Cuba: le "miel du pouvoir" et les signes de pragmatisme

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Par Oleg Viazmitinov, correspondant de RIA Novosti à Cuba
Par Oleg Viazmitinov, correspondant de RIA Novosti à Cuba

Des informations majeures concernant Cuba sont tombées ce lundi : plusieurs ministres parmi les plus importants ont été limogés et quatre ministères ont fusionné. Les fils d'informations des agences occidentales et les analyses des journaux influents ont abondé en suppositions selon lesquelles le revirement effectué dans la politique intérieure cubaine s'expliquerait par le désir de Raul Castro, le dirigeant actuel du pays, de se débarrasser des hauts fonctionnaires qui travaillaient déjà au gouvernement à l'époque de Fidel Castro et de consolider ainsi sa propre équipe.

Cependant, au lendemain de cette annonce, le leader de la révolution cubaine en personne a fait connaître son évaluation des événements. Dans un article intitulé "Changements salutaires au sein du Conseil des ministres", Fidel Castro a critiqué les ministres limogés, en déclarant que "le miel du pouvoir" avait développé chez eux "des ambitions qui les ont conduits à jouer un rôle indigne".

On retiendra avant tout, dans ce remaniement, le limogeage du chef de la diplomatie cubaine, Felipe Pérez Roque, et du secrétaire du Conseil des ministres, Carlos Lage.

Felipe Pérez Roque dirigeait la diplomatie cubaine depuis près d'une dizaine d'années, les dernières ayant été marquées par des succès importants en politique étrangère. Durant cette période, La Havane a considérablement renforcé ses positions dans la région, en ne se bornant pas à ses relations avec ses partenaires traditionnels - le Venezuela et la Bolivie. La reprise des contacts de grande envergure avec Moscou a également été l'un des principaux résultats de la politique étrangère cubaine de cette dernière période.

On peut supposer que les changements effectués au ministère des Affaires étrangères sont survenus en prévision d'une révision, attendue depuis longtemps, de la politique des Etats-Unis à l'égard de Cuba. Nombreux sont ceux, en effet, qui espèrent assister, avec l'arrivée de Barack Obama à la Maison Blanche, sinon à la levée du blocus imposé à Cuba, du moins à son atténuation considérable. Un fait plaide, dans une certaine mesure, en faveur de cette hypothèse : Bruno Rodriguez, l'adjoint de Felipe Pérez Roque qui a remplacé ce dernier, a travaillé pendant neuf ans comme représentant de Cuba à l'ONU. Cependant, il ne faut pas s'attendre à des "avancées" immédiates : Cuba se montre assez sceptique à l'égard des initiatives émanant de l'administration du nouveau président américain.

Quant à Carlos Lage, démis de ses fonctions de secrétaire du Conseil des ministres, il est considéré comme un des artisan des réformes économiques des années 90 du siècle dernier à Cuba. Son remplacement par le général de brigade José Amado Ricardo Guerra, qui a travaillé pendant plusieurs années sous la direction de Raul Castro, ainsi que la nomination au poste de ministre de l'Industrie sidérurgique du général de brigade Salvador Pardo Cruse, témoignent d'un certain renforcement au sein du gouvernement des positions des représentants de la direction des forces armées. Cela témoigne également du pragmatisme de la politique intérieure des dirigeants actuels du pays et de la préparation d'actions décisives visant à moderniser l'économie, à l'adapter aux réalités présentes aggravées par la crise économique mondiale.

Mais on peut affirmer avec assurance que, malgré ces recadrages de politique intérieure, les relations avec la Russie resteront l'une des priorités de la politique étrangère de Cuba. La promotion, intervenue voilà une semaine, du ministre des Communications et de l'Informatique, Ramiro Valdes, et du ministre des Transports, Jorge Sierra, aux postes de vice-présidents du Conseil des ministres de Cuba en est une confirmation implicite, mais éloquente. Avec le vice-président du Conseil des ministres cubain Ricardo Cabrisas, co-président de la commission intergouvernementale russo-cubaine, ils chapeautent les secteurs de l'économie dans lesquels la coopération russo-cubaine se développe de la manière la plus dynamique.

Les opinions exprimées dans cet article sont laissées à la stricte responsabilité de l'auteur.

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