Damas et la résistance de la Syrie Ba’athiste. Entretien avec Luc Michel (Partie 1)

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Aujourd’hui, nous nous entretenons de nouveau et depuis Bruxelles avec Luc Michel, grand spécialiste de la géopolitique et notamment de la Libye, qui revient de voyages à Damas, où il a été l’organisateur d’une mission d’observation aux élections présidentielles syriennes, ainsi que de Malabo, la capitale de la Guinée équatoriale, où il était l’invité vedette de quatre grandes émissions spéciales de la RTVGE (télévision d’Etat équato-guinéenne).

La Voix de la Russie : Luc Michel, bonjour de nouveau ! Vous revenez de Syrie et de Guinée équatoriale. Pourriez-vous nous parler de vos missions dans ces deux pays ?

Luc Michel : Je suis allé en Syrie et au Liban du 1er au 13 juin avec une mission d’EODE, notre Ong « Eurasian Observatory for Democracy and Elections », pour le monitoring de l’élection présidentielle en Syrie. Mais j’étais aussi là-bas avec une équipe vidéo d’EODE-TV pour réaliser en partenariat avec AFRIQUE MEDIA TV une série de reportages et d’interviews sur la situation en Syrie, telle qu’elle est réellement et pour démonter les médiamensonges des journalistes occidentaux. J’ai notamment réalisé deux entretiens avec le président (speaker) du Parlement syrien et l’Ambassadeur de Syrie au Liban.

J’ai en effet démarré un nouveau secteur d’activités – une vie de plus – dans le domaine de la Télévision. Avec nos deux structures EODE-TV et PCN-TV et en partenariat avec AFRIQUE MEDIA TV, la plus grande des télévisions panafricaines. En particulier, je produis maintenant des émissions TV.

Je suis allé aussi à Malabo, Guinée Equatoriale, du 23 au 30 juin 2014, pour le XXIIIe Sommet de l'Union Africaine, avec deux équipes de Télévision - AFRIQUE MEDIA TV et EODE-TV. Occasion aussi de contacts et de rencontres de haut niveau pour développer mes réseaux panafricains. A l’invitation de la RTVGE, la TV d’Etat équato-guinéenne. J’ai aussi réalisé une série de reportages et d’analyses exclusives.

Je défends l’héritage de la Jamahiriya et je suis aussi un leader panafricaniste de plus en plus suivi sur tout le continent noir. J’ai été par ailleurs l'invité de 4 émissions spéciales – « Especial XXIII Cumbre de la Union Africa, 2014. Luces y Sombras de la Union Africana » - de la télévision d'Etat, la RTVGE, où j’ai pu développer mes positions géopolitiques devant un public enthousiaste. Le principal mensuel guinéo-équatorien, La Semenia de Guinea Ecuatorial, a également mentionné mes thèses en éditorial.

LVdlR : Parlons d’abord de la Syrie. Quelle est la situation qui prévaut à Damas et dans le reste du pays d’après ce que vous avez pu voir ?

Luc Michel : La situation à Damas et en Syrie, alors que Bachar Al-Assad vient de gagner le pari de la présidentielle contre les manouvres des Occidentaux, est bien différente de l’image que donnent les médias occidentaux de la réalité syrienne Il y a une guerre médiatique pugnace et vicieuse contre Damas. Les occidentaux, et singulièrement les politiciens de l’Union Européenne, n’ont que les mots de « tolérance et multiculturalité » à la bouche. Mais ils veulent détruire ce même modèle de société ouverte en Syrie ba’athiste, qui en est le modèle. La Syrie ba’athiste est une société ouverte, un Etat multi-religieux, multiculturel et pluriethnique. Où est née notre civilisation …

Il y a une grande symbiose entre l’Etat syrien, le peuple syrien et l’Armée arabe syrienne. Comme l’ont révélé les images chocs de la méga-fête des partisans du président Assad à Damas le 4 juin au soir. Cette symbiose est la clé de la résistance efficace du président Assad à l’agression impérialiste

LVdlR : Le fait que les terroristes wahhabites, notamment de l’EIIL, se concentrent désormais majoritairement sur l’Irak voisin, signifie que les forces de l’Armée arabe syrienne aient libéré en grande majorité le pays ? Ou des foyers sérieux de tension subsistent ?

Luc Michel : Les élections se sont déroulées dans toutes les grandes villes syriennes, à l'exception de Raqa, ville martyre entièrement tenue par les djihadistes ultra-radicaux de l'Etat islamique d'Irak et du Levant (EIIL), où la population vit un long calvaire. Le scrutin a été organisé dans 50 % du territoire, où vivent 70 % de la population. Les différentes factions islamistes et celles de la pseudo ASL contrôlent, outre Raqa, les zones désertiques du nord-est vers la Jordanie et l’Irak, précisément. Homs et Alep sont en cours de nettoyage complet. Après que l’ait été le Rif de Damas et les villes de la frontière libanaise, al-Qusseir et Qalamoun.Mais la Syrie, en dehors de Damas, où la vie est normale, est un pays détruit, qui attend sa reconstruction.

