La France veut négocier avec les migrants sur la côte

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Le ministre français de l'Intérieur Gérard Collomb a dévoilé au Journal du Dimanche comment les autorités du pays comptaient réagir aux menaces extérieures.

Pour Alexeï Tarkhanov, correspondant du journal russe à Paris, la première interview du ministre et les premiers éléments du programme de lutte contre l'immigration clandestine montrent que «les problèmes intérieurs de la France ne pourront être réglés qu'au niveau international». Selon le quotidien Kommersant.

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L'interview de Gérard Collomb fait écho à la récente allocution du président français Emmanuel Macron, qui a fixé un objectif à son administration: «Pas un seul migrant à la rue». Cette directive sera difficile à accomplir, même si Gérard Collomb a annoncé 3.500 places supplémentaires dans les centres d'accueil pour les réfugiés potentiels. Le nombre de demandeurs d'asile en France augmente: 85.726 requêtes ont été déposées en 2016, soit 7,1% de plus que l'année précédente. Environ 69,1% des demandes sont rejetées mais peu de candidats à l'asile acceptent de quitter le pays une fois qu'ils apprennent cette décision, alors qu'ils ont dépensé tant d'efforts et d'argent pour s'y rendre.

Il a été suggéré de réduire le temps de traitement de la demande d'asile de 8 à 6 mois, ce qui est d'autant plus important que pendant cette période, les migrants peuvent vivent légalement en France. Les aides qu'ils touchent sont minimes, ils sont logés en groupes mais beaucoup d'entre eux sont prêts à vivre dans ces conditions non seulement des mois, mais aussi des années. La bureaucratie française ne brille pas par sa rapidité même dans des cas plus simples, et en l'occurrence il est proposé d'étudier la situation de personnes qui arrivent souvent sans passeport ou avec de faux documents d'identité. D'autant que ces chiffres ne prennent en compte que les migrants enregistrés. Le nombre de sans-papiers se trouvant en France est évalué uniquement en fonction du nombre de demandes d'aide médicale — les données datant de deux ans faisaient déjà état de 300.000 personnes dans cette situation.

D'ici 2019, on compte augmenter le nombre de places d'accueil jusqu'à 12.000 mais il est évident que cela ne suffira pas, surtout que des ressortissants de pays d'Europe continentale se joignent aux réfugiés venant des points chauds sur le continent africain: d'après Gérard Collomb, près de 20% des demandeurs d'asile dans les centres d'accueil sont des Albanais. Il a ainsi fallu s'entretenir avec le premier ministre albanais pour rendre difficile l'entrée sans visa des ressortissants de ce pays en France.

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«Notre politique doit toujours concilier efficacité et générosité. Nous accueillons tous ceux qui fuient guerres et persécutions, mais nous distinguons les réfugiés de ceux dont la migration obéit à d'autres ressorts, notamment économiques», a déclaré Gérard Collomb. Mais il est difficile de faire cette distinction car en arrivant sur le territoire français, les réfugiés n'ont parfois pas l'intention de respecter les lois françaises. Un rapport de la Chambre des comptes préparé sous la présidence de François Hollande stipulait que «malgré la prescription de quitter le territoire français, seulement 1% se plie à cette obligation», et cette politique est devenue «la cause principale de l'afflux d'immigrés clandestins en France».

Ce qui a conduit à l'idée exprimée fin juillet par Emmanuel Macron: «Il faut créer en Libye des hotspots afin d'éviter aux gens de prendre des risques fous (en traversant la Méditerranée), alors qu'ils ne sont pas tous éligibles à l'asile.» Il ajoutait aussi qu'il avait l'intention de s'en occuper immédiatement «avec ou sans l'Europe». Des postes pour ces centres avancés sont prévus au sud de la Libye, au nord-est du Niger et au nord du Tchad. C'était précisément la solution proposée par Nicolas Sarkozy dans son livre de campagne Tout pour la France.

Macron ne peut pas suivre directement ce «conseil» de la droite car dans la France républicaine et tolérante, cela serait présenté comme une atteinte aux droits de l'homme des migrants. C'est pourquoi Gérard Collomb explique également cette décision en disant que, fatigués de la présence des migrants, les Français pourraient cesser d'apporter de l'aide à ceux qui en ont réellement besoin. «Si l'on ne fait pas la distinction entre le droit d'asile et les autres motifs de migration, ce sera le droit d'asile qui sera remis en question», affirme le ministre.

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Toutefois, en dépit des déclarations du ministre de l'Intérieur, la mise en place de centres d'accueil de réfugiés en Afrique reste en suspens. La situation en Libye est toujours loin d'être stable et il est peu probable d'y trouver prochainement un territoire où les réfugiés seraient en sécurité. Dans une interview accordée en 2016 au Figaro par le ministre de la Défense de l'époque, Jean-Yves Le Drian, actuellement ministre des Affaires étrangères, ce dernier parlait des difficultés auxquelles était confronté le programme Sophia prévoyant la mise en place d'une flotte mobile capable d'intercepter près des côtes libyennes des navires transportant les migrants. Le programme avait été bloqué, faute de pouvoir agir dans les eaux territoriales sans l'autorisation de la Libye.

Le Drian, à la tête de l'armée, avait alors dû s'occuper de la situation intérieure en lançant des patrouilles partout en France dans le cadre de l'opération Sentinelle. A présent, en tant que ministre des Affaires étrangères, il doit à nouveau s'occuper des problèmes du ministère de l'Intérieur pour repousser avec Gérard Collomb la migration aussi loin que possible de la frontière nationale. Les problèmes de sécurité de la France ne peuvent être réglés qu'en lien avec les problèmes de sécurité de l'Afrique. Par conséquent, leur règlement ne dépend pas uniquement du ministre de l'Intérieur ou du président. On ignore même si une telle solution existe.

Les opinions exprimées dans ce contenu n'engagent que la responsabilité de l'auteur de l'article repris d'un média russe et traduit dans son intégralité en français.

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