La corvette Cheonan anéantie comme un bateau de papier

© RIA Novosti . Ivan Zakharchenko La corvette Cheonan
La corvette Cheonan - Sputnik Afrique
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Difficile d’imaginer la force destructrice de l’eau quand, sous l’effet d’une pression extraordinaire, elle casse en deux même un grand navire de guerre. Selon les experts militaires sud-coréens, c’est une onde de choc hydraulique de ce type qui a détruit le 26 mars la corvette Cheonan en mer Jaune à la suite d’une explosion à distance d’une torpille à guidage acoustique.

Difficile d’imaginer la force destructrice de l’eau quand, sous l’effet d’une pression extraordinaire, elle casse en deux même un grand navire de guerre. Selon les experts militaires sud-coréens, c’est une onde de choc hydraulique de ce type qui a détruit le 26 mars la corvette Cheonan en mer Jaune à la suite d’une explosion à distance d’une torpille à guidage acoustique.

Les deux parties du Cheonan se trouvent derrière une haute enceinte faite de treillis métallique dans une base navale située dans les environs de la ville sud-coréenne de Pyeong-Taek où s’est rendu un correspondant de RIA Novosti grâce au concours du ministère sud-coréen de la Défense. A Séoul, les militaires sont certains que ce patrouilleur jaugeant 1200 tonnes a été détruit par la Corée du Nord, mais Pyongyang conteste cette assertion et qualifie l’enquête organisée en Corée du Sud de « fiction ». Si l’on regarde la proue portant le numéro 772, le navire semble intact, ses flancs sont recouverts d’échelles installées pour l’inspecter. Mais si l’on s’approche du milieu de la coque, on y voit une « plaie » immense dont le caractère indique la cause de la tragédie.

« Comme vous le voyez, il n’y a pas de dommages à l’avant et à l’arrière de la coque, le sonar n’a absolument pas été touché », déclare le général de brigade de la Marine de guerre sud-coréenne Pak Chong Su en montrant la saillie ovale du sonar en bas du navire. Selon lui, tout cela montre que le navire n’a heurté aucun récif.

En Corée du Sud et ailleurs, des doutes ont été émis dans les conclusions de la commission internationale sur le naufrage du Cheonan.

Une version affirme que la corvette a heurté des récifs. En effet, en bas et sur les flancs de la coque, on peut voir des sillons de rouille mais le général Pak a expliqué que c’était les traces des chaînes et des câbles dont on s’est servi pour renflouer le navire.

La partie arrière du navire a coulé immédiatement, ou presque, alors que la partie avant a été retournée la quille en l’air et dérivé ainsi encore sept kilomètres. Ceux qui ont pu être sauvés se trouvaient justement dans la partie avant du navire. Cette tragédie aura fait, au total, 46 morts.

Les résultats de l’enquête ont été publiés le 20 mai et, selon les conclusions des experts, entre autres, australiens, britanniques, américains et suédois, le Cheonan a été brisé à la suite d’une action extérieure. Selon d’autres hypothèses émises, une explosion s’est produite à l’intérieur du navire.

Le général Pak attire l’attention sur le fait qu’à l’endroit de la rupture dans la partie arrière de la corvette, le fond en acier d’une épaisseur de 1,5 cm est littéralement collé au plafond. Dans la partie avant, on voit également nettement une courbe de métal et il devient clair qu’un coup puissant a été porté plus près du bâbord car c’est là que le revêtement métallique du navire est le plus froissé, comme une feuille de papier d’aluminium pour l’emballage de chocolat. C’est de ce coté que l’avant du Cheonan s’est retourné.

« On y voit la trace de l’onde de choc hydraulique (l’effet bubble-jet) où de puissants jets d’eau jaillissent en haut à la suite de l’explosion », indique le général Pak Chong Su. Il montre un dessin expliquant comment une onde provoquée par l’explosion soulève le navire en haut, puis le fait descendre et le casse, l’onde perce le navire et monte à une centaine de mètres au-dessus de la surface de la mer.

« S’il s’agissait d’une explosion intérieure, les conséquences auraient été tout à fait différentes », a expliqué le général de brigade. Dans ses lunettes de soleil, collant au visage, se reflétaient des faisceaux de fils dépassant de la coque brisée de la corvette.

