La Russie vue par la presse de la CEI et des pays baltes

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ESTONIE

Les médias condamnent la duplicité de la politique du Kremlin à l'égard de l'indépendance du Kosovo. A leur avis, d'une part, la Russie exploite les ambitions des leaders de la Transnistrie, de l'Abkhazie et de l'Ossétie du Sud, et de l'autre, ces mêmes ambitions dans certaines régions du Sud du pays ne manquent pas d'inquiéter Moscou. "L'accession du Kosovo à l'indépendance a suscité des émotions extraordinaires... Selon le ministère russe des Affaires étrangères, environ 200 régions dans le monde attendaient avec impatience l'exemple du Kosovo. Mais si Moscou veut faire de l'Abkhazie et de l'Ossétie du Sud un précédent, leur exemple sera imité par la Tchétchénie et le Daghestan, ce qui effraie le Kremlin". (Eesti Päevaleht, 16.02).

Certains experts politiques prévoient que la position intransigeante de l'Estonie à l'égard du gazoduc Nord Stream conduira à la détérioration de ses rapports non seulement avec la Russie, mais aussi avec ses collègues au sein de l'Union européenne."L'application d'une politique énergétique unique par l'Union européenne semble impossible, car les intérêts de presque chaque Etat sont différents de ceux de ses voisins. Par exemple, la Lettonie tire un avantage de Nord Stream, en proposant ses dépôts souterrains de gaz pour le projet. La majeure partie de l'élite estonienne s'est concentrée, semble-t-il, sur la lutte contre Nord Stream. Si cette lutte s'achève par la faillite du gazoduc russo-allemand, l'Estonie figurera probablement parmi les boucs émissaires coupables d'être à l'origine des mauvais rapports entre l'UE et la Russie". (Erileht, 13.02).

LETTONIE

La presse suppose que Vladimir Poutine pourrait désapprouver le "plan Medvedev" (programme exposé par le candidat à la présidence russe au cours du forum économique de Krasnoïarsk), car de grandes entreprises rentables en Russie ont été nationalisées au cours de sa présidence. "En exposant son programme de développement de l'Etat, Dmitri Medvedev a mis l'accent sur la protection de la propriété privée, le renforcement du pouvoir judiciaire indépendant et la garantie de la liberté de la presse. Cependant, la politique appliquée par l'actuel président Vladimir Poutine met en doute la possibilité de mettre en oeuvre ces slogans, car l'ancien officier du KGB envisage de continuer à jouer un rôle important après son départ du poste de chef de l'Etat". (Diena, 16.02).

Analysant une interview accordée par Dmitri Medvedev à la revue Itogui (Bilan), les commentateurs n'excluent pas qu'après son arrivée au pouvoir il puisse diriger l'Etat sans consulter sans cesse Vladimir Poutine. "Derrière les phrases standardisées rappelant la rhétorique de l'actuel président russe, l'oreille sensible des experts politiques a perçu quelque chose indiquant que le disciple de Vladimir Poutine pourrait surpasser son maître par la suite... Selon une opinion répandue en Russie, Dmitri Medvedev est la marionnette de Vladimir Poutine... Cependant, les analystes plus attentifs constatent que Dmitri Medvedev transgresse peu à peu les ordres de son chef". (Telegraf, 19.02).

LITUANIE

Les actions des autorités visant à accélérer la construction d'une nouvelle centrale nucléaire s'accompagnent de commentaires de la part de certains hommes politiques qui affirment qu'il est nécessaire de le faire, car Moscou peut exiger de Vilnius le remboursement de ses dettes pour les ouvrages industriels construits à l'époque soviétique (y compris la centrale nucléaire d'Ignalina). "Nous devons nous presser, car nous sommes déjà en retard... Selon des renseignements, les Russes sont en train de calculer la dette de la Lituanie envers la Russie. Si la somme s'avère importante, ils cesseront de livrer du gaz et nous nous heurterons à de graves problèmes". (Atgimimas, 16.02).

Les médias indiquent que la Russie pourrait utiliser Nord Stream à des fins de reconnaissance contre l'Allemagne et les pays scandinaves et baltes. "Un câble en fibre optique sera posé le long du gazoduc sur le fond de la Baltique... Le gazoduc pourra être utilisé pour l'espionnage dans les pays baltes. Les Russes auront la possibilité de transmettre en Russie des renseignements en provenance d'Europe occidentale... Si un câble optique passe par le fond de la Baltique, les Russes pourront écouter des informations allemandes codées inaccessibles à d'autres". (Delfi, 15.02).

