Quelle sera la structure du nouveau gouvernement russe?

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Beaucoup de choses ont déjà été dites et écrites au sujet de la constitution du nouveau gouvernement russe. Mais une autre question théorique, tout aussi importante, se pose, à savoir quelle sera la structure du principal organisme du pouvoir exécutif.

Beaucoup de choses ont déjà été dites et écrites au sujet de la constitution du nouveau gouvernement russe. Mais une autre question théorique, tout aussi importante, se pose, à savoir quelle sera la structure du principal organisme du pouvoir exécutif. Restera-t-il le même ou changera-t-il d'une manière quelconque? Avec l'aide de spécialistes et d'analystes, RIA Novosti s'interroge sur les changements éventuels et sur les éléments du système politique des démocraties occidentales qui pourraient être utiles pour la Russie.

La politicomancie

"Le gouvernement russe est devenu un gigantesque organisme, au point que Poutine a cessé de le réunir, déclare Alexeï Makarenko, vice-président du Centre de technologies politiques. Il réunit seulement le présidium du gouvernement. On n'a pas réussi à structurer le gouvernement en ministères, en agences et en services, car les agences et les services se sont retrouvés sous le strict contrôle des ministères, et des liens horizontaux n'ont pas pu être établis. Le gouvernement n'avait pas de véritable stratégie socioéconomique, et il n'en a toujours pas."

Quant aux changements structurels concrets qui attendent le gouvernement russe en mai prochain, suite à l'investiture de Vladimir Poutine, les experts s'accordent à dire qu'il est actuellement très difficile de prédire "comment les chaises seront disposées", et Viatcheslav Nikonov, député et expert, fait remarquer qu'en raison de l'absence de changements fondamentaux dans l'administration russe il ne faut pas s'attendre à un remaniement radical de la structure administrative du pouvoir exécutif.

Comment disposer les chaises


Le pronostic le plus fréquent est probablement la division du ministère russe de la Santé et du Développement social en deux départements distincts: le ministère de la Santé et le ministère du Travail. Par ailleurs, selon Alexeï Makarkine, le ministère de la Santé doit être dirigé par un médecin. Certains estiment également qu'une partie des fonctions du Service fédéral du travail et de l'emploi sera délocalisée au profit des régions. Et que l'autre partie sera transférée au nouveau ministère du Travail.

Un collègue d'Alexeï Makarkine, Rostislav Tourovski, estime que le ministère de l'Education et de la Science sera également divisé. Certains experts évoquent également cette possibilité, mais avec moins de conviction. D'autres pensent que le ministère peut être conservé, mais en créant des agences à part relevant de sa compétence: pour les sciences, les innovations et l'éducation, et en leur laissant une grande autonomie.

Selon Pavel Koudioukine, doyen de la chaire de Théorie et pratique de la fonction publique du Haut collège d'économie, il serait utile de créer un grand ministère de secteurs infrastructurels réunissant les ministères des Transports, de la Communication et de l'Energie. Le président de la fondation Politique de Saint-Pétersbourg Mikhaïl Vinogradov, parle également de fusion du ministère de la Communication et du ministère des Transports. Cependant, il fait remarquer que si le gouvernement ne met pas en œuvre de réformes impopulaires, ces transformations resteront des manipulations purement bureaucratiques qui n'auront aucune incidence.

Le ministère du Développement régional, ainsi que le ministère des Sports, du Tourisme et de la Politique de la jeunesse ont besoin, selon les analystes, que leurs fonctions soient précisées, mais ils ne sont pas susceptibles d'être restructurés. Toutefois, Pavel Koudioukine évoque la possibilité de répartir les compétences du ministère des Sports, du Tourisme et de la Politique de la jeunesse entre le ministère de l'Education et de la Science et le ministère du Développement économique.

La division du ministère de l'Industrie et du Commerce en industrie et commerce est également peu probable, selon les experts. Dans le contexte de l'économie de marché, la création d'un ministère à part régissant les relations commerciales paraîtrait étrange.

Selon certains politologues, l'existence du ministère des Situations d'urgence semble également étrange. Elle s'expliquerait par le respect particulier de Vladimir Poutine envers Sergueï Choïgou, chef de ce ministère. Cependant, si Choïgou quittait son poste, ce dont beaucoup parlent à l'heure actuelle, la logique de la conservation d'un tel ministère au lieu d'un service fédéral serait alors sujette à caution.

Evidemment, aucun changement ne sera opéré au niveau des ministères classiques constituant la base des gouvernements de la majorité des pays dans le monde – les ministères de la Défense, de l'Intérieur; des Affaires étrangères, de la Justice, des Finances et du Développement économique. En ce qui concerne les éventuels changements, les experts ne mentionnent pas non plus les ministères de la Culture, de l'Agriculture, des Ressources naturelles et de l'Environnement.

