Elections municipales de Moscou : le vote protestataire plus fort que prévu

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A la veille de l’élection municipale à Moscou les commentateurs prédisaient qu’elle serait inutile et surtout, courue d’avance. Elle ne s'est pourtant pas déroulée sans surprise.

A la veille de l’élection municipale à Moscou les commentateurs prédisaient qu’elle serait inutile et surtout, courue d’avance. Elle ne s'est pourtant pas déroulée sans surprise.

Tout d’abord, l'électorat traditionnel du maire n’a presque pas été aux urnes. "La réserve de résistance de Sobianine est grande", disait l'un des principaux idéologues de la campagne à deux jours de l'élection. Il aurait eu raison si la participation des partisans de Sergueï Sobianine avait été plus active. Manque de chance pour lui : ils ont été insuffisamment mobilisés et intimidés. Tant d'efforts ont été déployés pour raconter partout que "tout baigne" pour Sobianine, pour montrer que l'activité de son principal rival Alexeï Navalny était suivie de très près, pour rattraper le communiste Melnikov à titre d'alternative à Navalny, qu'on a oublié de promouvoir le maire lui-même. Et les appels des partis traditionnels ont été clairement insuffisants.

Toutefois des rumeurs n’ont pas tardé à circuler, selon lesquelles la mollesse du maire était calculée et que justement, il était prévu que Sobianine ne finisse pas par croire sérieusement qu’il était un politicien d'envergure fédérale. En réalité, il n'est qu'une ombre du président Poutine et agit en son nom et celui de sa popularité.

Les différends dans les plans et les points de vue sur la popularité de chaque candidat ont provoqué des contradictions aussi bien dans les "tours du Kremlin" qu'entre ces tours et la mairie. Sobianine ne devait pas se montrer plus fort que Poutine à Moscou. Telle était prétendument sa mission - et elle est accomplie.

Toutefois, un autre aspect étonnant devrait à l'avenir être pris en compte aussi bien par le gouvernement que par l'opposition : l'activité des électeurs et les statistiques sociales sur les dispositions des habitants.

Il est parfaitement clair que l'élection a été organisée de manière anticipée après avoir sondé les mœurs des habitants de la capitale, moins protestataires depuis 2011. L’opposition de rue a connu un déclin et il fallait profiter de cette opportunité.

Mais un facteur crucial n'a pas été pris en compte par les autorités dans leur stratégie : la colère accumulée contre le gouvernement n'a pas disparu. Il était prévu que tous les mécontents ne votent pas automatiquement pour Navalny et ce calcul s'est avéré erroné. Beaucoup d'électeurs ont émis un vote de protestation – sans être pour Navalny ils ne voulaient en aucun cas donner leur voix au représentant du gouvernement, aussi bon qu'il soit. Une occasion de secouer un peu le système ? Prenez ça dans les dents !

Un autre argument a peut-être également fonctionné : Navalny est jeune, plutôt beau et il a une femme ravissante. Or ces "aspects électoraux" ne jouent pas le dernier rôle dans un scrutin, comme l'a déjà montré Poutine. Soit, ils ne sont pas déterminants et dans le cas présent, on pourrait accepter les suppositions des idéologues du Kremlin : "Si Mikhaïl Prokhorov avait avancé sa candidature, Navalny n'aurait reçu que 3 à 4% des voix". Plus encore, Prokhorov aurait probablement récolté plus de voix que Navalny car ce dernier effrayait beaucoup de Moscovites par sa fermeté et son intransigeance. Mais le fait qu'en quittant les rues de Moscou les Moscovites y soient restés "dans l'âme" est bien réel.

D'autant que si les responsables de la campagne avaient fait davantage attention aux chiffres des dernières élections fédérales, ils auraient remarqué que plus on s'approche du Kremlin et de la Roublevka (quartier chic de Moscou), moins les candidats du gouvernement reçoivent de voix. En d'autres termes, plus le niveau de vie du quartier est élevé, plus il est antigouvernemental.

Les hauts fonctionnaires du Kremlin et de la mairie devraient se pencher sur ce fait. L'élection à la Douma municipale de Moscou est prévue pour 2014 et la préparation commencera certainement sous peu. Mais il sera impossible de transformer la satiété des électeurs en loyauté. Les personnes aisées n'apprécient pas le gouvernement.

D'où cette question : l'élection est terminée mais à quoi s’attendre maintenant ?

"Sobianine a ses 50%, Navalny en a pour 5 ans", plaisantait-on à la veille du dépouillement, en référence à la victoire probable du maire en poste et à la condamnation tout aussi probable de Navalny dans son procès actuel. Ce scénario n'est pas à écarter mais il est difficile d'imaginer que le gouvernement ose désormais mettre en prison un homme aussi populaire.

Cela reviendrait à faire exploser la situation à Moscou alors qu’avec des élections, on peut tenter de placer Navalny dans un cadre bien défini. "Une situation où la rue commence à dominer est dangereuse pour tout pays", a récemment déclaré un haut fonctionnaire avant d'ajouter : "Navalny, s'il souhaite rester dans la politique, doit chercher d'autres moyens de s'opposer au gouvernement - hormis le rassemblement des gens dans la rue. La question et de savoir lesquels. Va-t-il enregistrer un parti qui participera aux élections de l'an prochain ? Ira-t-il travailler dans l'administration de Sobianine ? (Ces rumeurs courent déjà.) Et si on lui proposait un poste fédéral ? C'est parfois le meilleur moyen de se débarrasser d'un adversaire – le transformer en allié. Navalny doit également en être conscient".

Autre question : est-ce que le gouvernement lui-même considère cette élection comme une réussite ou un échec ? Et pour qui ? Trouvera-t-on un bouc émissaire responsable de la faible participation de l'électorat progouvernemental ? Un homme du Kremlin ou des responsables de la mairie ? Quelle sera la réaction du parti du gouvernement, le Front populaire, et aidera-t-elle à comprendre quelle sera la tendance politique de la nouvelle saison ?

Pour terminer, quelles conclusions seront tirées d'un taux de participation aussi élevé de l'électorat protestataire ? Le gouvernera décidera-t-il une nouvelle fois que cet électeur peut être ignoré en continuant à jouer uniquement avec les conservateurs sinistres qui exigent pour la Russie une main ferme et plus de paternalisme ?

L’opinion de l’auteur ne coïncide pas forcément avec la position de la rédaction

 

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