Des scientifiques révèlent à quelles épidémies s'attendre dans un avenir proche

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Les bactéries provoquant des formes graves d'entérocolite se sont adaptées à la vie dans les hôpitaux, c'est pourquoi elles engendrent de plus en plus souvent dans leurs murs des épidémies de diarrhée difficiles à soigner. Un article de la revue Nature Genetics explique les perspectives de propagation de ce microbe et son nouveau statut.

Ces dernières années, les médecins sont de plus en plus souvent confrontés au problème de l'apparition de «super-bactéries» — des microbes immunisés contre un ou plusieurs antibiotiques.

Parmi eux figurent aussi bien des agents infectieux que des pathogènes très répandus et dangereux tels que le staphylocoque doré ou le pneumocoque. Le danger, bien réel, est que les antibiotiques perdent leur efficacité et que la médecine revienne à «l'âge de pierre».

«Notre étude démontre que cette bactérie se sépare actuellement en deux types distincts, dont un est adapté à la propagation dans les hôpitaux. Ce sous-type de microbes existe depuis des milliers d'années, mais ce n'est qu'aujourd'hui que sont apparues des particularités de la médecine et du régime alimentaire dont il est capable de profiter», explique Nitin Kumar, chercheur à l'Institut Sanger de Hinxton (Royaume-Uni).

«Incubateurs» des microbes

Les principaux «incubateurs» de ces microbes sont les hôpitaux et les fermes d'élevage où les médicaments sont utilisés pour accélérer la croissance du bétail. À ces endroits se concentrent d'importantes quantités d'infections et de porteurs potentiels, de bactéries et d'antibiotiques qui les forcent à évoluer et empêchent les bactéries «ordinaires» d'évincer les super-microbes moins fertiles.

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En analysant les épidémies de diarrhée qui ont périodiquement lieu dans des hôpitaux, Nitin Kumar et ses collègues ont découvert que ce processus était influencé non seulement par les antibiotiques, mais également par d'autres «produits» de la civilisation: le régime alimentaire «non naturel» et une concentration inhabituellement élevée de personnes.

Les principaux «coupables» de ces problèmes sont généralement les microbes du type Clostridium difficile, les «cousins» proches des bactéries bien plus dangereuses et mortelles que sont le bacille de Nicolaïer (responsable du tétanos), ainsi que les agents du botulisme Clostridium botulinum et de la gangrène gazeuse (Clostridium perfringens).

Propagation rapide

Il existe plusieurs sous-types de ce microbe, dont certains sont capables de provoquer des infections gastro-intestinales graves en secrétant deux types de toxines engendrant des douleurs au ventre et des diarrhées. Dans la plupart des cas, la maladie passe en quelques jours, mais parfois les bactéries pénètrent dans le gros intestin et provoquent de fortes inflammations, ce qui conduit au développement de formes graves d'entérocolite dangereuses pour la vie du patient.

Si le microbe a réussi à «se retrancher» dans l'intestin, il est assez problématique de le détruire parce que le Clostridium difficile est résistant à la plupart des antibiotiques et est enclin à la formation de spores. Ces spores permettent au microbe de survivre en voyageant dans l'estomac des nouvelles victimes, ce qui contribue à sa propagation rapide.

«Recensement» génétique

Nitin Kumar et ses collègues ont procédé au premier «recensement» génétique d'envergure parmi ces microbes pour tenter de comprendre comment sont survenues les récentes épidémies d'entérocolite aux États-Unis et au Royaume-Uni et découvrir si leurs agents étaient différents d'autres sous-types du Clostridium difficile.

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À cet effet, les chercheurs ont recueilli des échantillons de microbes dans différentes régions de la civilisation et de la nature, des hôpitaux aux niches des chiens en passant par les box de chevaux. Ils y ont prélevé le Clostridium et ont entièrement décrypté son génome. Au total, les scientifiques ont réussi à prélever des échantillons de plus de 900 souches de cette bactérie dans une trentaine de pays.

Il s'avère que les souches les plus contagieuses du Clostridium difficile se distinguaient nettement des autres sous-types de ce microbe non seulement de par la structure de leur ADN, mais également de par leur localisation. Pratiquement toutes ces bactéries ont été retrouvées dans des hôpitaux où venaient d'avoir lieu des épidémies de formes graves de diarrhée ou d'entérocolite.

L'étude du génome de ces microbes a révélé qu'ils étaient sur le point de se séparer de l'arbre commun de l'évolution avec d'autres Clostridium et de former un nouveau type spécialisé dans les infections d'hôpitaux.

Comme l'ont indiqué les expériences sur des souris, cette thèse est confirmée par le fait que ces microbes ont acquis de nouvelles versions de gènes responsables de la digestion des sucres et de la formation des spores. Les premiers les aident à se nourrir de glucose et de fructose, qui sont présents dans la «nourriture des hôpitaux» en grande quantité, et les seconds à résister à l'action des agents de décontamination utilisés dans les établissements médicaux.

Bactérie vieille de 76.000 ans

Ces bactéries ne sont pas apparues aujourd'hui, ni même au siècle dernier. D'après les estimations des chercheurs, elles ont fait leur apparition il y a plus de 75.000 ans et évoluent depuis avec l'humanité en s'adaptant aux nouvelles conditions de l'environnement.

C'est intéressant en soi, soulignent les spécialistes, car l'existence d'une telle forme de Clostridium difficile signifie que le développement culturel et technologique de l'humanité a servi de «locomotive» à l'évolution biologique réelle d'une autre entité vivante. Cela signifie que pour lutter contre la diarrhée dans les hôpitaux il ne faut pas désinfecter plus activement les locaux, mais changer le style de vie et l'inventaire des produits d'hygiène.

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