Des milliards russes pour sauver l'Ukraine

© RIA Novosti . Sergei Guneev / Accéder à la base multimédiaLe président ukrainien Viktor Ianoukovitch et son homologue russe Dmitri Medvedev
Le président ukrainien Viktor Ianoukovitch et son homologue russe Dmitri Medvedev - Sputnik Afrique
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Des débats animés à propos de l'accord sur la flotte de la mer Noire se poursuivent en Russie et en Ukraine. Des problèmes très différents préoccupent l'opinion publique et l'opposition des deux Etats. Ce qui inquiète les contestataires ukrainiens, est de savoir si leur pays ne perdra pas une partie de leur souveraineté en prolongeant la présence d'une base navale étrangère sur leur territoire. Nos citoyens se posent des questions différentes: le prix payé pour ce traité, n'est-il pas trop élevé?

Des débats animés à propos de l'accord sur la flotte de la mer Noire se poursuivent en Russie et en Ukraine. Des problèmes très différents préoccupent l'opinion publique et l'opposition des deux Etats. Ce qui inquiète les contestataires ukrainiens, est de savoir si leur pays ne perdra pas une partie de leur souveraineté en prolongeant la présence d'une base navale étrangère sur leur territoire. Nos citoyens se posent des questions différentes: le prix payé pour ce traité, n'est-il pas trop élevé?

Comme on le sait, les présidents Medvedev et Ianoukovitch se sont entendus sur l'octroi à Kiev d’une réduction de 30% sur le prix du gaz russe, ce qui sera considéré comme une partie de la location pour le stationnement des navires russes à Sébastopol. Le prix s'est avéré substantiel. Le premier ministre Poutine a parlé de ce prix lors d'une conférence de presse à Kiev: "Le tarif est exorbitant. Pour cette somme, j'aurais bouffé aussi bien Ianoukovitch que votre premier ministre, aucune base militaire au monde ne coûte autant. De tels prix n’existent pas. Pour les dix ans de travail de ce contrat, cela constitue 40 à 45 milliards de dollars. On peut construire plusieurs bases de ce genre".

Le président Medvedev s'est exprimé un peu différemment: "Le prix que nous payons pour la présence de notre flotte est élevé, mais il n'est pas exorbitant, car nous entretenons des rapports stratégiques. Nous espérons que ces rapports existeront toujours, que ces contacts séculaires et, par conséquent, cette amitié s'accompagneront d'une assistance mutuelle".

Ce ne sont que des divergences de style. Poutine a expliqué, lors de conférence de presse: "Mais pour nous, le problème n'est pas seulement celui de l'argent, mais aussi de la coopération avec l'Ukraine.  La coopération militaire accroîtra certainement la confiance entre nos Etats et nous permettra de travailler avec sérénité dans les domaines économique, social et politique. Et c'est là l'essentiel".

Bref, il s'avère que des dizaines de milliards de dollars seront payés non pas pour la flotte et la base, mais pour la stabilité et la coopération mutuellement avantageuse à long terme avec l'Ukraine, pour les rapports normaux de bon voisinage.

En effet, sous l'ancien président ukrainien Viktor Iouchtchenko, les rapports entre nos pays n'étaient pas tout à fait normaux. Ils suivaient en quelque sorte le modèle géorgien, le rôle de l'Abkhazie et de l'Ossétie du Sud a été joué par Sébastopol avec sa base navale. Kiev avait même affirmé son intention d'expulser de la Crimée les restes de la flotte russe de la mer Noire. Les habitants avaient vivement protesté contre cela. Les radicaux nationalistes avaient répandu des rumeurs alarmantes sur l'octroi de la citoyenneté russe aux habitants de la Crimée.

Un sérieux conflit pouvait faire exploser la situation aux frontières méridionales de la Russie. Certains affirmaient même qu'une guerre fratricide était possible. Les problèmes  étaient non seulement globaux, mais aussi géopolitiques. Sébastopol privé de la flotte russe serait voué à la ruine et au dépérissement. Il fallait prévenir cette éventualité à tout prix. A présent, ce problème est réglé. La flotte reste, la ville et toute la Crimée peuvent vivre tranquillement et se développer. Les émotions se sont apaisées.

Mais les acteurs de la grande politique internationale n’écoutent pas leurs émotions. Ils ont aussi des arguments rationnels. Selon les hommes politiques russes, l'Ukraine est au bord d'une crise économique, d'un collapsus, d'une perte de sa souveraineté, d'une faillite de l'Etat. Cela découle de la crise mondiale et de la politique économique turbulente du gouvernement de Ioulia Timochenko qui distribuait des fonds budgétaires à droite et à gauche en vue de s'assurer le soutien des électeurs aux futures élections.

Cette menace peut être plus terrible qu'une lutte potentielle pour Sébastopol. Ce serait un véritable "Tchernobyl politique". La souveraineté pour la souveraineté, mais il ne reste presque pas de pays isolés dans le monde actuel. Par conséquent, l'effondrement économique de l'Ukraine aurait coûté très cher à la Russie voisine. Autrement dit, ces milliards sont, en fait, accordés à Ianoukovitch pour sauver l'économie nationale. D'autant plus que personne – ni le FMI, ni l'Union européenne –n'est plus disposé  à apporter une aide financière aussi importante à l'Ukraine.

Néanmoins, des questions surgissent. L'une d'entre elles a été posée par Vladimir Jirinovsky, le président du LDPR (le Parti libéral-démocrate de Russie) lors des débats à la Douma (chambre basse du parlement russe) sur la ratification de l'accord: qu'arrivera-t-il si un autre président et un autre gouvernement viennent au pouvoir dans cinq ans en Ukraine et s'ils renoncent aux ententes actuelles?

Les appréhensions de Jirinovsky et de nombreux autres opposants russes peuvent certainement être considérées comme injustifiées. Des milliards ne seront accordés à Kiev ni à crédit, ni comme un acompte, mais après la mise en œuvre des dispositions de l'accord. Si les futurs dirigeants ukrainiens veulent résilier l'accord, cela restera sur leur conscience, mais nul ne paiera à personne. Les prix du gaz reviendront à leur ancien niveau et il faudra payer des milliards pour l'aménagement d'une nouvelle base de la flotte de la mer Noire.

Ce scénario est indésirable. Ianoukovitch et le gouvernement contrôlé par son Parti des régions ont cinq ans pour dépenser ces milliards raisonnablement et sauver l'économie, alors, les électeurs ukrainiens ne voudront pas changer de pouvoir.

Autre question: notre pays, pourra-t-il supporter ces dépenses immenses? Vladimir Poutine a déjà déclaré: "Pour le budget russe, c'est une somme importante. Nous abordons la formation du budget de 2011 et les revenus manquants constitueront l'année prochaine 4 milliards de dollars". "C'est sérieux. Mais nous viendrons à bout de notre tâche".

Ce texte n'engage que la responsabilité de l'auteur.

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