Erdogan, jette-t-il les S-400 russes à la face de l'Otan?

© REUTERS / Wolfgang Rattay Recep Tayyip Erdogan
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Les mises en garde de l’Otan contre l’acquisition par la Turquie de missiles S-400 russes feront-elles renoncer Ankara à la transaction et cette dernière ne sera-t-elle qu’une manœuvre politique d’Erdogan, un moyen de montrer ses muscles à Washington et à l’Alliance? Analyses d’experts russes.

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En dépit des mises en garde de l’Otan contre l’acquisition par la Turquie de S-400 Triumph russes, le Président turc Recep Tayyip Erdogan a assuré qu'il n'y aurait aucun problème avec la transaction et n’a même pas écarté que la prochaine étape puisse être une production conjointe de ces missiles. Cependant, malgré cette confiance manifestée par Ankara, des experts russes restent sceptiques sur le sujet. Ainsi, Sergueï Ermakov de l’Institut russe d'études stratégiques est convaincu que l'Otan fera tout pour «faire changer d'avis» la Turquie. D’ailleurs, dans le comportement d’Ankara, certains distinguent une manœuvre lui ouvrant une porte de sortie.

«Quand, en évoquant le contrat pour la livraison de S-400, la Turquie s'est mise à exiger des conditions supplémentaires non évoquées auparavant, comme le transfert des technologies ou les plans pour l'élaboration conjointe des S-500, certains l'ont perçu comme la préparation du terrain précisément au cas où la pression de l'Occident sur la Turquie serait trop grande et qu'elle serait forcée d'abandonner ce contrat», explique l’expert dans un commentaire au média russe Svobodnaïa Pressa.

Évaluant le futur des relations entre Ankara et l’Alliance, il estime que, dans un avenir prévisible, l'Otan et Washington s'efforceront de maintenir la Turquie dans ses rangs. C'est un allié clef dont les États-Unis ont besoin dans la région.

«La sécurité des mers Noire et Méditerranée, les opérations au Proche-Orient et le déploiement d'une quantité significative du potentiel nucléaire américain en Europe sont en jeu. Je veux parler du dépôt à la base aérienne d'Incirlik. La Turquie est un membre avantageux pour l'Alliance du point de vue militaro-stratégique, qu'il sera difficile de chasser. Ce serait contre-productif», estime-t-il dans son commentaire à l’édition.

Viktor Nadeine-Raevski de l'Institut d'économie mondiale et des relations internationales (IMEMO) y voit quant à lui une tentative d’Ankara de faire pression sur l'Occident et de montrer son indépendance.

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Les Américains ne disposent pas d'un système équivalent au S-400. Ils possèdent des systèmes Patriot plutôt fiables qu’ils ont d’ailleurs refusé de vendre aux Turcs, note-t-il, jugeant que c'était «visiblement une tentative de Washington de faire pression sur la Turquie, qui avait commencé à manifester une trop grande indépendance en politique étrangère. La Maison-Blanche a décidé de la rappeler à l'ordre mais a provoqué l'effet inverse».

Ainsi, l'achat de S-400 ne s’avère pas seulement une question militaire, mais également politique. «Il est question de l'émergence d'Erdogan en tant que personnalité charismatique dans son pays et de la recherche permanente de sources pour renforcer ce charisme. C'est un point essentiel. Erdogan peut-il sacrifier ses ambitions sur l'autel de prétendues valeurs d'alliance? C'est une question discutable», conclut M.Nadeine-Raevski.

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Rappelons qu’alors que la Russie et la Turquie ont signé début octobre un contrat portant la fourniture de S-400 Triumph à Ankara, le président du comité militaire de l'Otan Petr Pavel a mis en garde les autorités turques contre l’acquisition de ces systèmes antiaériens, précisant que si cette transaction avait lieu, la Turquie ne pourrait pas s'intégrer au système de défense antimissile unifié de l'Alliance. Il a en outre tenu à souligner que même si les systèmes antiaériens de l'Otan n'étaient pas connectés aux S-400, leur seule présence «engendrerait des problèmes pour les actifs alliés déployés dans ce pays».

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