La Russie serait prête à renoncer à ses obligations européennes

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La Russie pourrait renoncer à ses obligations européennes en 2019 car le ministère russe des Finances n'y voit «aucune nécessité particulière».

Comme l'a expliqué le vice-ministre russe des Finances Sergueï Stortchak, l'expérience des pays émergents a montré que la décision de Moscou de faire du marché intérieur du rouble la source principale des fonds empruntés était juste. Pourquoi l'économie russe n'aurait-elle plus besoin d'emprunts extérieurs?

Possible, mais pas nécessaire

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En avril, le ministère des Finances a émis 1,5 milliard de dollars de nouvelles euro-obligations sur 11 ans, et a placé 2,4 milliards de dollars dans le cadre de l'émission Russie-2047. Sur cette somme, 3,2 milliards de dollars ont servi à racheter les anciennes obligations européennes, et 800 millions ont été versés au budget national.

De cette manière, le ministère des Finances a la possibilité d'émettre encore 3 milliards de dollars d'euro-obligations: 800 millions pour le rachat d'anciennes obligations et 2,2 milliards de dollars pour financer le budget. Cependant, Sergueï Stortchak a déjà déclaré que la Russie ne sortirait très probablement pas sur les marchés extérieurs de la dette cette année.

Un endettement bas

Les économistes indiquent qu'en 2019, la Russie n'aurait pas vraiment besoin d'emprunts extérieurs car c'est l'un des pays les moins endettés du monde.

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Durant les neufs premiers mois de l'année, sa dette extérieure a diminué de 51 milliards de dollars (de 9,8%) pour atteindre 467 milliards de dollars.

C'est comparable au montant des réserves de change russes (presque 460 milliards de dollars). Par conséquent, le ministère des Finances pourrait à tout moment rembourser sa dette extérieure. De plus, la Russie accroît constamment ses réserves. La Banque centrale a expliqué récemment que la barre des 500 milliards de dollars n'était plus d'actualité à cause de la règle budgétaire: si cette dernière exigeait des réserves supérieures à 500 milliards de dollars, elles le seraient.

L'excédent budgétaire et les prix élevés du pétrole

L'économie n'a pas non plus besoin d'emprunts car le budget n'est pas déficitaire: le ministère des Finances dispose de fonds suffisants pour honorer ses engagements extérieurs et les dépenses courantes.

«Le budget de janvier-septembre a connu un excédent de 3,5% du PIB, alors que durant la même période en 2017 avait été enregistré un déficit de 0,5% du PIB», rappelle Andreï Kotchetkov, analyste d'Otkrytie broker.

La balance positive du budget est liée en partie aux prix élevés du pétrole et à la réduction des importations. Et on sait que les cours pétroliers continueront certainement d'augmenter à cause de la situation géopolitique complexe.

«Il est peu probable que l'Arabie saoudite parvienne à compenser les fournitures de pétrole iranien qui sera frappé par les sanctions, c'est pourquoi le cours pétrolier restera élevé. Par conséquent, il est possible de ne pas faire appel aux prêts extérieurs», suppose Andreï Vernikov, directeur général adjoint de Zerich Capital Management pour l'analyse des investissements.

Par conséquent, il n'est pas nécessaire d'emprunter à des taux d'intérêt qui ne sont pas jugés bénéfiques pour le ministère des Finances: actuellement, les euro-obligations libellées en devises sont vendues avec un plus grand rendement à cause de la «prime de risque».

Des risques élevés

Les analystes soulignent que même si le fait que l'argent ne provient pas uniquement du marché intérieur, mais aussi du marché extérieur, est indéniablement une bonne chose, les emprunts coûtent cher à cause des risques de sanctions.

«Nous sommes sous la menace de sanctions et dans une situation d'incertitude quant à la forme qu'elles prendront. C'est un risque pour les investisseurs, qui exigent donc un rendement plus grand. Par conséquent, il n'est pas bénéfique pour nous d'emprunter dans le format des euro-obligations», explique Anton Chabanov, expert financier et économique indépendant.

En cas de sanctions contre les nouvelles émissions de dette publique russe, il serait bien plus profitable de développer le marché intérieur des emprunts. De plus, la Réserve fédérale américaine (Fed) a commencé à augmenter son taux directeur, ce qui signifie que le rendement des investissements dans la dette publique américaine augmentera. Il sera donc plus difficile pour les pays émergents d'emprunter sur les marchés extérieurs.

«C'est une bonne stratégie que de compter sur le marché intérieur des emprunts. Si l'on ne réduit pas la part de la dette publique en devise étrangère, tôt ou tard il y a un risque de se retrouver dans la situation aussi difficile que l'Ukraine ou la Turquie», avertit Andreï Vernikov.

Les analystes qualifient le marché intérieur russe d'assez vaste — on peut y compter sur les fonds de pension et l'argent des compagnies publiques. La population est également capable de garantir un volume important de mise sur le marché d'obligations publiques. Selon les estimations de la Banque centrale, l'épargne des particuliers représente actuellement plus de 26.000 milliards de roubles (397 millions de dollars). Les instruments d'actualité pour le marché intérieur sont avant tout les différents types d'obligations: les obligations fédérales en roubles et les obligations fédérales «populaires».

«Il faut simplement faire une bonne promotion de ces instruments pour de larges couches de population: expliquer que c'est bénéfique, stable et que c'est un bon investissement», souligne Anton Chabanov.

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Les experts soulignent qu'en dépit des menaces de Washington vis-à-vis de Moscou, certains fonds de pension américains continuent d'investir dans les obligations souveraines russes. En particulier, la Californie compte toujours parmi les principaux détenteurs étrangers de ces titres. C'est pourquoi il est incorrect de dire que le marché des emprunts extérieurs est fermé: la Russie y agit en fonction de l'utilité économique.

Les experts évoquent même le risque que certains pays, notamment la Russie, quittent simplement le marché de la dette mondiale, ce qui réduirait fortement la possibilité de diversifier les portefeuilles des principaux investisseurs et augmenterait l'instabilité du système financier mondial.

Certains analystes sont convaincus que de telles discussions sont inspirées par Moscou, faisant ainsi comprendre à Washington qu'il serait raisonnable de se calmer et de ne pas déstabiliser le marché mondial des capitaux.

«C'est un message pour toute la communauté internationale: si des mesures plus sévères étaient prises, nous jouerions le tout pour le tout. Renoncer aux emprunts extérieurs est une sorte de tournant inattendu. Mais les bénéfices sont plutôt politiques qu'économiques», conclut Sergueï Korolev, analyste d'Alor broker.

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