L’or noir en chute libre. Les intéressés ?

© AFP 2023 JEFF PACHOUD ravitaillement
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35 dollars le baril contre 115 dollars il y a un an et demi. Le marché pétrolier n’a pas connu une chute libre d’une telle ampleur depuis 2005.

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Les producteurs américains s'arrachent les cheveux, l'Arabie Saoudite se frotte les mains et l'Europe ne sent pas encore le poids des conséquences, agréables à première vue pour des simples consommateurs, mais dangereux à long terme.

La surproduction. C'est la raison pour laquelle les cours de pétrole plongent actuellement. D'après Philippe Béchade, analyste financier, ce sont les Etats-Unis qui sont massivement responsables de cette surabondance d'or noir:

« Comme aux Etats Unis on produisait de plus en plus de pétrole, il y avait donc une surabondance mondiale de l'offre, et c'est surtout les américains qui ont contribué à cette surabondance mondiale. Et puis le 2e effet qui a littéralement cassé les pattes au pétrole, c'est lorsque l'Arabie Saoudite s'est « les américains se vantent d'être les n°1 pour la production de pétrole, ils ont des couts de revient de 60 à 65 dollar du baril et nous c'est 3.5 et 5 dollar du baril. Donc là on a peut-être une occasion de les « squeezer » et de mettre la main sur des parts de marché qu'on ne veut pas voir échapper ». Donc l'Arabie Saoudite a décidé d'ouvrir ses robinets, ce qui ne lui coutait pas grand-chose, et puis simplement en déclarant la fin des quotas, ça suffisait pour provoquer un effondrement de faire accroissement de l'offre de l'OPEP »

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Qui risque de se faire le plus mal dans cette chute? On cite souvent la Russie. Russie qui ne risque pas beaucoup en tant que premier fournisseur d'hydrocarbures en Chine, avec un contact signé pour 20 ans d'exportation. Le rôle de la Chine pour les exportateurs de pétrole va croissant à mesure que les États-Unis réduisent leurs importations, en misant sur la production de pétrole de schiste. Philippe Béchade estime que les Etats-Unis vont subir les conséquences de leur propre politique sur le marché pétrolier:

« A mon avis ceux qui souffrent en premier c'est naturellement les producteurs américains, parce que les coups de revient sont élevés. Ceux qui aujourd'hui arrivent par des nouveaux procédés, à optimiser le rendement des meilleurs gisement arrivent peut être à abaisser le cout de revient à 50 dollar le baril, mais à 35 il ne sont toujours pas rentables et ne le seront jamais, et surtout ça fragilise le système bancaire américain, parce que plus de 5% de la dette High Yield c'est de la dette contractée par les juniors pétrolière qui se sont mis à produire du gaz et du pétrole de schiste, ceux-là ne rembourseront pas leurs emprunts. Et aujourd'hui l'encours d'emprunt à haut rendement qui est potentiellement en détresse, qui présente un risque de défaut élevé, est supérieur au montant des sub primes, donc la situation est plus grave que celle des créances immobilières de 2008. On a rien appris de l'histoire aux Etats Unis, et on a continué de prêter, en se disant qu'avec des prêts à taux 0 % tous les projets seront rentables, mais non tous les projets ne sont pas rentables à partir du moment où on ne maitrise pas les prix de A jusque Z ».

Les automobilistes européens se réjouissent de cette baisse de prix, au même titre que les compagnies aériennes qui annoncent une baisse de 20 % de leur facture de kérosène en 2015. Comment l'Europe et notamment la France vivent-elles cette plongée des cours du pétrole?

« La France a tout à gagner, ainsi que les autres pays européens non producteurs d'énergie, en tant qu'importateurs, à avoir des prix d'énergie bas. Même raisonnement pour le Japon etc… Mais le problème est le suivant: à qui vendons-nous nos produits, notamment ceux à forte marge? On le vendait à des pays producteurs de pétrole, or avec une chute de 60 à 70% des recettes par rapport au pic de 2013; si nos principaux clients voient leurs recettes diminuer de 70%, qu'est-ce qu'ils vont pouvoir nous acheter? Nous on peut produire moins cher, mais au final pour vendre à qui? »

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L'agence internationale de l'énergie ne prévoit pas un retour à 80 dollars le baril avant 2020. Quel pronostic-il est possible de faire, sur un marché aussi imprévisible? D'après Philippe Béchade — aucun:

Prévoir que ça va pas remonter à 80, ça veut dire qu'on prévoit qu'il n'y a aucun soubresaut politique d'aucune sorte d'ici 2020, c'est un pari. Il faudrait aussi parier que tous les puits de pétrole vont fermer aux Etats Unis et là je pense que certains vont continuer à produire, et les Etats Unis ne voudront pas renoncer complètement à une forme d'indépendance énergétique. Je suis à peu près sûr que les évènements à venir d'ici 2020 feront que le pétrole ne restera pas en dessous de 60/70. Sur papier on peut toujours s'amuser à poser ce genre de raisonnements, mais on est dans quelque chose de totalement irrationnel et géopolitique, je ne sais pas comment quelqu'un pourrait avoir l'outrecuidance et la vanité de penser que rien ne va se produire d'aucune sorte, nulle part,- là je dis « champion ».

Le refus de la surproduction par les pays exportateurs des hydrocarbures pourrait être une solution. Et ce n'est pas un secret que ce processus affecte l'économie russe et fragilise encore et encore le rouble depuis des années. Mais il semblerait que ce n'est pas seulement l'économie en Russie qui est affectée. Les pays concernés par le même problème, comme les Etats-Unis continuent à surproduire en mettant en danger leur propre économie. Du masochisme ou une manœuvre politique? Un peu des deux peut être.

Les opinions exprimées dans ce contenu n'engagent que la responsabilité de l'auteur.

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