BIELORUSSIE

La presse de l'opposition réagit très négativement aux paroles de Vladimir Poutine, selon lesquelles les rapports entre Moscou et Minsk ne subiront aucun changement fondamental. "Le plan de Vladimir Poutine à l'égard de la Biélorussie reste le même: l'absorption ou tout du moins le contrôle total. Ses paroles sur l'introduction d'une monnaie commune, ayant en vue le rouble russe, signifient qu'un coup sera porté à l'Etat biélorusse. Les propos sur un rapprochement économique et l'introduction de droits identiques dans l'économie des deux pays, alors que la Russie entre dans l'étape finale de son adhésion à l'OMC, peuvent être considérés comme un rideau de fumée propagandiste... Un régime dictatorial excluant des transformations économiques importantes est spécialement maintenu en Biélorussie par la Russie... La Russie applique sciemment une politique visant à conserver l'économie biélorusse à l'état primitif, afin de plus facilement l'asservir avec le capital russe". (Khartia 97, 14.02).

De nombreux experts prévoient la diminution de l'intérêt de la Russie pour la Biélorussie après l'élection présidentielle de mars. "D'après la position de Dmitri Medvedev et de Vladimir Poutine, la Biélorussie sera considérée comme une région archaïque. Les Russes continueront probablement, en serrant les dents, à financier la Biélorussie en lui accordant 5 milliards de dollars par an, mais, en échange, ils revendiqueront des "actes concrets"... Bien plus, à en juger par le discours prononcé par Dmitri Medvedev à Krasnoïarsk, les nouvelles... positions de la Russie sur un grand nombre de problèmes ne s'inscrivent nullement dans ce qu'on appelle le "choix politique biélorusse"... La Russie prévoit d'édifier une nouvelle économie, ce qui suppose une configuration foncièrement nouvelle des forces économiques, alors que la Biélorussie restera en arrière, en quémandant une aide". (Zavtra tvoeï strany, 17.02).

UKRAINE

Les journalistes posent la principale question qui les intéresse: à quel prix Kiev a-t-il acheté la condescendance de Moscou dans le secteur énergétique? Selon les observateurs, les contacts "directs" (sans intermédiaires) avec Gazprom n'apporteront aucun avantage à l'Ukraine, en revanche, ils accroîtront la part de Gazprom sur le marché ukrainien qui passera de 25 à 50%. "Qui l'a emporté aux négociations? Mêmes les personnes les plus naïves ne croient pas que cette victoire soit due à l'amitié... Les Russes ne cachent pas leur joie: 1,5 milliard de dollars de "surpaye" acceptés par l'Ukraine et un nouveau système de livraisons de gaz, c'est la plus grande réussite de ces derniers temps pour Gazprom... On nous a de nouveau contraints à payer plus, cette fois, plus que jamais". (Versii, 13.02). "Gazprom a toujours jugé important d'assister à l'étape des livraisons de gaz au client final et, par conséquent, de participer à la réception de l'argent".

Selon les médias, la Russie a obtenu un puissant moyen de faire économiquement et politiquement pression sur l'Ukraine. "Quatre des six raffineries de pétrole prêtées aux Russes n'ont pas fonctionné à cause des réparations, cela ne suffit-il pas? Avons-nous besoin de crises dans d'autres secteurs qui dépendent du gaz?.. Il est prévu de charger une coentreprise (Gazprom et Naftogaz d'Ukraine) de la vente de tout le gaz importé par l'Ukraine... Cela signifie que le climat politique intérieur ukrainien sera instauré par le Kremlin (par l'intermédiaire de Gazprom)... Nous vivrons non pas dans l'Etat qui s'appelle l'Ukraine, mais dans un canton du même nom sous le patronage de Gazprom". (Zerkalo nedeli, 16.02).

MOLDAVIE

De l'avis des experts politiques de la Transnistrie, le précédent du Kosovo devrait considérablement faciliter la reconnaissance de la République de Transnistrie. Prolonger le conflit en Transnistrie n'intéresse plus la Moldavie car cela freine considérablement la réalisation des plans européens de Chisinau. La société préférera probablement l'adhésion à l'Union européenne aux discussions sur la "réunification nationale", estiment les experts. "Sur le plan politique et juridique, le Kosovo possède des traits semblables à d'autres Etats de ce type. Par conséquent, pour régler la situation de ces Etats, il faut employer un mécanisme identique... La Transnistrie a proclamé son indépendance il y a 17 ans... La République a prouvé qu'elle était autosuffisante... Selon les sondages d'opinion, plus de 60% des citoyens de la Moldavie sont prêts à renoncer à la réintégration de la République moldave de Transnistrie". (Olvia-press, 18.02).

