Ces derniers, qu'ils soient Français, Italiens, Grecs ou Russes…ont un ennemi commun, l'Islam radical sunnite. Celui-ci se manifeste pour l'heure par un catalogue de modes d'action redoutables, terrorisme, guérilla, offensives militaires classiques, suivant le cadre géographique où il s'exprime. Pourtant, pour aussi spectaculaires et écœurants soient-ils, les massacres commis jusqu'ici ne sont sans doute qu'un avant-goût de ce que l'Etat Islamique ou les autres groupes wahhabites nous réservent. Chacun a pu le vérifier à l'occasion de l'attaque au missile revendiquée par Daesh contre une vedette de l'armée égyptienne croisant au large de la péninsule du Sinaï: les terroristes salafistes disposent d'engins relativement sophistiqués et savent les mettre en œuvre avec précision. Ils ne s'arrêteront sans doute pas là. Dans la logique eschatologique qui est la leur, du combat final entre les impies et leur mouvance, ils chercheront sans nul doute à se doter d'armes de destruction massive, qu'elles soient radiologiques, bactériologiques et chimiques. Ces dernières, rappelons-le, ont déjà été employées par les rebelles dans les faubourgs de Damas…
Certes le scenario catastrophe d'un missile à portée intermédiaire, atteignant depuis la Syrie ou le Maghreb les rives sud de l'Europe, Marseille ou Sotchi, ne semble pas envisageable à court terme compte tenu des renseignements dont nous disposons sur les mouvements terroristes concernés. Mais on ne peut l'écarter à moyen terme.
D'une part, parce qu'il existe un certain nombre d'Etats proliférant en mesure d'aider les radicaux islamistes à se doter d'armes balistiques simples. Les services secrets pakistanais, qui se sont rendus coupables de complicité avec Al-Qaïda et les Talibans, pourraient apporter une assistance technique aux terroristes qu'ils soutiennent depuis des décennies, du Cachemire au Piandj. Fournir quelques missiles SCUD-C ou D, ou des armes plus sophistiquées, et les techniciens capables de les mettre en œuvre ne leur est guère difficile. D'autant qu'ils peuvent compter, en Afghanistan, Syrie, Irak, Libye, sur des terroristes connaissant le maniement de ce type d'armes pour les avoir utilisé au sein des troupes de Mohammed Najibullah, Saddam Hussein ou Mouammar Kadhafi.
D'autre part, parce que l'inquiétude monte en Europe vis-à-vis de la situation au Maghreb. L'économie tunisienne semble condamnée à moyen terme à la faillite, les attentats visant des vacanciers européens à Tunis et à Sousse ayant sans doute définitivement brisé la principale activité du pays, le tourisme.
Que ferons-nous dans dix ans si l'Algérie, dont certains signaux laissent à penser qu'elle souhaite développer un embryon d'industrie de défense et qui, par ailleurs, renforce sans cesse ses moyens militaires, se dote d'engins de portée intermédiaire, SRBM ou MRBM? Que ferons les Italiens, les Grecs, si l'Etat islamique dispose de tels armes en Libye? Que ferons Russes et Ukrainiens si Daesh et ses alliés acquièrent la capacité de frapper la rive nord de la mer Noire? L'Arménie et la base russe de Gumri sont déjà à portée de tir SCUD depuis les zones tenues par l'Etat islamique dans le nord de la Syrie et de l'Irak…La réponse réside sans doute dans un système de défense antimissile européen déployé vers le sud.
La menace n'est pas Est-Ouest. Elle est Sud-Nord. S'il n'est pas politiquement correct de le dire, rien n'empêche d'en tirer les conséquences politiques et militaires. Cela passe par une réelle collaboration entre tous les Européens, qu'ils relèvent de l'Union européenne ou de l'Union économique eurasiatique. Illusoire? Sans doute si l'on s'en réfère aux volontés exprimées par certains « Occidentaux » de revenir à un affrontement frontal avec Moscou. Pourtant une telle coopération permettrait non seulement de dissiper la crise opposant la Russie, l'UE et l'Otan sur la question du bouclier antimissile, mais aussi de mettre fin aux inquiétudes sur la militarisation de la région de Kaliningrad.
Coopérer face à la menace terroriste et à ses probables développements balistiques c'est pour les Européens faire d'une pierre deux coups: assurer notre protection commune contre l'ennemi wahhabite et supprimer une bonne partie des griefs qui nous divisent.
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