« Comme on peut le voir, il n’y a pas de traces d’effets thermiques, ni sur les câbles, ni où que ce soit, ce qui confirme la supposition d’un choc hydraulique dû à une explosion d’une torpille à distance », a déclaré Pak Chong-Su.

La commission estime que la torpille a explosé à une distance de trois mètres du Cheonan sous le compartiment des turbines à gaz. Les hélices du navire sont disposées sur la partie arrière des deux côtés du navire. Les pales de l’hélice droite sont légèrement pliées.

« Tout s’est passé ici comme dans la collision d’un véhicule, quand les pièces à l’intérieur sont projetées vers l’avant. L’hélice s’est tordue suite à l’impact et à la résistance du courant. De plus, la sédimentation (les balanus) sur l’hélice après des années de navigation a été complètement nettoyée », explique le général.

La surface des pales tordues de l’hélice parait très propre mais on y observe les traces sombres des anciennes agrégations. Séparé des deux moitiés du navire, derrière la même haute clôture noire, se trouve le tube arraché au moment du naufrage du navire. On peut y voir des résidus blancs d’une autre matière, ressemblant à du sel à première vue.

« Ce sont des traces d’oxydes d’aluminium qui se forment après l’explosion d’une torpille. Des oxydes parfaitement identiques se retrouvent sur les débris de la partie arrière d’une torpille retrouvés au fond de la mer à l’endroit du naufrage de la corvette », a déclaré le général.

Le dépôt d’oxydes, qui ressemble aux traces de pulvérisation laissées par un jet puissant dirigé dans la même direction, s’est fixé sur la coque en aluminium de la partie du navire qui se trouvait au dessus de l’emplacement de la fracture. Elle semblait avoir été projetée en pliant les bords de la pièce métallique arrachée vers le haut. Les oxydes sont bien visibles sur l’hélice noire de la turbine.

Selon l’avis des militaires sud-coréens, la coïncidence de telles traces sur les débris de la torpille, gardée actuellement à Séoul au ministère de la Défense, et sur la coque de la corvette Cheonan confirme que ce navire a été coulé par la Corée du Nord.

« Qui d’autres aurait pu faire cela ? La Russie ? La Chine ? », demande le général Pak, sans cacher une certaine indignation.

A noter, que la conclusion de la commission internationale est aussi fondée sur la logique « qui d’autre, si ce n’est la Corée du Nord ».

La torpille qui a explosé sous le Cheonan correspond parfaitement aux dessins des torpilles exportées à l’étranger par la Corée du Nord, a communiqué le ministère sud-coréen de la Défense. Autrement dit, ces torpilles peuvent être achetées dans d’autres pays. Mais la Corée du Sud ne précise pas quels sont les pays qui achètent ces torpilles.

En supposant que seule la Corée du Nord pouvait couler la corvette, pourquoi Pyongyang aurait-t-il eu besoin de le faire? A Séoul, on estime que c’est un acte de vengeance pour la destruction par la Corée du Sud d’un navire de guerre nord-coréen dans les eaux contestées de la mer Jaune en novembre dernier. Mais alors le moment pour la vengeance est assez mal choisi. Au moment de la tragédie du Cheonan les manouvres américano - sud-coréennes  Toksuri – Foal eagle ont eu lieu en mer Jaune, impliquant un sous-marin nucléaire et des navires américains équipés de radars de détection avancée.

Pour l’instant, une question reste sans réponse: quel profit en tire la Corée du Nord ? La menace d’une vraie guerre, de nouvelles sanctions de la part du Conseil de sécurité de l’ONU, la rupture totale des relations avec la Corée du Sud, l’isolement international ?

Suite à l’accusation de la Corée du Nord de son implication dans le naufrage du Cheonan, la tension sur la presqu’île coréenne a atteint un niveau sans précédent depuis plus de dix ans. Par conséquent, Séoul a pris la décision d’augmenter sa puissance militaire, ce qui prévoit  de nouveaux achats d’armement aux États-Unis. En outre, l’incident en mer Jaune a permis d’annuler très rapidement la décision du gouvernement japonais concernant le retrait total de la base militaire américaine  d’Okinawa abritant plus de la moitié des 47.000 militaires américains déployés dans ce pays.

 

Ce texte n’engage que la responsabilité de l’auteur

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