Où retrouver, sur Internet, une liberté d'expression sans entrave? C'est la question que doivent se poser nombre de personnalités plutôt classées à droite de la droite. En effet, YouTube est régulièrement accusé de censure et de bienveillance à l'égard de l'idéologie qualifiée de «dominante», à savoir le «politiquement correct».
À l'instar de TV Libertés, d'autres chaînes ont subi le même sort funeste: Egalité & Réconciliation (chaîne réactivée depuis) ou le Lapin Taquin pourraient en témoigner. Or, si la censure peut paraître injuste, de leur point de vue, de nombreux internautes font le choix d'utiliser des alternatives à YouTube comme Bitchute.com:
[CENSURE YOUTUBE] Sous ce tweet je republierai toutes mes vidéos une par une sur ma chaîne BitChute. Suivez Le Lapin Taquin, BitChuteur des strêmedroates:https://t.co/bn3uaLqc8N pic.twitter.com/C2205R34hM
— Lapin Taquin (@LeLapinTaquin) 4 января 2018 г.
Ou encore par le youtubeur, Ramzpaul, proche de l'alt-right américaine:
I plan to migrate all my old videos to @bitchute so I don't have to deal with YouTube's whimsical censorship.
— RAMZPAUL (@ramzpaul) 13 мая 2018 г.
C'était donc l'occasion pour Sputnik de poser quelques questions au créateur de Bitchute.com, Ray Vahey, afin de comprendre les raisons de l'intérêt grandissant pour sa plateforme vidéo.
Sputnik France: Combien d'internautes visitent votre site et avez-vous noté une tendance positive au cours de ces derniers mois?
Ray Vahey: «Nous avons connu une croissance constante depuis plus d'un an et nous recevons actuellement plus de trois millions de visiteurs uniques par mois.» [En 2016, à titre de comparaison, YouTube comptabilisait plus de 23 millions de visiteurs uniques par mois en France, nldr]
Sputnik France: comment expliquez-vous que de plus en plus de personnes proches de la droite dure plébiscitent votre plateforme vidéo?
Ray Vahey: «Les gens veulent des alternatives aux réseaux sociaux qui leur permettent de s'exprimer librement sans exploitation de leurs données à travers le "capitalisme de surveillance". Ici, nous croyons que tout le monde devrait avoir le droit de penser librement et de discuter de sujets tels que les informations quotidiennes et que ce droit ne devrait pas appartenir uniquement aux grandes entreprises. Internet et les réseaux sociaux ont joué un rôle important dans la garantie de ce droit humain fondamental et il serait dommage de le perdre.
Sputnik France: Pouvez-vous nous expliquer le fonctionnement de Bitchute?
Ray Vahey: «Beaucoup d'entreprises n'ont pas réussi à concurrencer YouTube parce que les exigences de la vidéo sont très élevées. Cependant, il y a quelque chose qui existe sur Internet depuis plus d'une décennie et qui compte, chaque jour, un nombre comparable de vues à celles de YouTube, c'est BitTorrent [logiciel fonctionnant sur le modèle peer-to-peer qui consiste à échanger des fichiers entre internautes sans passer par un serveur central de stockage, ndlr]. En utilisant BitTorrent, nous avons pu construire un réseau social avec la possibilité d'évoluer à un niveau presque infini. Il inverse le défi de l'évolutivité, car plus le nombre de personnes regardant la vidéo augmente, plus la capacité de fournir la vidéo augmente, sans les coûts massifs des centres de données.
Nous combinons donc les avantages de l'évolutivité de BitTorrent avec la facilité d'utilisation d'un site Web moderne et c'est la première fois que cela a été fait en tant que réseau social vidéo à but commercial.»
Sputnik France: Comment expliquez-vous la censure sur YouTube? Est-ce leur business model, basé sur la publicité, qui pourrait en quelque sorte les inciter à promouvoir du contenu, que les victimes de censure appellent, «politiquement correct»?
Ray Vahey: «C'est en partie dû à l'idéologie politique de la direction de YouTube, mais il y a aussi de nombreux médias mainstream, des entités étatiques et militantes qui ont exercé des pressions sur les annonceurs de YouTube pour qu'ils défendent leurs propres intérêts. Les médias mainstream, en particulier, ont perdu des parts de marché au profit de leurs nouveaux concurrents en ligne et indépendants. Ils cherchent donc désespérément à regagner le terrain perdu.
[L'article 11 permettrait aux éditeurs de presse de demander une rémunération aux agrégateurs de contenus type Google news pour utiliser des extraits d'articles ou des publications d'informations. L'article 13, quant à lui, imposerait aux plateformes en ligne comme Youtube de filtrer les contenus soumis par les internautes, au nom du droit d'auteur, ndlr]
Sputnik France: Sur Internet, il y a très régulièrement des problèmes concernant la propagation de théories conspirationnistes, avez-vous une politique particulière à ce sujet?
Ray Vahey: «Aussi tentant qu'il soit d'interdire les "faits" manipulés, c'est pourtant à la fois malavisé et dangereux. Nous croyons que la meilleure façon de dénoncer les mauvaises idées est de les mettre en lumière, de les expliquer et de les confronter avec de bonnes idées. Les adultes devraient être libres de se faire leur propre opinion. Chez BitChute, nous soutenons la liberté d'expression.»
Peu à peu ejectés de YouTube où ils ont tranquillement prosperés des années durant, les conspirationnistes se réfugient aujourd'hui sur d'autres plateformes vidéos comme @bitchute ou @DTube_Official https://t.co/OFMZx76LpT
— Grégoire Lemarchand (@greglemarchand) 18 апреля 2018 г.
Sputnik France: En parlant de liberté d'expression, quel type de contenu est strictement interdit sur Bitchute.com?
Ray Vahey: «Nous prenons grand soin de nous assurer que nous sommes une entreprise responsable qui se conforme à la loi et nos conditions [d'utilisation, ndlr] le reflètent. Nous exigeons que le téléchargeur possède les droits d'auteur de tout ce qu'il partage et nous prenons très au sérieux toute forme d'incitation à la violence ou à l'abus d'enfants, nous déclarons d'ailleurs que c'est strictement interdit dans nos termes et directives.»