LVdlR : Comment avez-vous vécu les élections présidentielles en Syrie ? Et quelles sont les perspectives du pays pour les prochaines années à venir ?

L’élection, à Damas où notre mission était déployée, s’est faite dans le calme et la bonne organisation. Mais ensuite ce furent des heures extraordinaires, avec une fête de rues de toute la population toute la soirée et la nuit des 4-5 juin.

Le président syrien Bachar al-Assad, qui a remporté la présidentielle du 3 juin, est convaincu d'avoir sauvé sa Syrie ba’athiste face à une rébellion et à des pays occidentaux comme arabes – qui ont organisé et financé cette même rébellion - exigeant son départ. Il est persuadé que malgré la houle, il est le seul chef d'Etat arabe à être resté à la barre et il a voulu montrer en organisant ce scrutin en temps et en heure (son mandat se terminait en juillet) qu'il est le garant des institutions que ses adversaires veulent détruire. Face à une révolte organisée par les Occidentaux en mars 2011 dans le sillage du scénario US dit du « Printemps arabe », celui qui était un "moderniste" a du mener une guerre épuisante sur tous les fronts. Au fil de cette révolte qui s'est complètement militarisée, et qui a aussi débouché sur un terrorisme sanglant importé de l’étranger, faisant plus 162.000 morts, son caractère fort s'est affirmé. Secrétaire-général du Ba’ath, le Parti de la renaissance arabe, il voit la révolte comme un complot ourdi par l'Occident et les pays du Golfe pour briser la "chaîne de la résistance" contre Israël, dont il est l’un des maillons essentiels.

Il est clair qu'il a consolidé sa position et que ces élections ont eu lieu pour démontrer qu'il tient bien les régions sous son contrôle. Bachar voulait prouver qu'il est l'alternative politique et qu'il est capable de rétablir l'ordre et la légalité. Et il a gagné son pari. Cette élection, théoriquement la première depuis plus d'un demi-siècle, a été qualifiée de "farce" par l'opposition et l'Occident – les mêmes qui ont avalisé la comédie des élections afghanes et libyennes, et le théâtre électoral de Kiev -, et critiquée par le secrétaire général de l'ONU, dont on connaît le tropisme occidental.

LVdlR : Il y a eu aussi un tournant au niveau des réfugiés syriens, qui ont fui la guerre, et qui se comptent par millions ?

Luc Michel : Effectivement ! Les réfugiés syriens étaient censés être des anti-Assad pour les Occidentaux. Alors qu’ils ont fui la guerre et pas le gouvernement Assad. Dans de nombreux pays, ils sont venus massivement voter Assad, sans contrainte évidemment. Devant cette gifle annoncée aux Occidentaux, la France, l’Allemagne et la Belgique, mais aussi la Tunisie, ont interdit le vote dans leur pays, paniquant devant ce qui était incontestablement un plébiscite pour Assad.

Ainsi, Beyrouth a vécu au rythme de l'élection présidentielle syrienne le mercredi 28 mai, journée consacrée au vote des Syriens installés à l'étranger. Dans un phénomène – inattendu dit la presse libanaise -, des milliers de ressortissants syriens ont afflué vers l'ambassade de leur pays, à Yarzé, au sud-est de la capitale libanaise, provoquant un embouteillage monstre, qui a totalement bloqué la circulation (selon RFI).

LVdlR : Est-ce la situation militaire où Assad semble l’emporter qui a permis ce tournant politique ?

Luc MICHEL : Ce scrutin, dénoncé par l'Occident et des pays arabes qui organisent directement la guerre en Syrie, mais appuyé par Moscou et Téhéran, alliés indéfectibles de Damas, a eu lieu effectivement dans une situation militaire plutôt favorable à Damas. Le pouvoir peut aussi se féliciter de la guerre intestine sanglante opposant dans certaines régions l'EIIL au Front al-Nosra, branche syrienne d'Al-Qaïda, ex-alliés dans le combat auprès de la rébellion syrienne.

Sans oublier la rupture intervenue entre ASL et djihadistes (alors alliés) et les forces d’auto-défense kurdes du PYD dès avril 2013. Et celle entre ASL et djihadistes radicaux. Le président syrien a démontré que cette consultation arrivait au bon moment, en expliquant qu'il y a « un tournant dans la crise au niveau militaire ainsi qu'au niveau politique », avec notamment des accords sécuritaires ponctuels entre rebelles non-djihadistes et l’armée.

LVdlR : Derrière la victoire et la résistance d’Assad, vous avez dit qu’il y avait la solidité des “alliances géopolitiques traditionnelles” de la Syrie ba’athiste ?

Luc MICHEL : Oui, c’est la clé de la solidité de la Syrie ba’athiste. Bachar al-Assad a suivi les traces de son père. Il s'est appuyé sur les alliances nouées par le général Hafez avec la Russie (alors l’URSS) dès les années 1970, avec l'Iran dans les années 1980, et avec le puissant mouvement chiite libanais Hezbollah. Aujourd'hui, il récolte les fruits de ces alliances.

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Suite dans la seconde partie de l’entretien

 

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