Olivier Madiba, le génie camerounais de la création de jeux vidéo

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Gamer dans l’âme, Olivier Madiba s’est forgé une solide réputation dans la création de jeux vidéo. Ce passionné a conçu en 2016 «Aurion: l’Héritage des Kori-Odan», premier jeu vidéo made in Cameroon. Le promoteur de Kiro’o games, premier studio de création de jeux en Afrique centrale, raconte à Sputnik son expérience vidéoludique. Portrait.

Il s’est fait connaître en devenant le premier camerounais à se lancer dans l’industrie de la création de jeux vidéo. En 2004, alors qu’il était encore étudiant à l’université de Yaoundé I, Olivier Madiba a créé Kiro’o Games, une société de production de jeux. Celle-ci lui a permis de lancer en 2016, via une opération de crowdfunding, «Aurion: l’Héritage des Kori-Odan», qui est à ce jour le premier jeu vidéo made in Cameroon. Un exploit pour cet autodidacte, qui a ouvert les portes de son univers à Sputnik.

«Je n’ai pas fait de formation spécifique dans le domaine du jeu vidéo. J’ai appris à faire les jeux vidéo de manière autodidacte en effectuant beaucoup de recherches sur Internet, mais à la base, je suis informaticien de formation. Passionné des jeux vidéo, je voulais créer mon propre jeu et croyez-moi, ce n’était pas facile. Malgré nos réalités locales, j’ai appris sur le tas avec des amis gamers comme moi», raconte, nostalgique, Olivier au micro de Sputnik.

Porté par sa passion, Olivier Madiba, va ficeler son projet au fil des ans. Pour le mener à bien, il va fonder en 2004 Kiro’o games, une société de production de jeux vidéo basée à Yaoundé, la première du genre.

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«Kiro’o games est le 1er studio de développement de jeux vidéo basé au Cameroun. C’est aussi l’un des pionniers de l’industrie du jeu vidéo en Afrique. Le projet a été lancé en 2003, lors de ma première année universitaire. Personne ne croyait en notre projet au départ et aucune banque ni aucun fonds d’investissement ne voulaient financer ledit projet. Nous avons néanmoins réussi à installer le studio avec nos économies et notre propre méthode de levée des fonds», se souvient le gamer.

En 2016, plus de 12 ans après le lancement de sa start-up, Olivier Madiba, en compagnie de son équipe de développeurs, va réussir le pari de mettre sur le marché son premier jeu vidéo.

«De 2014 à 2016, mon équipe et moi avons travaillé avec acharnement pour produire le tout premier jeu vidéo camerounais mondialement reconnu, “Aurion: l’Héritage des Kori -odan”. Pour la petite histoire, c’est un jeu d’action basé sur l’histoire du couple royal de Zama.

Enzo Kori-Odan, prince de Zama, subit le coup d’État de son beau-frère, le jour de son couronnement et de son mariage avec Erine Evou. Le couple royal est alors exilé et décide de parcourir le monde en quête de soutien. Ils devront notamment réunir l’héritage guerrier d’Enzo pour retrouver leur trône. Au-delà de retrouver leur place, le couple royal déchu se rendra surtout compte des dilemmes géopolitiques et existentiels de leur rôle de Roi et Reine. Il leur faudra trouver des réponses pour assurer la destinée de Zama», résume-t-il en quelques mots l’aventure de son jeu exotique, bâti sur une thématique africaine, mais accessible à toutes les cultures.

Seulement, pour en arriver au lancement effectif de ce premier jeu vidéo, ce chef d’entreprise a dû inventer son propre modèle de financement: «Equity crowdfunding rebuntu», une méthode de financement participatif qui consiste à lever des fonds auprès des internautes grâce à des plateformes numériques. Elle permet à des investisseurs d’acheter des parts à partir de 500 USD (environ 275.000 FCFA). Chaque nouvel actionnaire a un droit de vote et peut participer à la gestion de l’entreprise via un intranet dédié. Au total, près de 120 millions de francs CFA (183.000 euros environ) ont été rassemblés en 2016. Et ceci, sans disposer au préalable de garanties immobilières, d’expérience avérée ou même d’une clientèle clairement identifiée.

Selon les statistiques compilées par Olivier Madiba, 74% des souscriptions à cette opération de levée de fonds via Internet sont le fait de ressortissants camerounais. Trois ans après le lancement, son premier titre se joue plutôt bien.

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«Aurion a plutôt de très bons retours. 90% de nos joueurs sur Stream aiment notre jeu et il a obtenu en moyenne à ce jour une note de 14/20, attribuée par les plus grands sites spécialisés dans l’industrie du gaming. Donc notre jeu rivalise avec la plupart des jeux de cette catégorie. On recense plus de 90.000 copies de notre jeu reparties dans le monde entier. Et nos fans viennent des pays tels que les États-Unis, l’Allemagne, l’Angleterre, la Chine et la France», relate avec fierté Olivier.

Grâce à «Aurion, l’héritage des Kori-Odan», Kiro’o Games a décroché le 2e prix de la toute première édition du Challenge startupper de Total Cameroun et a propulsé Olivier Madiba au rang des jeunes entrepreneurs africains dans l’univers des technologies les plus cités ces dernières années. Des victoires qu’il préfère dédier à l’ensemble de ces équipes.

«À Kiro’o, l’équipe est plus considérée comme une famille. On a tellement vécu de bons et difficiles moments ensemble. Ce sont les efforts combinés de toute l’équipe qui a fait du studio ce qu’il est aujourd’hui. C’est parce que nous avons fédéré nos aspirations que nous avons pu créer Aurion, qui aujourd’hui a une renommée mondiale. Chaque membre de l’équipe, que ce soit dessinateur, programmeur ou le staff administratif constitue individuellement la partie d’un tout», tient-il à préciser.

Un succès bien difficile à accomplir dans un contexte où le marché local peine à prendre corps avec de nombreux obstacles à franchir.

«Déjà, il faut savoir que créer des jeux vidéo demande beaucoup de temps, avec des retombées inconstantes et pas toujours celles que l’on attend. Le financement reste un gros problème chez nous. On n’a pas un écosystème qui puisse financer le développement des jeux. On a des problèmes d’infrastructures. À côté de cela, la ressource humaine est une autre équation à résoudre dans notre contexte.

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On ne peut pas encore parler d’industrie de jeux vidéo locale, mais c’est en bonne voie, car on a déjà d’autres studios tels que Nookhema studio et SDK Games Africa qui nous rejoignent sur cette route que nous voulons tracer», laisse-t-il entendre, confiant.

Scrutant l’avenir de ce secteur sur le continent, notre gamer croit savoir que

«L’évidence, c’est que le jeu en Afrique va de plus en plus se développer sur mobile. Toutefois, c’est la capacité à créer des services autour des jeux qui va créer la différence. Il faudra aussi réussir à permettre aux jeux d’atteindre certaines communautés».

Pour accroître son activité, Kiro’o Games vient de réaliser de nouvelles prouesses à travers une autre opération de levée de fonds lancée en avril dernier sur sa plateforme de financement participatif «Equity crowdfunding rebuntu». La start-up a réussi à lever en 12 jours 174.000 dollars US, soit 101,01 millions de FCFA à la date du 16 avril.

Soucieux de participer à la formation d’une relève compétente, Olivier, habitué du sérail entrepreneurial au Cameroun, a également mis en place Kiro’o Rebuntu, une plateforme de mentoring, pour accompagner les jeunes entrepreneurs.

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