Les US rendent visite aux kurdes en Syrie. Attention : Erdogan voit tout

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La visite à Kobané de Brett McGurk, l'envoyé spécial du président américain Barack Obama, n’est pas passée inaperçue pour Recep Tayyip Erdogan. Le représentant de la coalition internationale antijihadiste a rencontré le chef du YPG (Unités de Protection du Peuple) pour avancer dans la collaboration sur la crise syrienne et la lutte contre Daech.

Le président turc pris par l'émotion d'un allié « trahi » se demande, et le demande aux US: "Comment peut-on vous faire confiance? Est-ce que je suis votre partenaire? Ou alors ce sont les terroristes de Kobané?". Bonne question.

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Les milices kurdes, appelés « terroristes » par Erdogan, ce sont le YPG et le YPJ (la branche féminine de l'unité) et qui sont en l'occurrence, les seules forces au sol syrien qui ont pu faire reculer Daech et qui mènent des combats quotidiens contre le groupe terroriste. Des groupes, félicités par la communauté internationale pour leur avancement dans la lutte commune contre le terrorisme, mais qui ne sont toujours pas reconnu comme « une force légitime ».

Tigrane Yégavian, spécialiste du Moyen Orient, de la Turquie et sur la question des minorités en Syrie, estime que la critique du président turc n'est pas légitime:

« Les Turques utilisent une sorte de chantage contre les Américains où on voit la semaine dernière ils ont réussi à arracher de la bouche du Vice-président Américain, Joe Biden la qualification de terroriste s'agissant du PKK, donc on est encore une fois dans une sorte de chantage et de bras de fer turco-américain pour essayer de négocier un maximum de garanties de la part des Etats-Unis et d'aide de soutien à la politique turque dans la région. Ce qui est assez maladroit et inconvenant du fait qu'au jour d'aujourd'hui les rapports de forces sont en train de changer. Vous voyez par exemple le fait que « l'axe sunnite » c'est-à-dire la stratégie turco-saoudienne est sérieusement mis à mal par l'opération actuelle menée par l'armée Syrienne et l'armée Russe au nord de la Syrie et d'autre part la baisse conséquente des prix du baril de pétrole qui mettent à mal toutes possibilités aux Saoudiens de continuer à financer les rebelles salafistes djihadistes qui combattent au côté des milices turkmènes et rebelles syriennes dans le nord.»

Le président Erdogan remet en question sa confiance en Washington, les autorités américaines vont-elles répondre à ces accusations « d'être amis avec l'ennemie »? D'après Tigrane Yégavian, les Etats-Unis mènent une politique « court-termiste » en ignorant plusieurs dangers:

« Pour l'instant ils ont encore besoin des logistiques, des facilités Turques présentes, dont la base d'Incirlik, la Turquie reste envers et contre tout un pays de l'OTAN, il est hors de question que cette alliance soit remise en question. Mais ce qu'il faut aussi prendre en considération c'est que ce que les Américains ne voient pas, c'est que là les Turques sont en train de pratiquer aujourd'hui dans la région au nord de la Syrie, une politique d'ingénierie démographique comme ils ont fait en 1915, il y a cent ans, c'est-à-dire déplacement forcé de population pour remplacer par d'autres populations c'est le cas notamment des ouïghours, ces immigrés Turkestan chinois qui ont été déplacé de force dans les régions limitrophes à la frontière syro-turc. Le but étant de créer une nouvelle frontière turque, une frontière pour contenir la menace Kurde, les Américains ont laissé faire pour l'instant ».

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En France et à Paris une vague de manifestations contre la politique d'Erdogan a traversé le pays et la capitale, les kurdes parisiens dénoncent les activités de la Turquie qui vont, d'après eux, à l'encontre de la démocratie. Pour Nursel Kilic, responsable des mouvements des femmes kurdes en Europe, la critique du président turc envers le soutien des américains aux kurdes, est une suite logique à sa prise de position dans la région:

« Cette position envers les kurdes est maintenues par Erdogan parce que actuellement ce que les combattantes de l'YPJ et les combattant de l'YPG défendent actuellement à Kobané et aussi dans les trois cantons du Rojava, notamment à Jazira, Afrin et à Kobané. Ce n'est pas simplement la défense d'un territoire, la défense d'une terre, mais c'est aussi la défense d'un système d'autonomie démocratique et donc cela représente un grand danger de masse idéologique face à l'idéologie partisane et chauviniste d'Erdogan et de son équipe ».

La réaction des turcs au succès des kurdes à Kobané reflète ce qui se passe actuellement dans l'est de Turquie. Nursel Kilic explique à Sputnik, que depuis deux mois des massacres de civils innocents sont ignorés par la communauté internationale:

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« A ce jour actuellement, nous nous sommes réveillés avec un cauchemar, avec un massacre, avec une atrocité. Aujourd'hui dans la ville de Cizre dans la région du Kurdistan de Turquie, plus de 60 civiles ont été exécutés, incendiés, ils ont été attaqués par des armes chimiques par l'armée régulière turque, ils ont été retrouvés morts dans des caves de deux différents immeubles, donc ce qui se passe aujourd'hui, cela se passe sous le silence, sous les yeux fermés du monde entier. Ce massacre, ce crime contre l'humanité, ce crime de guerre, qui continue à subir dans le Kurdistan de Turque, est qui est là, sous embargo médiatique international et local, notamment par le gouvernement du AKP, qui continue à dénoncer ces personnes-là, les civils qui ont été grièvement blessés et tués, et qui ont été séquestrés depuis plus de 52 jours dans ces deux caves, et la Turquie les dénoncent comme des terroristes. C'est une politique de criminalisation, de destruction du peuple kurde, qui veut vivre dans une démocratie et dans la liberté. Après les succès à Kobané des kurdes, c'est une volonté d'Erdogan encore une fois de transformer la perception de la communauté internationale à l'égard du peuple, kurde. C'est une volonté (de la Turquie) d'anéantir le peuple le plus ancien de la Mésopotamie ».

Aujourd'hui n'importe quel crime contre l'humanité peut être expliqué par le lien des personnes en questions au terrorisme. Le seul problème, c'est qu'il semblerait que certains alliées comme les US et la Turquie par exemple n'arrivent pas à se mettre d'accord sur la définition du « terrorisme », une divergence qui coute la vie à de nombreux innocents et laissent des crimes évidents ignorés.

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