À la guerre comme à la guerre: avec ou contre Londres

© AP Photo / Francois MoriTheresa May et Macron
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Au menu du sommet franco-britannique du 18 janvier, Theresa May devrait annoncer son soutien à Paris dans ses opérations extérieures et Emmanuel Macron plaider pour une collaboration plus étroite des deux pays, tant au niveau bilatéral qu’européen. C’est sur ce dernier point que Londres risque de grincer des dents.

C'est plus que jamais l'Entente cordiale entre Paris et Londres. Emmanuel Macron souhaite en effet relancer la coopération franco-britannique dans le domaine de la Défense. C'est dans cette optique que le chef de l'État se rendra le 18 janvier à Londres pour y rencontrer Theresa May, avec qui il échangera sur le rôle du Royaume-Uni dans l'Europe de la Sécurité et de la Défense.

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La coopération entre Paris et Londres sur les questions militaires stagne depuis quelques années, malgré une volonté partagée de renforcer les partenariats dans ce domaine avant le Brexit. La lutte contre le terrorisme devrait, sans surprise, être au cœur des discussions, tant au niveau bilatéral qu'européen.

Car, en dépit de la sortie de Londres du club européen, Emmanuel Macron ambitionne d'associer le Royaume-Uni à l'Europe de la Défense. Il souhaite en effet pousser Theresa May à rejoindre l'Initiative européenne d'intervention (IEI) qu'il a appelée de ses vœux lors de son discours sur l'Union européenne à la Sorbonne le 26 septembre dernier. Cette initiative prendrait, selon la ministre des Armées Florence Parly, la forme d'une «force rapidement opérationnelle qui permettrait aux Européens d'agir indépendamment de l'Otan».

La France soutient de plus le développement à l'échelle européenne d'une «culture stratégique commune» pour améliorer les relations entre les armées nationales et cela passe, selon Emmanuel Macron, par la création de corps européens. Comment ces projets s'articulent-ils avec l'Eurocorps, le Président ne le précise pas et d'ailleurs, là n'est pas la question pour Londres. Si elle a, ces derniers temps, cessé d'utiliser son veto pour bloquer toute initiative européenne dans le domaine de la Défense, elle n'a pas pour autant accepté l'idée que la sécurité du continent soit assurée par une organisation autre que l'Otan.

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Emmanuel Macron compte sur les divergences entre les États-Unis et l'Europe ainsi que sur les baisses de financement de l'armée britannique pour faire valoir l'argument de la création de capacités de défense propres et de la mutualisation de ces capacités. Comme l'explique le Financial Time, «L'idée est que, dans le cas où un pays doive réduire certaines capacités à cause de contraintes budgétaires, nous nous tenions côte à côte pour limiter les conséquences.»

«Macron réalise que, dans un avenir proche, une initiative européenne ne se concrétisera pas sans le Royaume-Uni. Il est pragmatique. Ses experts lui disent "Si vous voulez que ça marche, vous avez besoin des Britanniques"», expose Francis Tusa, analyste militaire, dans le Financial Times.

La coopération entre Paris et Londres n'est cependant pas qu'européenne. Au contraire, elle passe avant tout par des accords bilatéraux — les accords de Lancaster House — qui prévoient la création d'un contingent mixte pouvant compter jusqu'à 10.000 hommes ainsi qu'une collaboration accrue dans l'industrie militaire. Des accords qui ne sont pas restés lettre morte, puisque la Force expéditionnaire commune franco-britannique (CJEF) est opérationnelle depuis 2016, avec actuellement 5000 hommes comprenant des éléments terrestres, navals, aériens. Côté complexe militaro-industriel, un projet de drone de combat franco-britannique furtif a été lancé en 2014.

Ces accords continuent de porter leurs fruits: le 20 novembre dernier, madame Parly et son homologue britannique signaient un accord pour approfondir la coopération dans le domaine du contre-terrorisme entre la Royal Navy et la Marine française.

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M. Macron devrait obtenir du Royaume-Uni ce qu'il n'a pu obtenir de Pékin lors de son voyage en Chine. Selon les informations du Times, le chef de l'État ainsi que la Première ministre britannique devraient annoncer un soutien anglais à l'armée française déployée au Sahel à la suite du sommet franco-britannique du 18 janvier. Le même média indique que Londres déploierait des hélicoptères militaires ainsi que des avions et des drones de surveillance dans la région sahélienne.

Le sommet franco-britannique est donc présenté comme ayant plus d'ambition et couvrant un spectre plus large que tous les précédents. Benedict Wilkinson, chercheur au King's College, explique néanmoins que les objectifs français et anglais sont bien différents. L'expert estime en effet que

«Le but principal pour les Français est d'associer les Anglais à leur ambition de développer une coopération européenne en matière de Défense. Pour les Anglais, l'idée est de créer un mécanisme d'action en partenariat avec les principales puissances militaires européennes en dehors du cadre de l'UE.»

Avant de se déployer sur les théâtres extérieurs, la France et le Royaume-Uni vont donc probablement devoir se mener une guerre, d'influence cette fois-ci, pour imposer leur vue de la défense et de la sécurité européennes.

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