. Mais ce n'est pas la première fois que le Kosovo est secoué par des heurts, dans ses rues mais aussi dans ses rangs politiques: c'est même assez régulier depuis plusieurs mois. Selon le colonel Jacques Hogard, l'ambiance festive de l'indépendance cache une insécurité et un mécontentement profond du point de vue économique, social, politique. Depuis la victoire de l'OTAN, qui a imposé un gouvernement, cette province serbe vit mal son indépendance. Pour le colonel, qui a commandé le groupement interarmées des forces spéciales en 1999 lors de la guerre du Kosovo, le pouvoir actuel est corrompue, et la population albanaise vit elle-même le joug de ces clans qui la terrorisent, et impose un pouvoir qui n'est pas légitime:

Je pense que le Kosovo, qui fête son huitième anniversaire d'indépendance unilatéralement déclarée, n'est pas un état. Je pense que c'est un état fantoche avec tous les problèmes qui y sont liés: il n'y a pas d'économie réelle, il n'y a pas d'Etat de droit, les minorités sont victimes de menace, d'intimidation, d'incitation au départ, de toutes sortes de mauvais traitements, en particulier les Serbes et les Roms, qui sont les deux principales minorités visées par le pouvoir, de fait albanais.

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Ce pouvoir, qui organise les cérémonies et autres festivités officielles, se trouve directement visé par ces manifestations. C'est à l'initiative de l'opposition, rassemblée autour d'Albin Kurti, qu'elles ont eu lieu, cette opposition qui avait également répandu du gaz lacrymogène dans la salle du Parlement en octobre pour protester contre la mise en place de l'accord de « normalisation » des relations entre le Kosovo et la Serbie, établi sous la houlette de l'Union européenne. Après la guerre, le Kosovo devient une province autonome de la Serbie sous l'égide des Nations unies, jusqu'en 2008 où le Kosovo déclare unilatéralement son indépendance. Aujourd'hui encore, la Serbie, comme d'autres pays, ne reconnait pas officiellement son existence… Cet accord prévoit, entre autres, une association des municipalités serbes du Kosovo. Certains jugent cet accord historique, car ils y voient une reconnaissance par le gouvernement serbe d'un début d'indépendance ou d'autonomie du Kosovo. L'opposition kosovare, qui a bloqué les travaux du parlement, désapprouve cet accord, arguant qu'il approfondit les divisions ethniques et renforce la présence de la Serbie au Kosovo. Les serbes eux y voient un chantage:

Pour ceux qui ne le sont pas, en particulier pour la grande majorité du peuple serbe, de la nation serbe, qui est contre cette reconnaissance pour des raisons évidentes, parce que le Kosovo est considéré, par la grande masse des serbes, et en particulier par l'église qui joue toujours un rôle central en Serbie, comme le cœur historique, culturel, spirituel et identitaire de la Serbie. Donc ces gens-là, évidemment, ne peuvent se résoudre à cet accord qui a été en réalité imposé comme une sorte de chantage par l'UE, pour obliger le gouvernement serbe, qui est candidat à l'admission au sein de l'Union un jour, si elle existe encore à ce moment-là, pour obliger le gouvernement à entretenir des pourparlers avec l'ex-rébellion d'hier qui est soutenue par l'OTAN et l'UE elle-même, et amener ce bout de territoire serbe à être indépendant ».

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Comment résoudre cette crise politique, ce conflit larvé? Il est bien évidement difficile de prévoir comment vont évoluer les choses, d'autant plus que le contexte international évolue, avec par exemple la Russie qui a repris sa place sur la scène internationale. Le colonel Jacques Hogard a eu l'occasion de rencontrer Vojislav Koštunica, premier président non-communiste de la république fédérale de Yougoslavie, puis été premier ministre de Serbie, qui considère que le Kosovo, c'est le cœur de la Serbie:

On peut décréter ce qu'on veut, la communauté et les instances internationales peuvent nous imposer ce qu'elles veulent, nous nous considérons que le Kosovo est serbe et quel que soit les péripéties de l'histoire, qui veulent qu'avec des mouvements migratoires importants, ou des déséquilibres démographiques liés en particuliers aux appartenance culturelles et religieuses des différentes communauté, à un moment donné une population étrangère devient majoritaire. Donc Vojislav Koštunica m'avait dit à l'époque, ça prendra peut-être 50 ans comme Alsace-Lorraine ou 100 ans ou 200 ans, mais le Kosovo redeviendra serbe, pleinement serbe, sous juridiction serbe.

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La résolution 1244 de l'ONU, qui autorise l'action de l'Otan en Serbie et au Kosovo en 1999 et déclare formellement que le Kosovo est pour toujours partie intégrante de la Serbie, est encore en vigueur. Par sa déclaration d'indépendance il y a huit ans, cette résolution a été totalement violée et pourtant l'ONU ne l'a jamais désavoué par une autre. Pour le colonel Hogard, le droit international est bafoué. Et de conclure: « On a vu des conflits démarrer pour moins que ça, donc il faut être attentif ».

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