Phénomène de partenariat naturel

© RIA Novosti . Alexei Nikolski / Accéder à la base multimédiaTayyip Erdogan et Vladimir Poutine
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Que deux États voisins échangent des produits entre eux, rien de plus naturel, mais personne ne s’attendait de la part de la Turquie à des records dans ses échanges avec la Russie.

Que deux États voisins échangent des produits entre eux, rien de plus naturel, mais personne ne s’attendait de la part de la Turquie à des records dans ses échanges avec la Russie.

 

Le chiffre d’affaires des échanges commerciaux entre les deux pays ne s’est pas seulement accru d’environ 8 fois depuis 2000, mais en 2008, l’année d’avant la crise, la Russie est devenue le premier partenaire commercial de la Turquie et les exportations de la Russie vers ce pays se sont chiffrées à 27,1 milliards de dollars (+ 47,5%) avec des importations en provenance de Turquie pour un montant de 6,1 milliards de dollars (+45,2%).

 

La crise mondiale a imposé des correctifs en réduisant en 2009 le chiffre d’affaires commercial entre les deux pays de 40% (jusqu’à 19,6 milliards de dollars avec 16,4 milliards de dollars d’exportations et 3,2 milliards de dollars d’importations). C’est ce qui s’est produit pratiquement dans le monde entier. Néanmoins, le consortium russe Gazprom livre à la Turquie 63% de ses besoins en gaz (la troisième place après l’Allemagne et l’Italie). En 2008, les livraisons de gaz russe ont dépassé 24,5 milliards de m3 (contre 23,5 milliards de m3 en 2007), y compris 10,5 milliards de m3 acheminés par le gazoduc Blue Stream (qui fonctionne depuis novembre 2005). La Russie livre à la Turquie du pétrole pour environ 1,8 milliard de dollars par an, plus des produits pétroliers pour 1,1 à 1,3 milliard de dollars.

 

Autrement dit, les chapitres essentiels des exportations russes sont des produits énergétiques (76%), des métaux et des articles en métal (14,3). La Russie importe de Turquie des produits alimentaires (34,1%), des machines, des biens d’équipement et des moyens de transport (environ 22%) et des biens de consommation (17%).

 

Mais il faut tenir compte du fait que le commerce ne constitue qu’une partie du tableau général de ces dix dernières années. La décennie précédente avait posé, pour ainsi dire, les fondements des rapports actuels : les années 1990 avaient engendré le phénomène du tourisme et du commerce de navette : dans ce domaine, l’argent se déplaçait et continue à se déplacer en sens inverse, de Russie en Turquie, et dans des montants parfois difficile à évaluer.

 

A vrai dire, depuis le début des années 1990, la Turquie est devenue le lieu de repos préféré de la classe moyenne russe qui a commencé à apparaître et, d’ailleurs, elle l’est toujours. Au début des années 1990, il était très difficile de faire la différence entre les touristes ordinaires et les petits marchands faisant la navette entre les deux pays et se servant de visas touristiques. A la charnière des années 1980 et 1990, le marché russe des biens de consommation vide avait été saturé de produits en provenance de Turquie, et aussi de Chine. C’est ainsi que des contacts humains ont engendré des projets commerciaux.

 

Un autre marché des services turcs est également apparu en Russie dans les années 1990 ; il s’agit de la construction. A ce jour, les Turcs ont déjà construit en Russie environ 800 "ouvrages" parmi lesquels figurent non seulement de petits bâtiments mais aussi des ensembles architecturaux entiers. Ce travail se poursuit. Ces dix dernières années, les Turcs ont conclu pour plus de 17 milliards de dollars de contrats. Au total, environ 150 sociétés turques de construction travaillent actuellement en Russie, pour l’essentiel à Moscou et dans sa région, à Saint-Pétersbourg, ainsi que dans les villes du Tatarstan, du Bachkortostan, des régions de Sverdlovsk, de Vladimir, de Rostov-sur-le-Don et du territoire de Krasnodar.

