Général Desportes : il faut ramener la Turquie à la raison

© AP Photo / Sasa KraljUn char de l'armée irakienne, Irak du nord
Un char de l'armée irakienne, Irak du nord - Sputnik Afrique
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Recep Tayyip Erdogan n'envisage pas le retrait des militaires turcs récemment arrivés en Irak. Les autorités irakiennes saisissent le Conseil de sécurité de l'ONU.

Début décembre la Turquie a fait entrer ses troupes en Irak sous prétexte de vouloir entraîner des soldats irakiens. Bagdad s'est vivement opposée à l'initiative turque ce qui n'a pas d'ailleurs influencé la position d'Ankara. Le président de la Turquie a expliqué que les militaires turcs y ont été envoyés en tant qu'instructeurs, leur mission étant limitée à l'entraînement. Pour Erdogan, « il est hors de question que la Turquie retire ses troupes de l'Irak ». Et pour ne pas parler dans le vide, elle a bombardé le 9 décembre les positions du Parti travailliste kurde (PKK) au Nord de l'Irak. Bagdad a alors demandé à l'Otan de faire pression sur Ankara pour qu'elle retire ses militaires. Mais sans résultat. Le refus persistant d'Erdogan a finalement poussé l'Irak à déposer une plainte au Conseil de sécurité de l'ONU. Selon l'ambassadrice des Etats-Unis Samantha Powers assurant la présidence tournante du CS de l'ONU, la requête irakienne a été enregistrée vendredi, son texte demandant que soit ordonné le retrait immédiat des troupes turques présentes en territoire irakien.

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Le général de division de l'armée de terre française Vincent Desportes estime que la Turquie poursuit ses propres intérêts dans la région:

« Ce qui est sûr c'est que le problème essentiel de M. Erdogan est le Kurdistan. Je crois que nous ne sortirons pas de cette crise tant que M. Erdogan et la Turquie n'auront pas clairement décidé de quel côté ils étaient, et quel était leur véritable ennemi. Je crois qu'il faut néanmoins appeler à la sagesse des Etats (ndlr. Turquie et Irak) et rappeler M. Erdogan à ses responsabilités vis-à-vis de ses alliés et en particulier de l'Europe et des autres pays engagés dans la lutte contre Daech ».

Des agissements continus d'Ankara rendent ses alliés perplexes. Un journal allemand met en garde contre l'escalade du conflit craignant que l'aggravation de la situation dans le nord de l'Irak ne provoque un conflit armé entre Ankara et Bagdad… Le Général Vincent Desportes estime que la Turquie représente, à l'heure actuelle, un vrai problème qui empêche de combattre Daech:

« Toute l'ambiguïté de la Turquie qu'elle est dans l'Otan sans y être, qu'elle veut être dans l'Europe sans y être et qui mène un double jeu par rapport à Daech. Son véritable ennemi n'étant pas l'EI mais les mouvements kurdes indépendantistes. La Turquie devient effectivement un danger pour tout le monde. Et la solution de la crise dans laquelle nous sommes, passe bien par la Turquie qu'il faudra ramener à la raison de manière à ce que la Turquie comprenne quels sont ses véritables intérêts et non pas ses intérêts à court terme. C'est vrai que la position de cavalier seul erratique et très ambiguë de la Turquie ne facilite pas les choses. Et le problème essentiel que les grandes puissances ont à régler aujourd'hui est bien le problème de la Turquie ».

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Bien que les autorités irakiennes se soient adressées directement à l'Otan pour trouver une solution à la crise actuelle, il semble que les USA ne s'empressent pas de rappeler la Turquie à l'ordre. Le représentant du département d'Etat américain John Kirby a déclaré que la Turquie et l'Irak menaient un dialogue sur la question. « Nous le saluons et considérons que les pays doivent élaborer une solution commune », a-t-il dit. A la question de savoir si les USA prenaient en compte les inquiétudes des Irakiens, posée par une journaliste de RT, M. Kirby a répondu: « C'est encore une question ridicule… C'est tellement stupide. N'avez-vous pas honte de poser des questions pareilles? »

Selon les responsables américains, c'est donc Bagdad qui doit trouver une solution à la crise actuelle et négocier avec des importuns. Par ailleurs, les USA continuent d'inviter des troupes d'autres pays en Irak et en Syrie. Le 9 décembre le secrétaire à la Défense des États-Unis Ashton Carter a déclaré dans le Congrès qu'il s'était adressé à 40 pays constituant la coalition en proposant d'organiser des opérations spéciales et d'apporter d'autres formes de soutien aux pays en question. Bagdad a émis, à son tour, des inquiétudes sur le fait qu'elle n'ait pas son mot à dire quant à la coopération avec tel ou tel pays. La Commission de sécurité et de défense du parlement irakien a appelé donc à réviser ou à annuler même l'accord de sécurité avec les USA.

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Quant aux Etats-Unis, ils s'apprêtent à renforcer leur contingent en Irak, comme l'a annoncé John Kirby, ce qui va à l'encontre des déclarations d'Obama sur l'impossibilité d'une opération terrestre.

Le candidat à l'élection présidentielle américaine Lindsey Graham indique que le déploiement des forces turques sur le territoire de l'Irak sème le doute quant aux réels enjeux de la coalition dans la région et à l'existence même d'un plan de lutte contre Daech.

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