Quel avenir pour l'Ukraine après la guerre civile ?

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La guerre civile en Ukraine s'intensifie et l'intransigeance de la junte kiévienne réduit de jour en jour les chances de règlement diplomatique. Dans ce contexte il est inévitable de se poser la question de savoir si l'Ukraine a un avenir en tant qu'Etat unitaire, fédéral ou confédéral ou si au contraire, si les forces centrifuges de la guerre civile disloqueront l'Etat ukrainien en plusieurs fragments indépendants.

D'après une citation connue attribuée à Henry Kissinger, la guérilla gagne si elle ne perd pas. C'est ce scénario qui se joue actuellement à Donetsk et à Lougansk. La junte ukrainienne ne possède pas les forces et ressources indispensables pour mener à terme l'opération punitive. Si l'armée, la garde nationale et les mercenaires ne parviennent pas à prendre Slaviansk et Kramatorsk, dont la population est légèrement supérieure à 100 000 habitants, la probabilité d’un assaut réussi de villes aussi grandes que Donetsk et Lougansk est presque nulle. Il y a certes la possibilité consistant à réduire ces villes en cendres par des tirs de lance-roquettes multiples et des raids aériens, mais Kiev risque alors de faire face à une ingérence extérieure. Prendre et maintenir le contrôle de Lougansk et de Donetsk sont deux tâches irréalistes pour l'armée ukrainienne dans son état actuel. Tôt ou tard, le nouveau président ukrainien devra engager es négociations avec l'aile politique des insurgés. Faire traîner en longueur l'ouverture des négociations multiplie les chances de voir apparaître des foyers de résistance armée dans d'autres régions de l'Ukraine. Le récent congrès des leaders du Sud-est de l'Ukraine a déjà formulé le projet visant à retirer du contrôle de Kiev neuf régions du Sud-est ukrainien.

Les opposants au pouvoir de Kiev n'ont pas d’opinion commune sur le format et les objectifs des négociations. D'aucuns se prononcent pour le fédéralisme, d'autres pour la séparation définitive de l'Ukraine. Une chose est cependant évidente : le sang versé et des centaines de victimes parmi la population civile rendent absolument inacceptable pour le Sud-est de l'Ukraine le maintien du format unitaire actuel de l'Etat ukrainien.

Il convient de retenir que la Novorossia n'est pas l'unique partie des conflits ukrainiens intérieurs à vouloir se distancier du régime xénophobe de Kiev. Les déclarations du Premier ministre de Hongrie Viktor Orban sur la nécessité d'accorder une autonomie aux Hongrois de Transcarpatie accueillies avec enthousiasme et espoir par les Hongrois ukrainiens ont démontré que la Hongrie était elle aussi intéressée au changement du format de l'Etat ukrainien. L'apparition d'un groupe d'initiative se fixant pour but la mise en place d'une autonomie culturelle nationale est un résultat logique de cette politique. Dans une interview accordée à Pravda.ru, le chargé de recherche à l'Institut du slavisme de l'Académie des sciences de Russie Piotr Iskenderov a noté :

« Orban peut en effet compter sur le soutien de la Russie, Budapest et Moscou ont des intérêts communs en Ukraine. Ces derniers résident dans le soutien de leurs compatriotes, des minorités nationales. Ainsi les représentants de la Hongrie au Parlement européen ont ouvertement déclaré que la Russie avait le droit de rattacher la Crimée et que, par conséquent, la Hongrie avait le droit de rattacher la Trsancarpatie. Il convient de comprendre que le sujet est très délicat, c'est pourquoi il ne s'agit pas de négociations directes entre Moscou et Budapest sur la situation en Ukraine, mais de consultations secrètes dans les coulisses portant sur la mise au point d'une stratégie commune dans les rapports avec Bruxelles et Washington ».

Si cette supposition est proche de la vérité, Viktor Orban aura une chance unique de bénéficier de l'exacerbation de la guerre civile dans l'Est de l'Ukraine pour ouvrir un « deuxième front » en Transcarpatie. Les ressources de Kiev touchent à leur fin et l'apparition d'une nouvelle source de tension sera un coup dur pour la capacité de l'armée ukrainienne de concentrer ses forces sur les axes clés du conflit, mais en plus pourra briser la volonté de résistance des autorités de Kiev. Il est évident que dans cette hypothèse la Novorossia et la Transcarpatie pourront s'entretenir avec Kiev en position de force et obtenir une large autonomie dans le cadre d'un nouveau Etat fédéral ou même réaliser le modèle confédéral à l'instar de la Bosnie-Herzégovine.

On peut dire que dans une certaine mesure, l'avenir de l'Ukraine dépend non seulement de Moscou, Washington, Bruxelles et Kiev, mais aussi de Budapest, qui devra décider comment bénéficier d'une chance risquée mais attrayante de redécouper les résultats de l'histoire du XXe siècle. N

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