Général Tauzin: enfin le réalisme a prévalu à Paris

© AFP 2023Jean-Yves Le Drian à Moscou, Dec. 21, 2015.
Jean-Yves Le Drian à Moscou, Dec. 21, 2015. - Sputnik Afrique
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Jean-Yves Le Drian et Sergueï Choïgou se sont rencontrés lundi à Moscou pour discuter les possibilités de la collaboration militaire. Le déplacement du ministre français de la défense s’inscrit dans le prolongement de la visite de F. Hollande dans la capitale russe.

ministre français de la Défense Jean-Yves Le Drian à l'ambassade française à Moscou le 21 Décembre 2015 - Sputnik Afrique
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C'est la deuxième fois dans sa carrière que Jean-Yves Le Drian rencontre son homologue russe Serguei Choïgou dans un cadre bilatéral. Gelées pendant deux ans suite au conflit ukrainien, les relations au niveau des ministres de la défense ont été relancées après la dernière visite de F. Hollande à Moscou le 26 novembre. L'idée d'une coalition élargie prônée alors par le chef de l'Etat français, pleinement soutenue par Vladimir Poutine, n'a pas d'ailleurs trouvé d'écho favorable aux USA. D'une grande portée symbolique la visite de Hollande en Russie a mis sur les rails la coopération franco-russe sur le dossier syrien.

Le ministre français a rappelé lors de l'entretien avec M. Choïgou que la Russie et la France avaient une longue histoire des relations amicales et des liens étroits.

« Nous avons eu ensemble une longue histoire et des victoires… Et quelles que soient les circonstances, il importe que nous puissions parler ensemble en raison à la fois de notre histoire commune et des risques et des menaces que nous avons devant nous les uns et les autres », a souligné Le Drian.

Il faudrait donc que Moscou et Paris unissent leurs efforts et poursuivent le dialogue, a estimé le ministre français de la défense. Les deux pays ayant un ennemi commun qu'est Daech.

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La France et la Russie main dans la main pour contrer le terrorisme
A l'issue de l'entrevue qui durait une heure et demi, les deux ministres ont convenu de renforcer leurs échanges dans le domaine de l'information militaire, à la fois sur le bilan des frappes et la localisation des groupes terroristes, ce qu'a confirmé aux journalistes J.-Y. Le Drian après la rencontre avec son homologue russe. Le haut responsable français a également indiqué qu'il était arrivé à Moscou pour remettre sa montre à l'heure quant au plan dressé par les dirigeants russe et français fin novembre. M. Choïgou a précisé, à son tour, qu'il serait possible d'éliminer la menace terroriste seulement si tous les pays intéressés se réunissaient.

Pour le général Didier Tauzin, la relance de la coopération militaire entre la France et la Russie est un signe très positif mais il faut aller, selon lui, au-delà du strict combat contre Daech.

« Je crois que la coopération franco-russe en Syrie est la très bienvenue. Je suis très heureux de cette coopération et j'en attends beaucoup parce qu'il faut absolument détruire Daech. Sans une armée importante comme l'armée russe…ça n'était pas possible. C'est le réalisme, la coopération franco-russe contre Daech. Enfin le réalisme a prévalu à Paris. Il faut avoir une action conjointe à l'égard des soutiens de Daech parce que détruire Daech tout seul, ce n'est pas suffisant. Il faut aller plus loin. Il y a le jeu très pervers de la Turquie. Il y a aussi l'Arabie Saoudite et le Qatar qui soutiennent Daech. Il faut donc aller au-delà du strict combat militaire contre Daech et faire rentrer dans l'ordre toute cette région en attaquant le mal à la racine, c'est-à-dire en obtenant de la Turquie, de l'Arabie Saoudite et du Qatar qu'ils cessent de soutenir Daech ».

La visite de Le Drian à Moscou s'inscrit dans un contexte plus général de la politique menée par la France au Moyen Orient. Paris continue de chercher des alliés dans la lutte contre les terroristes, estime le politologue russe Yuri Potchta qui salue la patience des Français tiraillés entre les revendications américaines, la nécessité de coopérer avec la Russie et les actions polémiques de certains de ses partenaires dont la Turquie. Mais cette situation fait que la France a une politique un peu schizophrénique envers la Russie, comme le souligne notamment le député Thierry Mariani. « D'une part, il y a la volonté de collaborer (avec la Russie, ndlr) face à une réelle menace terroriste. D'autre part, la France a adopté une politique hostile vis-à-vis de la Russie dans plusieurs domaines… », indique également le politologue Yuri Potchta en se référant, entre autre, à la politique des sanctions antirusses à laquelle Paris s'est jointe. Le déplacement du ministre français de la défense en Russie a par conséquent des enjeux plutôt diplomatiques.

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L’union fait la force: Le Drian à Moscou pour lutter contre Daech
L'adoption vendredi par tous les membres du Conseil de sécurité de l'ONU de la résolution ouvrant la voie à des négociations de paix porte à croire que les choses commencent à bouger. Bachar al-Assad n'est plus le but numéro un des Occidentaux au Moyen-Orient mais c'est Daech qui est considéré comme le mal absolu. La porte-parole du ministère russe des affaires étrangères Maria Zakharova a salué le changement de discours de Washington quant au rôle du chef de l'Etat syrien dans cette crise en le qualifiant de tournant historique.

Le général Didier Tauzin considère qu'il faut aujourd'hui une volonté forte de la part de tous les acteurs pour régler la crise syrienne.

« L'avenir nous dira. Ça pourrait être un tournant historique si toutes les conséquences en étaient tirées. Ça sera un tournant historique si nous allons jusqu'au bout du processus. Et pour cela il faut une volonté forte. Je ne doute pas un instant de la volonté forte du président Poutine de terminer le travail. Quant à la France, j'attends de voir parce qu'il y a un changement radical dans le gouvernement. J'espère vraiment que nous continuerons de manière radicale et forte pour crever l'abcès et pour que ce soit un tournant historique. Cette résolution ne servira à rien, si on ne va pas jusqu'au bout, si on ne fait pas cesser les doubles jeux. Il faut que les puissances occidentales changent radicalement de comportement… La paix de la région, la paix en Europe aussi et peut-être dans le monde en dépend aujourd'hui ».

Reste à voir si toutes les parties prenantes du conflit syrien sont vraiment intéressées à faire tout pour en finir avec Daech.

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