 

Voici comment il est possible d’évaluer le bilan approximatif de la première étape de coopération russo-turque. Les revenus provenant du tourisme, du commerce de navette, des transferts d’argent par des citoyens, ainsi que par des sociétés turques du bâtiment et d’autres atteignent environ 5,5 à 6 milliards de dollars par an (les données pour décembre 2009). Ce chiffre est assez stable, il demeure inchangé depuis plusieurs années. Le déséquilibre du commerce se présente maintenant autrement.

 

En ce qui concerne les voyages, les touristes russes préfèrent toujours la Turquie. En 2008, la Turquie a occupé la première place pour le nombre de touristes russes se rendant dans ce pays. Certes, la crise a joué son rôle puisqu’au cours des neuf premiers mois de 2009, 1.723.000 touristes russes se sont rendus en Turquie, soit 13,2% de moins que pendant la même période de l’année précédente, lorsque 1.983.000 Russes s’étaient rendus dans ce pays.

 

Ce qui se produit actuellement entre la Russie et la Turquie peut être considéré comme une nouvelle étape de coopération. Nombreux sont ceux qui n’ignorent probablement pas que plus de dix rencontres au sommet entre les dirigeants russes et turcs ont eu lieu ces quatre dernières années sous différentes formes. On peut affirmer que les chefs des gouvernements de nos deux pays - Recep Tayyip Erdogan et Vladimir Poutine – se sont liés d’une amitié sincère.

 

Cette amitié a porté des fruits. Il suffit de se rappeler d’août 2009 qui a vraiment marqué une étape et lorsque le premier ministre Vladimir Poutine se trouvait en visite en Turquie. Toute une série de documents intergouvernementaux a été signée à l’issue des négociations. Ainsi, la Russie et la Turquie se sont entendues pour construire le deuxième tronçon du gazoduc Blue Stream, ce qui permettra à la Turquie de devenir un important pays de transit de gaz pour les pays du Proche-Orient. De plus, les parties ont signé un protocole sur la participation de la Russie à la construction de la première centrale nucléaire en Turquie et on suppose qu’elle se trouvera à côté des célèbres stations balnéaires turques. Un mémorandum de coopération dans le domaine spatial a également été signé. Ce document prévoit une coopération dans des domaines comme le sondage de la Terre à distance, les systèmes de navigation, y compris GLONASS, ainsi que la création commune de satellites.

 

Notre époque est aux investissements. La somme totale des investissements russes dans l’économie turque est évaluée à 4 milliards de dollars (données de 2009), celle des investissements directs turcs en Russie dépasse 5 milliards de dollars. Il faut s’attendre à l’accélération de ce domaine de coopération.

 

Enfin, il convient de mentionner la coopération entre les Universités, les Musées, les musiciens, les écrivains et les éditeurs. Ce n’est pas une bagatelle, sans cette « force tranquille », quelque chose manquerait certainement dans les rapports entre les deux pays.

 

Tout ce qui se produit peut être tout de même considéré comme un phénomène, parce que la Russie n’a mené avec aucun autre pays du monde autant de guerres qu’avec la Turquie. Ces guerres avaient commencé au XVIIème siècle et s’étaient poursuivies durant tout le XVIIIème siècle avec de petites trêves. A la fin de ce même siècle, l’impératrice Catherine envisageait sérieusement de créer un « empire grec » avec la capitale à Istanbul qui devait être dirigé par le fils de l’impératrice. Au siècle suivant, les troupes russes avaient failli prendre Istanbul. L’idée de prédilection des nationalistes russes de « prendre Constantinople » ne s’était éteinte qu’en 1917 lorsque l’engouement pour celle-ci valut la démission au ministre des Affaires étrangères Milioukov. C’est à partir de la même époque, plus précisément, à partir du Traité d’amitié et de fraternité du 16 mars 1921, qu’avait débuté une coopération différente entre les deux pays.

 

En ce moment, nous sommes en présence d’un autre phénomène né de notre amitié : la statistique des mariages mixtes russo-turcs. Il y a quelques années, la Turquie menait une compétition avec le Kazakhstan pour la première place sur ce plan, ensuite venaient les mariages entre les Russes et les Allemands. Étudier de nouvelles tendances dans ce domaine attrayant est certainement une tâche intéressante pour les sociologues et les ethnologues.

 

Ce texte n’engage que la responsabilité de l’auteur.

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