Best of 2017: après celui de Sarcelle, de «nouveaux drames» à prévoir?

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Trois meurtres, un suicide de policier, tel est le bilan du drame de Sarcelles. Si le fait divers est aussi rapidement tombé dans l’oubli –loi du genre– qu’il avait suscité d’émotion en novembre dernier, il reste révélateur d’un malaise profond dans la police, qui a couru tout au long de 2017. C’est à ce titre qu’il figure dans notre sélection.

[texte initialement publié le 21/11/2017 avec les titre et chapô suivants:]

Drame de Sarcelles, révélateur du désarroi de la police

Sarcelles - Sputnik Afrique
Drame de Sarcelles, révélateur du désarroi de la police
Le drame de Sarcelles est-il à imputer aux autorités de la Police nationale et de l'État? Si la question semble provocatrice, l'évènement dramatique, du policier qui a abattu trois personnes et en a blessé grièvement autant avant de se suicider, réside principalement dans un manque de moyens donné aux gardiens de la Paix.

«Il n'y a pas de structures actuellement pour aider un policier lorsqu'il est en difficulté, à la fois dans une difficulté d'ordre privé, ou d'ordre complètement opérationnel ou au sein du service. […] Il n'y a déjà pas de structures pour les policiers eux-mêmes. Donc pour la famille, ce sont des structures qui sont encore bien plus faibles que ce que l'on pourrait imaginer.»

Stanislas Gaudon, secrétaire administratif général adjoint du syndicat Alliance Police met en avant les causes principales du drame impliquant un policier samedi soir à Sarcelles. Le gardien de la Paix a blessé son ex-compagne et tué son père, et deux passants qui avaient tenté de s'interposer. La situation est claire: la police, la famille des forces de l'ordre et l'entourage sont tous touchés par un homme qui, après avoir commis ces meurtres, a mis fin à ses jours. Mais comment défendre les familles et la population, alors que les policiers eux-mêmes semblent manquer de moyens? Le représentant des policiers développe ces manques structurels:

«Il faut évidemment que les difficultés de chaque policier soient détectées, un policier qui par exemple va mal, il faut qu'on puisse mettre autour de lui, une structure, il faut qu'on puisse l'assister et qu'on procède notamment aux mises à disposition d'un soutien psychologique ou de mettre en route la médecine de prévention. Ce sont deux éléments qui sont importants, mais qui sont pour l'instant insuffisants.»

Si ces deux éléments semblent vitaux pour tout homme qui assure la sécurité en France dans un contexte extrêmement tendu, ils ne devraient être que des points de complément à un plan d'action plus global:

«Rien ne change?! On avait beaucoup d'espoir surtout en 2014 et 2015, puisqu'enfin cela faisait partie des priorités du Ministère de l'Intérieur, qu'il y avait un plan de prévention qui devait se mettre en place et qui finalement n'a pas été au bout.»

La prise de conscience des autorités étatiques n'a pu s'exprimer réellement après les attentats qui ont touché gravement le pays ces derniers mois. Et ces attentats de 2015 et 2016 ont considérablement aggravé le problème puisque «l'engagement opérationnel est démultiplié» et ainsi l'environnement quotidien des forces de l'ordre s'est dégradé. Stanislas Gaudon souhaite donc insister pour éviter de nouvelles tragédies:

«Pour nous, ce qui est important, c'est qu'enfin on mette en place des structures, un vrai plan de prévention, quitte à reprendre l'ancien et l'améliorer, mais il faut aller jusqu'au bout. Il n'est pas question de s'arrêter en milieu de chemin, parce que sinon on va mettre en péril les structures et si on met en péril les structures ce sont de nouveaux drames.»

Outre ces difficultés liées au pouvoir étatique, le représentant des policiers dévoile un dysfonctionnement interne aux gardiens de la paix:

«Le problème au sein de la police nationale est que lorsqu'on essaye de mettre en place des choses, on ne fait que la moitié du chemin.»

Et d'ajouter pour conclure sur le plan de prévention des risques de suicides dans le rang de la Police nationale:

«En plus, dans le cadre de prévention du suicide, il y avait des référents qui devaient être mis en place au sein des services —on s'aperçoit aujourd'hui que ces référents-là n'existent plus parce que d'abord, ils avaient été désignés d'office.»

De plus, Stanislas Gaudon explique ces suicides par les difficultés opérationnelles que rencontrent les agents. En effet, il pointe du doigt un manque global de moyens. Comme évoqué succinctement précédemment, les attentats de 2015 et de 2016 ont accentué les responsabilités des policiers et leur charge de travail:

«Il faut tout d'abord que l'on donne les moyens à la police de travailler sereinement. […]
L'engagement opérationnel depuis presque trois ans, qui est extrêmement important, est sur tous les fronts.»

Mais, au-delà du terrorisme, Stanislas Gaudon dénonce aussi le climat délétère qui règne parfois dans la société contre les forces de l'ordre:

«Je rappellerais que nous sommes quand même des cibles privilégiées […] dans le domaine du droit commun, nous sommes aussi la cible parfois de violences verbales. Pour mémoire, il existe certaines parutions dans des journaux, dans des publications d'associations qui pensent que la police est à l'origine de tous les maux.»

Et il met en garde contre ceux qui instrumentaliseraient le drame de Sarcelles pour ternir leur image, oublier leur quotidien et remettre en cause des moyens indispensables à leur mission:

«Alors attention. Essayons de ne pas généraliser des actes d'exceptions tout aussi dramatiques qu'ils soient […] de ne pas tomber dans la faciliter et de dire: les 110.000 policiers sont tous des fous furieux de la gâchette, les gendarmes sont pareils, ils tirent sur tout ce qui bouge, non. Non, ce n'est pas du tout le cas.»

Après ces (dénonce, met en garde), le représentant du syndicat Alliance Police souligne le récent soutien des autorités étatiques et notamment du ministre de l'Intérieur, Gérard Collomb:

«On apprécie lorsque les autorités défendent des policiers chaque fois qu'ils sont attaqués ou que l'on jette la suspicion ou la stigmatisation vis-à-vis des policiers. […] Cela a été le cas notamment […] lorsque le ministre a dit qu'il n'était pas question de remettre en cause le port d'arme hors service pour les policiers.»

La possibilité donnée aux policiers de porter leur arme hors du service semble en effet être un moyen indispensable dans leur mission. Stanislas Gaudon explique qu'elle est essentielle pour les policiers eux-mêmes, en référence aux attentats de Magnanville, mais aussi pour l'ensemble de la population:

«Le policier a l'obligation d'intervenir 24/24, en service et hors service. […] Lorsque le commissaire de police intervient à l'intérieur du Bataclan, il arrive à neutraliser un terroriste avec seulement son arme de service. Donc c'est dire à quel point cela peut être important que les forces de sécurité soient dans la possibilité d'intervenir pour neutraliser notamment un individu.»

Le débat rapidement mis en avant par un grand nombre de médias n'a sans doute pas sa place dans ce drame. Mais une prise de conscience supplémentaire —ces hommes en difficultés sont armés- permettrait peut-être un élargissement au soutien par des sessions de préventions et peut-être plus de transparence sur les difficultés de leurs vies personnelles. En effet, une nouvelle femme est morte à cause de son mari, comme le rappelle Marlène Schiappa, secrétaire d'État à l'Égalité entre les hommes et les femmes: «le sujet n'est pas le port d'armes des policiers, c'est la violence conjugale».

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