Viatcheslav Nikonov estime tout de même que tous les pronostics portant sur la division ou, au contraire, l'élargissement de certains ministères ne sont que préliminaires, car toutes les décisions en matières de ressources humaines, ainsi que structurelles, seront très probablement prises par Poutine en mai, après son investiture, et elles seront prises de manière indépendante. "Poutine est imprévisible dans ses décisions en matière de personnel", affirme le politologue sans mentionner le premier ministre potentiel.

Des conseils utiles

Evoquant ce qu'il serait possible de faire afin d'optimiser le travail du gouvernement, Boris Makarenko, président du Centre de technologies politiques, recommande de réduire sa composante bureaucratique. "Le gouvernement doit être un organisme politique déterminant les orientations du pays et tenir autour d'une table. Vous ne verrez nulle part un gouvernement comportant plus de 20 personnes", déclare-t-il.

Selon Viatcheslav Nikonov, il serait utile d'augmenter la coordination dans la politique nationale et étrangère en examinant de près l'expérience des autres pays. "En examinant la structure du pouvoir exécutif américain, on constate que le président est aussi premier ministre, et cela fait la force du système américain, considère-t-il. Malheureusement, nous avons emprunté le très mauvais modèle français, en mettant à part les compétences présidentielles et en laissant le pouvoir exécutif au gouvernement."

"Depuis vingt ans en France le président et le premier ministre représentent des camps politiques différents. Par exemple, le premier ministre socialiste Jospin avec le président de droite Chirac. C'est un gouvernement de cohabitation. La France est, peut-être, considérée comme une république présidentielle, mais dans la politique économique le président ne peut exercer qu'une pression limitée sur le premier ministre et doit tenir compte de l'avis de la majorité parlementaire en mettant en œuvre sa politique", a déclaré à RIA Novosti Sergueï Fedorov de l'Institut de l'Europe de l'Académie des sciences de Russie.

Cependant, Sergueï Fedorov estime qu'une telle séparation stabilise le système. Contrairement à la Russie, le système français de poids et contrepoids, selon lui, fonctionne réellement en empêchant de virer trop à gauche ou trop à droite.

"En France, poursuit M. Fedorov, le plus souvent ce sont des hommes politiques qui deviennent ministres. Et peu importe qui concrètement se retrouve à la tête de tel ou tel ministère. Un ministre est une figure politique qui fait partie de l'équipe du président ou du premier ministre et mène une politique appropriée. Mais les ressources humaines des ministères – les chefs de commissions, le personnel technique et bureaucratique – ne changent pas."

"Les idées sensées de l'opposition en France sont examinées par la majorité dirigeante et ne sont pas rejetées d'office. C'est un élément très important de l'entente politique. Il ne faut pas reléguer dans un coin les adversaires politiques", conclut l'expert.

Les collègues de Sergueï Fedorov, les historiens et les politologues, sont convaincus que dans une société démocratique la question de la formation du gouvernement doit être directement liée aux élections législatives. Vladimir Chveïtser de l'Institut de l'Europe dit que dans les pays européens, avant les législatives les partis ne proposent pas qu'un leader à leurs électeurs, mais une liste de personnes susceptibles de faire partie du futur gouvernement. L'exemple le plus classique est celui de la Grande-Bretagne, où l'opposition forme un cabinet fantôme.

"A l'heure actuelle, les conservateurs sont au pouvoir, et les travaillistes ont leur cabinet fantôme, déclare Vladimir Chveïtser. Chacun des futurs ministres éventuels est responsable d'un domaine précis. Tous les jours ils s'expriment à la Chambre des communes, où ils discutent avec les membres du gouvernement et présentent leurs points de vue sur diverses questions. De cette manière, l'opposition a toujours une équipe toute prête de ministres pour les prochaines élections."

Mais l'expert reconnaît que finalement le processus de formation du gouvernement en Grande-Bretagne est toujours le résultat complexe de compromis. En cas d'arrivée au pouvoir de l'opposition, tous les ministres fantômes ne reçoivent pas de portefeuilles de ministre. Selon le politologue, on assiste surtout à une bataille acharnée pour les postes considérés comme clés de ministre des Finances et de ministre de l'Economie.

Selon Viatcheslav Nikonov, deux organismes ont le plus de poids dans le système des organisations administratives dépendant directement du président des États-Unis. Le premier est le Bureau de la gestion et du budget, qui propose la politique principale du pays, c'est-à-dire le budget. Et le second et le plus grand est le Conseil de sécurité nationale des Etats-Unis, qui gère la politique étrangère et de défense.

"En Russie, la coordination de ces axes les plus importants est déléguée aux divers départements, ce qui du point de vue de la théorie de la gestion est contre-productif, estime l'expert. Les tâches stratégiques doivent être définies au plus haut niveau. Ce n'est pas le ministère des Finances qui doit déterminer le budget. Le budget doit être établi par des organismes détachés au maximum des fonctions de comptabilité."

L’opinion de l’auteur ne coïncide pas forcément avec la position de la rédaction

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