Russie/pays baltes : qui doit à qui ?

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La politique des puissances occidentales relative à la question balte repose traditionnellement sur l'utilisation de la Lituanie, de la Lettonie et de l'Estonie en qualité d'avant-poste contre la Russie.

La thèse de « l'occupation soviétique » des pays baltes en 1940 est invoquée sans cesse bien que formellement, du point de vue du droit international, il n'y ait eu aucune occupation : les troupes soviétiques sont entrées dans leur territoire avec le consentement des autorités de l'époque. 

Toutefois le 19 décembre 2004 l'Assemblée balte a adopté une résolution intitulée Sur la nécessité d'évaluer le préjudice causé aux pays baltes par l'occupation . La résolution notait en particulier que « l'occupation avait causé un préjudice immense à l'économie, à l'instruction, à la culture et aux intellectuels des Etats baltes et qu'en résultat ces derniers avaient accusé un retard sérieux sur leurs voisins européens ». La résolution a appelé les gouvernements des Etats baltes à initier les négociations avec la Russie et l'Allemagne sur le dédommagement du préjudice causé par les occupations.

Examinons la situation de façon aussi impartiale que possible. Au début des années 1990 les voisins baltes plaisentaient à propos de la Lituanie en disant qu'au cours de l'occupation elle s'était préparée mieux que les autres à sa future indépendance. La Lituanie avait les meilleures autoroutes de l'URSS, une raffinerie puissante, un port excellent, une infrastructure de transport parfaite et une centrale nucléaire moderne. Cependant dès 1997 la Lituanie a calculé les dommages causés par 50 dernières années de la vie au sein de l'URSS et a exigé à la Russie 286 milliards de dollars d'indemnisation. Plus tard la somme a été réduite à 20 milliards. En 2011, l'indemnisation a été portée à 834 milliards de dollars : Vilnius a annoncé que la Russie devait dédommager la Lituanie pour la fermeture de la centrale nucléaire d'Ingalina construite à l'époque soviétique et arrêté sur l'odre de l'UE. A première vue c'est un paradoxe absolu : la Russie (l'URSS) a construit à la Lituanie une centrale nucléaire et la lui a laissée en état parfait sans rien demander en retour et les Lituaniens l'ont fermée, ont transformé leur pays qui exportait l'électricité en son importateur et demandent en plus une compensation. Ajoutons qu'avant 1939 la capitale de la Lituanie, Vilnius, appartenait à la Pologne et l'unique port lituanien, Klaipeda, à l'Allemagne. La Grande-Bretagne, la France, l'Italie et le Japon reconnaissaient son appartenance à la Pologne et seule l'Union soviétique soutenait le droit de la Lituanie à cette ville. Grâce à l'entrée dans son territoire de l'Armée rouge Vilnius et le port de Klaipeda ont été restitués à la Lituanie tout comme des régions du sud-est appartenant précédemment à la Biélorussie.

La position de l'Estonie en matière de compensation pour « l'occupation soviétique » n'était pas aussi vigoureuse que celle de la Lituanie. Néanmoins en 1990 une réunion des députés du peuple de la République socialiste soviétique d'Estonie de tous les niveaux a adopté une résolution Sur l'indépendance d'Etat de l'Estonie et après son adoption l'Académie des sciences de la RSS d'Estonie a créé une commission en charge d'évaluer le préjudice. Les travaux de la commission ont abouti à la publication d'un rapport intitulé Livre blanc des pertes causées au peuple d'Estonie par les occupations de 1940-1991 . Selon le document, au cours de la première année (1940-1941) l'Estonie a perdu 48 000 habitants. Le nombre de victimes de la deuxième occupation soviétique est évalué à 111 000 personnes (exécutées, déportées, s'étant exilées en Occident, mortes de la faim et des maladies). Pour chaque mort l'Estonie a exigé 75 000 dollars, soit environ 12 milliards de dollars au total. Ayant supposant que la Russie ne pourrait pas verser une somme aussi importante le président de la commission d'Etat Vello Salo a noté : « Qu'ils mettent en notre possession, disons, la région de Novossibirsk où nous pourrions pendant un certain temps nous occuper de l'exploitation forestière » (cité d'aprèus le livre d' Alexandre Dukov intitulé Le mythe sur le génocide. Les répressions des autorités soviétiques en Estonie entre 1940 et 1953) .

La Lettonie était la moins active dans ses exigences. En 1996 sa Diète a adopté une déclaration Sur l'occupation de la Lettonie dans laquelle, sans exiger des dédommagements, elle a appelé les pays du monde et les organisations internationales à « reconnaître le fait de l'occupation de la Lettonie » et à « aider à éliminer les conséquences de l'occupation par le biais de l'aide économique et politique ». Cependant en 2005 une autre déclaration a été adoptée : Sur la dénonciation du régime communiste totalitaire d'occupation réalisé en Lettonie par l'Union des républiques socialistes soviétiques . La déclaration stipulait que la Russie « en tant qu'héritière politique et juridique de l'URSS portait la responsabilité financière, juridique et morale pour les crimes contre l'humanité perpétrés en Lettonie et pour les dommages causés à l'Etat letton et à ses habitants pendant l'occupation ». Le document renfermait la revendication de « compenser à l'Etat letton et à ses habitants les pertes causées par des actes illicites ». Une commission spéciale a préparé un rapport qui a estimé à 18,5 milliards de dollars le tort direct subi par la république lorsqu'elle se trouvait au sein de l'URSS. La somme inclut le préjudice écologique suite à la pollution par les entreprises soviétiques et l'armée. Le montant du préjudice indirect (le PIB non reçu) variait : si la Lettonie était restée indépendante et s'était développée au même rythme que la Finlande son PIB aurait pu augmenté supplémentairement de 231 milliards de dollars. Cet indice aurait atteint 277 milliards si les rythmes de développement avaient été comme en Autriche et 335 milliards dans le cas du Danemark.

Pourtant il convient de rappeler aux Lituaniens, aux Estoniens et aux Lettons qui aiment tant remuer l'histoire que Pierre le Grand a acheté eux tous avec toutes leurs terres à la reine de Suède Ulrika Eleonora et leur a donné la liberté. Aux termes de l'article 4 du Traité de Nystad de 1721 la Livonie, l'Estonie, l'Ingrie et une partie de la Carélie ont été cédée à Pierre le Grand « et à ses descendants et aux héritiers de l'Etat russe en possession éternelle et inaliénable et en propriété ». La Russie a versé pour cette « cession » à la Suède 2 millions de thalers d'argent de 28 grammes chacun, soit environ 56 tonnes d'argent. Aujourd'hui cela fait environ 350 milliards de dollars (sans intérêts). A l'époque c'était le budget annuel de l'Empire suédois et la moitié du budget de la Russie. Est-ce que nous devons aussi réclamer aux pays baltes de rembourser cette somme et de nous payer le prix du bail de la terre russe ?

Soit dit au passage, le président de l'URSS Mikhaïl Gorbatchev a exigé de remettre à la Russie Klaipeda et de payer 21 milliards de roubles en échange de la reconnaissance de l'indépendance de la Lituanie. Lenta.ru l'a communiqué en octobre 2011 se référant à un rapport déclassifié du consul général de Suède Daf Sebastian Alander qui était à l'époque en poste à Léningrad.

Bref, rien de personnel, uniquement le business.

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