Les opposants aux contacts étroits entre les dirigeants moldaves et russes sont certains que le sillage de Moscou ne correspond pas aux critères démocratiques ni aux valeurs européennes, c'est pourquoi il s'agit d'une impasse politique. "Le Kremlin continue à occuper une partie de notre territoire national, en nous obligeant à s'accrocher au passé communiste... Les Russes nous empêchent d'être égaux à d'autres gens. La distance entre la République de Moldavie et les républiques baltes est équivalente à celle qui sépare la Terre de la Lune... La Russie nous a entravés par son projet anti-occidental, bouclier dans une nouvelle guerre contre le monde libre. Il n'y a aucune raison d'aimer les Russes. Il ne s'agit pas, bien entendu, de Tchékhov, Boulgakov, Sakharov ou Boukovski, mais de Molotov, Vichinski, Andropov et Poutine... Nous voulons nous délivrer de leurs fantômes". (Journal de Chisinau, 15.02).

ARMENIE

Selon les médias, le principal objectif du président arménien élu le 19 février dernier est de surmonter le blocus économique et politique du pays. Mais, selon les experts politiques, cette évolution des événements n'entre pas dans les plans de Moscou. "La Russie, est-elle intéressée par le déblocage de l'Arménie? Selon certains indices, non". "Développer de bons rapports avec la Russie sera le prix que devra payer l'Arménie pour la levée du blocus". (Aravot, 13.02).

GEORGIE

La reconnaissance de l'indépendance de l'Abkhazie et de l'Ossétie du Sud ne correspond pas aux intérêts de la Russie, estiment les observateurs. "La Russie n'utilisera pas le précédent du Kosovo à l'égard de la Géorgie. C'est... plutôt du chantage qu'une menace réelle. Les hommes politiques russes... essaient d'arracher des concessions à nos autorités... sur les problèmes de principe: le commerce, l'économie... L'Abkhazie et l'Ossétie du Sud indépendantes ne font pas l'affaire de la Russie. D'une part, parce que les éléments musulmans et le facteur turc s'accroîtront dans le Caucase. D'autre part, car la Géorgie représentera un ennemi éternel pour la Russie qui, d'ailleurs,... ne pourra empêcher la Géorgie d'adhérer à l'OTAN". (Sakartvelos respublika, 19.02).

Selon les experts politiques, au cours du sommet informel de la CEI (Communauté des Etats indépendants) qui s'est tenu le 22 février à Moscou, le président géorgien a eu de grandes chances de régler plusieurs problèmes douloureux dans les rapports avec la Russie. "C'est la meilleure période pour normaliser les rapports... Les autorités de la Géorgie et de la Russie peuvent envisager des transactions politiques et régler les problèmes compte tenu des intérêts des deux parties. (Alia, 16.02). "Il est impossible de régler tous les problèmes au cours d'une seule rencontre, mais quelques problèmes importants trouveront obligatoirement une issue positive. La Russie est intéressée à ce que nous l'aidions à adhérer à l'OMC, nous voulons que le vin, l'eau minérale Borjomi et d'autres produits agricoles géorgiens reviennent sur le marché russe" (Rezonansi, 13.02). "Si les rapports avec la Russie s'améliorent, aucun Géorgien ne sera contre... c'est ce que le peuple attend. Si les vols directs reprennent, il sera possible de faire parvenir nos produits agricoles sur le marché russe et ce sera une très bonne chose". (Ahali taoba, 18.02).

AZERBAIDJAN

La presse apprécie positivement la décision de Moscou de ne pas utiliser le précédent du Kosovo à l'égard des républiques non reconnues, y compris le Haut- Karabakh. "Malgré l'espoir des Arméniens que la Russie reconnaisse l'indépendance de la République du Haut-Karabakh en cas de reconnaissance de l'indépendance du Kosovo, Moscou a donné une réponse négative. L'Azerbaïdjan avait jusqu'à ces derniers temps des appréhensions concernant la position de la Russie sur ce point... On peut supposer que les paroles de Vladimir Poutine assurent de nouvelles possibilités à l'Azerbaïdjan dans ses négociations avec l'Arménie". (Day.Az, 15.02).

