Svoboda – NPD, même couleur, même combat !

Svoboda – NPD, même couleur, même combat !
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De deux choses l’une. La majeure partie des médias du mainstream occidental explique le phénomène du Maïdan par, primo, la révolte des masses contre la corruption endémique qui étouffe le pays, de deux, par les tendances dictatoriales d’un Président-marionnette ficelé par Moscou et très peu attentif aux revendications de son peuple.

Ces deux facteurs retenus, voici quelques observations dont l’effet sera peut-être celui d’une douche froide.

La composante du gouvernement autoproclamé de Iatseniouk avec lequel Bruxelles et Washington entendent se mettre d’accord est plus que curieuse dans la mesure où ses principaux ministres sont issus du parti Svoboda. Or, le très influent hebdomadaire allemand Der Spiegel vient de publier un article dans lequel il fait état du lien très étroit qui existe entre le parti néo-fasciste Svoboda et le NPD néo-nazi allemand. On apprend ainsi que trois représentants du parti Svoboda ont rencontré le 29 mai 2013, à Dresde, les nazillons du NPD. L’un d’eux, Mikhaïl Golovko, était alors député du Conseil suprême d’Ukraine. Désireux de plaire aux héritiers d’Hitler, M. Golovko n’a pas manqué de leur transmettre les meilleures salutations d’Oleg Tiagnibok, co-fondateur avec Andriy Parubiy du Parti national-socialiste d’Ukraine. Manifestement touché, Holger Apfel, leader du NPD depuis 2011, qualifia le parti Svoboda de « premier parti de droite d’Europe » en assurant qu’il le soutiendrait autant que possible. Si même le Spiegel semble préoccupé par ce genre de salamalecs entre deux partis ouvertement nazis, il est à se demander pourquoi cette facette de la réalité ukrainienne n’a pas été reprise par les médias français.

La politique de Viktor Ianoukovitch était étrangère, prétend-on par-ci par-là, à ce que M. Cohn-Bendit appelle « les valeurs européennes ». Voici maintenant, bien installés dans leurs moelleux fauteuils de la Rada kiévienne, des parangons de démocratie qui ont tout pour séduire l’Observatoire national des droits de l’homme. M. Parubiy a été nommé Secrétaire du conseil national de Sécurité et de Défense (dont dépend le ministère de la Défense). Il est, avec Oleg Tiagnibok, le co-fondateur du Parti national-socialiste ukrainien, ancêtre de Svoboda. On retrouve à ses côtés Dimitri Yarosh, lui aussi secrétaire adjoint du Conseil national de Sécurité et de Défense, leader du Secteur droit. Ce grand démocrate a tué pas mal de Russes en Tchétchénie où il avait trouvé une place d’honneur auprès des islamistes. Autant s’imaginer qu’un membre de Boko Haram ou d’Al-Nosra siège au Parlement français. Croyant Dokka Oumarov vivant, Yarosh n’a pas hésité à faire appel à son aide s’attirant ipso facto les foudres du Président tchétchène, Ramzan Kadyrov. Rappelons qu’Oumarov était considéré par les milices fondamentalistes comme l’émir du Caucase du Nord et à juste titre assimilé au terrorisme al-qaïdien par l’ONU. De manière générale, la « svobodisation » de la Rada kiévienne semble quasi-absolue. Oleksandr Sych, Premier ministre adjoint, fait lui aussi partie du parti Svoboda, idem pour les ministres de l’Education, de l’Ecologie et j’en passe. Sans être, semble-t-il, directement lié à Svoboda, le ministre de la Défense participe régulièrement à ses réunions. C’est d’ailleurs lui qui organisa le blocus de Sébastopol en 2008 lors du conflit russo-géorgien.

Messieurs Bernard-Henri Lévy et ses frères spirituels devraient se sentir servis : les nazillons du Maïdan sont presque aussi efficaces que les salafistes en Syrie. Que je sache et jusqu’à preuve du contraire, le grand rabbin de Kiev a déjà incité les Juifs d’Ukraine à quitter un pays où le néonazisme fait tache d’huile. Le Congrès Juif Mondial lui aussi ne mâche pas ses mots. Oublierait-on avec tant d’aisance quand il le faut la Nuit de cristal, Auschwitz, Babi Yar ou, sortant du cadre de la tragédie juive, Leningrad et la colline Mamaïev (Mamaïev kourgan) ?

Quid à présent de la corruption ? Comment donc, le peuple a faim, il réclame l’intégration économique à une UE dont les caisses regorgent de lingots d’or ! Pendant ce temps, le méchant Ianoukovitch et sa vilaine clique pillent les plus démunis, soutenus en cela par des oligarchies proches du Kremlin. Ce tableau caricatural n’a plus aucune réalité sachant que le gouvernement autoproclamé de Kiev a vite remplacé les gouverneurs de Dniepropetrovsk et de Donetsk par des oligarques dont la fortune estimée, pour l’un, à 2,4 milliards de dollars, pour l’autre, à 2 milliards, fait du Président légitime un humble prolétaire. Fait intéressant, le gouverneur de Donetsk a en son temps financé l’avènement au pouvoir de Viktor Iouchtchenko suite à la Révolution orange de 2004. Quant à Igor Kolomoïski, on sait aujourd’hui qu’il a financé le parti UDAR de Klitchko. C’est vrai, la boxe coûte cher ! Surtout quand elle donne ses premiers coups de poing en politique. Comme Ianoukovitch n’a pas été très gentil avec l’oligarchie ukrainienne, elle s’est tout simplement vengée en sponsorisant le soulèvement du Maïdan. Il ne s’agit donc pas de plaindre un président dont on connaît les failles et les immenses faiblesses – oublierait-on que beaucoup d’Ukrainiens voient en lui un traître ? – mais de remettre les pendules à l’heure en signalant avant tout une révolte oligarchique et seulement ensuite une révolte partiellement populaire. On comprend mieux le statut de façade de Tatiana Tchornovol, présidente actuelle de la Commission nationale anti-corruption, qui devra faire des miracles de perspicacité pour d’emblée distinguer les bons oligarques des mauvais.

Peut-on philosopher après Auschwitz, se demandait-on après la II Guerre Mondiale ? Peut-on parler d’ingérence dite humanitaire après Bagdad et Tripoli ? Enfin, peut-on parler de droit international et de démocratie en général après le Maïdan ? T

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