Réflexions d'un expert polonais un an après l'Euromaïdan

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Notre programme s’articule autour de l’entretien de notre correspondante Irina Tchaïko avec Bohdan Pientka, publiciste et historien polonais, expert en Ukraine.

Le premier anniversaire d’Euromaïdan a été solennellement célébré en Ukraine le 21 novembre. Les médias polonais n’ont eu de cesse de répéter que cet événement doit mener l’Ukraine vers la liberté, la prospérité et la démocratie.

Que pensez-vous de ces événements d’il y a un an ?

Mon appréciation des événements du 21 novembre 2013 et de leurs conséquences, est négative. C’était en fait une des « révolutions colorées » conçue par les États-Unis pour amener l’Ukraine dans la zone d’influence occidentale. Ceci a été reconnu par Henri Kissinger et c’est aussi l’opinion de l’ex-président tchèque Vaclav Klaus qui avait prédit que l’Euromaïdan était un prélude à la désintégration de l’Ukraine.

Ce qui me fait vraiment de la peine, c’est l’instrumentalisation du nationalisme ukrainien radical aux couleurs de l’idéologie de Bandera. Il avait toujours été implicitement présent en Ukraine Occidentale pour sortir ouvertement dans l’arène politique en 1991, après la désintégration de l’URSS et l’acquisition de l’indépendance par l’Ukraine. Le 21 novembre 2013, il s’est légalement et ouvertement imposé comme une force politique à part.

Les autorités polonaises ont fait plus que soutenir activement l’Euromaïdan, elles ont fait un bon accueil au renouveau du nationalisme radical ukrainien et à la réanimation des idées de Bandera. C’est cela qui est révoltant !

Que pensez-vous de la catastrophe humanitaire au Donbass?

Ce qui se passe actuellement dans le sud-est de l’Ukraine est une conséquence des événements du 21 novembre 2013. Il y a eu ensuite le coup d’État de février 2014. Souvenons-nous de ce que Vaclav Klaus avait dit à propos de la désintégration de l’Ukraine. La catastrophe humanitaire au Donbass me plonge, certes, dans la douleur et l’effroi mais cela remonte à l’Euromaïdan à Kiev, aux événements de février 2014 et au coup d’État en Ukraine. C’est alors, quand Kiev avait pris la décision de priver le russe de statut de langue officielle à l’égal de l’ukrainien, que la population russophone du Donbass s’est dressée contre cette innovation. Je tiens à noter par ailleurs que ce sont les autorités officielles à Kiev qui ont déclenché la guerre au Donbass.

Vous avez écrit un jour qu’à la place du Festival de la chanson russe, un autre festival, celui de la russophobie s’est déchaîné en Pologne. Au lieu de l’année de la Russie, c’est actuellement l’année de l’Ukraine, n’est-ce pas ?

Oui, c’est la spécificité de notre vie politique ou il existe un puissant lobby pro-ukrainien. Ce n’est pas seulement l’Union des Ukrainiens (RP) et ses nationalistes radicaux qui influencent considérablement les médias polonais, les milieux officiels et la plus grand parti d’opposition polonais. Cette influence s’étend aux journaux comme Gazeta Wyborcza et Gazeta Polska.

Quand avez-vous été en Ukraine?

A la veille de la « révolution orange » de 2004 et je n’ai plus voulu y retourner parce que voir la belle ville de Lvov et l’Ukraine Occidentale où les monuments de plus en plus pompeux de Bandera et de ses acolytes comme Roman Chouchkiévitch poussaient comme des champignons, me faisait de la peine. Malheureusement, la Pologne avait largement contribué à la renaissance du mouvement bandéroviste.

Les Polonais, ont-ils oublié les horreurs des massacres de Volhynie ?

Non, les descendants des victimes de ces événements horribles se souviennent de cette tragédie mais les autorités polonaises actuelles et le principal parti d’opposition (RP) flirtent avec les descendants des auteurs de ces massacres et cela revient à profaner le souvenir de leurs victimes.

Les autorités polonaises ont invité Oleg Tiagnibok et nos médias publiaient largement ses interviews alors qu’on sait que les opinions du leader du parti « Svoboda » (Liberté) sont une réplique des idées du nationalisme ukrainien radical. L’histoire nous montre cependant que la haine des bandéristes pour les Polonais était même plus irréductible que chez les hitlériens.

Il ne nous reste qu’à remercier le publiciste Bohdan Pietka pour son interview accordée par téléphone à La Voix de la Russie et enregistrée par Irina Tchaïko. T

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