Les spécialistes émettent des appréhensions quant au fait que le corridor international de transport Europe-Caucase-Asie qui devait être une alternative au transit des cargaisons en contournant la Russie pourrait être menacé en raison de la politique incohérente de l'UE, et que Moscou pourrait placer sous son contrôle tout le système ferroviaire de la région. "L'UE... s'est piégée elle-même en refusant de reconnaître la nécessité vitale de la construction du secteur ferroviaire Kars (Turquie) - Akhalkalaki (Géorgie) qui permettrait de joindre directement les chemins de fer azerbaïdjanais et géorgien au chemin de fer turc... Tant que l'Union européenne hésite, les chemins de fer géorgiens (après ceux de l'Arménie) peuvent se retrouver sous la direction de la Russie... Le gouvernement azerbaidjanais fonde ses espoirs sur le transport de cargaisons par le chemin de fer géorgien. C'est pourquoi, nous devons particulièrement contrôler la question de la vente du chemin de fer géorgien". (Zerkalo, 15.02).

KAZAKHSTAN

Selon les données des experts, les Américains proposent de réserver au président turkmène Gourbangouly Berdymoukhammedov un accueil cordial aux Etats-Unis en échange de son soutien au projet de gazoduc Caspien, mais il louvoie entre Moscou et Washington, préférant d'abord apprendre l'état d'esprit du Kremlin après l'élection présidentielle. "Dans cette situation, les chances d'Achkhabad (capitale turkmène) se sont effectivement accrues, et si Gourbangouly Berdymoukhammedov, avec sa perfidie raffinée orientale et son habilité, promet quelque chose d'important aux Américains (qu'il n'accomplira pas obligatoirement), sa visite à Washington pourrait avoir lieu dans les prochains mois". (Delovaïa nedelia, 15.02).

L'autoproclamation de l'indépendance du Kosovo a eu des répercussions très négatives dans les médias. On a l'impression que le Kosovo se transforme graduellement en marionnette des Etats-Unis qui étaient d'ailleurs l'un des promoteurs ardents de l'indépendance de cette province. Cette situation irrite certainement la Chine, la Russie et d'autres pays, sous les yeux desquels l'avis du Conseil de sécurité de l'ONU a été méprisé et le droit international, bafoué". (Liter.kz, 19.02).

KIRGHIZSTAN

L'accroissement du nombre d'agressions contre des citoyens kirghiz en Russie a suscité une inquiétude particulière chez les médias. Ils publient un message adressé à Vladimir Poutine par le mouvement politique de jeunes Jebe qui accuse les dirigeants russes de génocide et exigent qu'ils mettent fin aux pratiques arbitraires à l'égard des ouvriers immigrés. "Nous invitons à cesser d'appliquer une politique de doubles standards... Des gens, dont la seule faute est d'avoir une autre couleur de cheveux, continuent à mourir dans les rues des villes russes qui étaient jadis des villes soeurs... Il y a des centaines de morts... des milliers d'âmes sont estropiées par le souvenir de "l'hospitalité" russe... En tant que commandant suprême, vous ne pouvez l'ignorer". (Agym, 13.02).

TURKMENISTAN

Le jeu indépendant du président turkmène avec l'Occident et la Chine menace les positons monopolistes de la Russie sur le marché turkmène des ressources énergétiques, affirment les médias. "L'indépendance de Gourbangouly Berdymoukhammedov témoigne, pour le moins, de la faiblesse de Moscou... Il s'agit probablement d'un moment décisif où le Turkménistan est plus nécessaire à la Russie que Moscou à Achkhabad". (Gundogar, 08.02). "Gourbangouly Berdymoukhammedov voudrait développer les rapports avec l'Occident pour s'assurer un grand contrepoids à la Russie et à la Chine". (Gundogar, 12.02).

Certains experts prévoient qu'en perdant le contrôle du gaz turkmène bon marché, la Russie soit menacée de perdre son influence au sein de la CEI et de se heurter à de graves problèmes économiques intérieurs. "Le Kremlin a réussi jusque-là à acheter du gaz turkmène aux prix les plus bas pour le livrer ensuite aux consommateurs nationaux à un prix avantageux et pour effectuer des livraisons aux pays de la CEI à ce même prix. La Russie exporte la majeure partie du gaz extrait en Russie vers l'UE qui paie pour cela des sommes importantes en euros... Si Moscou ne peut plus acheter du gaz turkmène bon marché,... les dirigeants russes n'auront pas d'autre issue que de subventionner leur système inefficace,... et ils devront réduire les livraisons de gaz russe sur les marchés étrangers en vue de satisfaire la demande de gaz à l'intérieur du pays". (Gundogar, 08.02).

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