Éric Serra, le compositeur des défis impossibles

© Photo Emanuele ScorcellettiEric Serra
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Le Grand Bleu, Léon, Subway… autant de films qui ont marqué tant par les images de Luc Besson que par la bande-son d’Eric Serra. Sputnik a rencontré le compositeur de musique de film à Saint-Pétersbourg. Dialogue avec l’un des maîtres étalons du genre, à l’instar d’Ennio Morricone ou George Delerue.

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À l'occasion du Ve Forum culturel international de Saint-Pétersbourg, du 1er au 3 décembre, le compositeur Eric Serra, auteur des bandes originales de Subway, Nikita, ou encore Léon participe à un débat autour du thème « La musique et le film : ensemble ou à part ? ». On se souvient tous de la scène culte du Cinquième élément avec la Diva Plavalaguna. On dit que certaines notes de cet air de la chanteuse bleue ont été retouchées, inaccessible à la voix humaine.

« C'était la scène qui voulait ça, c'était censé être une chanteuse extraterrestre, raconte à Sputnik Éric Serra. Pour qu'on entende une extra-terrestre, j'avais écrit des choses impossibles à chanter pour un humain. C'était volontaire. J'enregistrais avec une vraie chanteuse d'opéra, mais je l'ai prévenue de l'impossibilité de certaines choses que j'ai écrites, pour qu'elle ne s'inquiète pas. Après j'ai échantillonné sa voix et puis j'ai trafiqué avec mes ordinateurs pour lui faire chanter des choses impossibles. »

Désormais, cet air est devenu un défi pour les chanteuses, un passage obligé pour une professionnelle, ce qui amuse presque le compositeur :

« J'ai vu que sur Internet il y a plein de chanteuses qui ont essayé de le faire. Ça m'a fait beaucoup rire. Pour l'instant, je n'en ai pas vu une seule qui le fasse vraiment bien. On y voit plutôt un exercice rigolo, mais plus rigolo que beau, je trouve. En revanche, avec la vraie chanteuse qui a chanté l'original, Inva Mula, on a fait des concerts où elle a chanté le morceau à 90-95 %. Il suffit de changer 3-4 notes et elle arrive à chanter tout le reste. »

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Quand Éric Serra commence à travailler sur un film, pour lui, ce n'est pas une histoire abstraite qu'il veut raconter et ce n'est pas un travail parallèle avec la partie visuelle du film… C'est avant toute chose le film qui l'inspire effectivement.

« J'aime bien travailler directement sur les images, explique le maestro. Je ne suis pas très conceptuel, mais j'écris vraiment plus à l'émotion. Je regarde le film et puis je compose ce que ça m'inspire, c'est purement émotionnel et instinctif. J'aime bien mélanger tous les styles musicaux, j'aime bien, notamment, apporter un peu d'éléments ethniques, quand le film s'y prête. Si, par exemple, le film se passe en Inde ou en Afrique, je sais que je vais en profiter pour mélanger des instruments locaux. »

On se demande si le compositeur regarde le film déjà monté et s'il peut s'abstraire des comédiens qui y jouent. Ainsi, dans Léon, il semblait difficile de passer à côté de la personnalité de l'acteur. Mais non !

« C'est le rôle qui m'inspire, ce n'est pas l'acteur, explique Éric Serra. Avec Jean Reno, qui est aussi un grand ami, presque un frère, j'avais envie de faire encore mieux parce que c'était lui. Mais ce qui m'inspire, c'est le personnage, ce n'est pas l'acteur ou l'actrice. »

Lors de la création de la bande-son (et ça paraît tout à fait naturel) rien ne distrait le compositeur de son travail de fond :

« Ce qui m'intéresse surtout, c'est le rôle qu'on donne à la musique dans le film. Je m'intéresse beaucoup plus à ça qu'au sujet du film lui-même. La preuve, c'est qu'avec Luc Besson, on a fait des films très différents les uns des autres : entre Subway, le Grand Bleu, Léon, Le Cinquième élément et The Lady. Ces cinq films n'ont absolument aucun rapport, mais le travail pour moi était intéressant les cinq fois parce qu'à chaque fois, la musique a un rôle vraiment important. Si Luc Besson m'appelle, je vais faire un film avec lui, sans même avoir besoin de savoir quel est le sujet. Et pour les mêmes raisons, avec d'autres réalisateurs, ça peut être le contraire. »

Mais l'artiste garde suffisamment de temps pour composer autre chose que des bandes originales de films. Il a monté un gros spectacle avec son groupe, un concert avec des vidéos, des projections vidéo, un gros light show qu'il fait tourner un peu partout dans le monde et en février (à confirmer), un concert à Moscou et à Saint-Pétersbourg. « Puis j'ai d'autres projets de musique, d'albums, qui sont pour l'instant secrets », rajoute malicieusement Éric Serra.

Une chose est sûre pour le compositeur : la musique est toujours présente dans la vie des gens.

« C'est un moyen de communion qui est magnifique, précise-t-il. Et moi, c'est ce que j'adore quand je suis en concert, parce qu'au moment où on fait de la musique en temps réel, avec une réaction du public en temps réel, c'est une vraie communion. J'adore aussi écouter de la musique chez moi. L'un ne remplace pas l'autre. »

Par contre, de l'avis d'Éric Serra, ce qui a changé, ce sont les modes de consommation de la musique et surtout, on vend beaucoup moins de disques. Il ne nous reste plus qu'à poser la question la plus indiscrète et la plus difficile au Maestro :

« Quel est le bébé préféré de votre carrière musicale ? » Éric Serra n'esquive pas la question : « C'est difficile d'avoir un bébé préféré, puisqu'on les aime tous, ses bébés. Si vraiment j'étais obligé de répondre sous la torture, je choisirais probablement Léon, la musique de Léon. »

Mais non, on n'a pas torturé le grand compositeur ! Et il viendra comme promis à Saint-Pétersbourg, du 1er au 3 décembre, pour répondre à d'autres questions, pour parler de musique.

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