Comment en sommes-nous arrivés là ? Du terrorisme islamique à l'élimination des deux partis de gouvernement, en passant par la faillite de 60 000 entreprises françaises par an, les crises et les signes annonciateurs de bouleversements se multiplient.
Le sens du commun s'effrite, les antagonismes se multiplient aujourd'hui en France mais, à vrai dire, ceux-ci ne sont pas totalement nouveaux. Alors pour mieux les saisir, saisir l'ordre des choses, pour d'une certaine manière se rassurer, nous recevons le politologue Marc Crapez, qui vient de publier aux éditions du Cerf un nouvel essai, Antagonismes Français.
Un essai à contre-courant car, écrit-il : « l'immobilisme est la caractéristique majeure du système politique français ». Malgré des luttes brutales et des désirs révolutionnaires, nous restons immobiles…
Reminiscences du XXè siècle
« Le fait d'être ni de droite de gauche est une idée très ancienne dans la vie politique : Bayrou a fait 18 % mais on pense aussi à Lecanuet, à Pierre Mendès France qui était très proche de Macron — il était censé être plus intelligent, plus droit que les autres. C'est une très vieille idée dans la vie politique française. Nous avons une vue biaisée par la Vème République. Tout le XXè siècle est dominée par la IIIè et IVè Républiques qui sont en fait des coalitions, autour du centre. Par des mouvements charnières entre la droite et la gauche. Si on regarde l'ensemble de la tradition politique française : il y a 1789, puis des rebondissements de cette révolution au XIXè et, depuis l'affaire Dreyfus, c'est l'immobilisme qui domine, d'abord à cause de la peur bleue des républicains du coup d'Etat de Napoléon III (…) qui empêche de fonder un pays gouvernable: on a peur de l'exécutif. »
Le FN, une impasse ?
« Le Lepénisme actuel peut être pour certains une solution mais de facto, jusqu'à présent, a joué inhibiteur, de blocage: les voies sont en quelque sorte gelées faute d'alliance, ce qui peut changer avec NDA. Depuis 40 ans, cela reste un phénomène qui contribue à bloquer le système plutôt qu'à le changer. »
Une caste d'intellectuels
Désillusion Macron ?
« Je ne vois pas de régénération complète du paysage. Ça a été maintes fois annoncé, ça fait partie des thèmes récurrents de l'histoire. (…) c'est encore une règle de Tocqueville : la démocratie est une sorte de régime qui ne permet plus d'issue révolutionnaire, qui chloroforme les velléités révolutionnaires. Le fait de pouvoir librement s'affronter dans une arène politique est quelque chose qui met fin au cycle révolutionnaire. Cela n'empêche pas l'inédit en histoire mais je ne pense pas que cela change quelque chose si le candidat le plus plausible est élu — je crains qu'il n'y ait des désillusions sur sa capacité à modifier le paysage politique. »
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