Les Ehpad en PLS: «une maltraitance institutionnelle structurée»

© AFP 2023 Philippe Huguenmaison de retraite
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Alors qu’une loi sur le financement de la dépendance est prévue début 2019, une étude vient confirmer les problèmes de recrutement dans les maisons de retraite. Une «urgence» de plus, dans le dossier déjà très chargé des établissements hospitaliers en France.

«Qu'on arrête de faire semblant que tout aille bien!»

s'insurge le docteur Jean-Paul Zerbib, président de l'Union nationale des médecins salarié de la CFE-CGC (Confédération française de l'encadrement —Confédération générale des cadres).

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Les maisons de retraite peinent à recruter. Le constat n'est pas nouveau: en mars dernier, à l'appel de plusieurs syndicats, une centaine de personnes se sont rassemblées à Paris pour protester contre le manque d'effectifs dans les maisons de retraite médicalisées.

«Est-ce qu'on est prêt à payer pour nos anciens? En tout cas, on ne pourra plus dire qu'on ne sait pas», déplore le médecin, qui fait de l'amélioration des Ehpad (établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes) «un combat citoyen».»

Jeudi 14 juin, une étude de la Drees (Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques) portant sur l'année 2015, vient étayer leur propos: elle estime à 49% les Ehpad du privé confrontés à des difficultés de recrutement et 38% des Ehpad du public.
Une situation alarmante et longtemps passée sous silence, sur laquelle le syndicat CGT du CHU de Toulouse a par exemple décidé, à sa manière, d'attirer l'attention: sur un clip, on y voit les soignants détourner les paroles du rappeur Orelsan au profit de leurs revendications, fustigeant les faibles moyens accordés à l'hôpital public, la concurrence du privé, etc.

Il y a une «maltraitance institutionnelle structurée liée aux réductions de personnel et au départ des soignants qui s'en vont, parce que c'est impossible», poursuit le docteur Zerbib. Un secteur «psychologiquement extrêmement difficile, avec un niveau de risque psycho-sociaux très élevé», qui pose d'évidents problèmes de «fidélisation».
Ludivine, jeune aide-soignante qui a brièvement travaillé dans un Ehpad privé du sud de la France, raconte: «Il devait y avoir une centaine de personnes et on devait être quatre», se souvient-elle. «On change la protection, on fait le visage, et basta […] On est obligé de bâcler […]»

L'expérience tourne court, car «je n'ai pas fait ce métier pour ça, c'est pour ça que je ne travaille plus en maison de retraite […] Je préférerais mourir plutôt que de finir dans un établissement comme ça», poursuit-elle. «Ce n'est pas humain».

Les médecins coordonnateurs et les infirmiers sont également très recherchés: «on estime qu'il manque 15.000 infirmiers dans les Ehpad, 150.000 aides-soignants, 2.000 médecins, sans parler du personnel administratif». «La situation est urgente», ne cesse de marteler le docteur Zerbib, reçu en mars par la ministre de la Santé Agnès Buzyn.

«Un hôpital sans médecin en France, c'est possible», fustige-t-il: «près de 40% des Ehpad, dans le public ou le privé, lucratif ou non, sont sans médecin. Ce qui est totalement illégal» et constitue «le premier désert médical de France».

Le président Macron a promis une loi pour 2019 pour faire face au vieillissement de la population, un chantier dont le coût a déjà fait reculer plus d'un gouvernement. «On a obligé les pouvoirs publics à nous écouter. Mais le gouvernement en face n'est pas responsable du bazar», poursuit le Docteur Zerbib.

«À l'époque de Chirac et de Villepin, alors Premier ministre, l'objectif pour les Ephad et les maisons de retraite c'était qu'il ait un salarié pour un résident. Aujourd'hui, en moyenne, on est à 0,6. Les chiffres n'ont pas évolué, ils se sont dégradés.»

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Agnès Buzyn avait annoncé une rallonge budgétaire de 50 millions pour les Ehpad en janvier dernier, face —déjà- à la grogne des personnels des maisons de retraite. En mars, elle revenait sur le sujet en présentant un plan de sauvetage: renforcement de la présence médicale de nuit, rénovation d'Ehpad, désengorgement des services d'urgence, télémédecine, une enveloppe consacrée aux «soins» et une autre à la «dépendance», etc.

Elle devra maintenant trancher sur la question d'une deuxième journée de solidarité, ou encore d'un cinquième risque de la Sécurité sociale. Des propositions qui ne ravissent pas les syndicats:

«Il n'y a que les salariés qui paient, or c'est un problème national!», conclut le docteur Zerbib.

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