Comment apparaissent les individus les plus dangereux sur la planète

© AP Photo / Frank AugsteinAnders Behring Breivik, makes a salute after arriving in the court room at a courthouse in Oslo
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Parmi les détenus, environ 20% sont des psychopathes. Jusqu'à l'âge de 40 ans ils commettent en moyenne quatre crimes violents. 80% récidivent en l'espace de trois ans après leur libération. Les chercheurs tentent de comprendre en quoi leur cerveau est différent des gens normaux et ce qui transforme un individu en tueur en série.

Le neurologue américain James Fallon étudie depuis de nombreuses années le cerveau de plusieurs psychopathes et meurtriers violents à l'aide de l'IRM. Il note que contrairement aux individus sains, le cortex orbitofrontal est moins actif chez les psychopates – c'est une zone dans la matière grise juste au-dessus des arcades oculaires responsable pour les aptitudes de la vie sociale, la maîtrise de l'éthique, de la morale, la prise de décision, le contrôle de l'impulsivité et de l'agression.

Mais cela ne fait pas encore d'un individu un tueur en série. Le facteur décisif est un trauma psychologique, la violence subie dans l'enfance, estime le spécialiste.

Lui-même en est un exemple. James Fallon reconnaît dans son livre intitulé Le Psychopathe intérieur («The Psychopath Inside: A Neuroscientist’s Personal Journey into the Dark Side of the Brain»), dans sa famille dans un passé lointain il y avait des meurtriers, c'est pourquoi il a examiné ses proches et lui-même. Il s'est avéré que son cerveau ressemblait à celui des tueurs en série, il existe également une prédisposition génétique à l'agressivité. Cependant, son enfance a été heureuse, il n'a pas subi de violence ni pression psychologique.

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Les études plus antérieures ont montré que les psychopathes réagissaient plus faiblement aux photos qui suscitent généralement la compassion. D'où l'hypothèse d'un sous-développement de leurs amygdales – des régions dans la substance blanche du cerveau où est traitée l'information sur les émotions. En 2001, cette supposition a été confirmée à l'aide de l'IRM fonctionnelle Kent Kiehl, professeur de l'université du Nouveau-Mexique (USA).

Ce dernier a examiné avec ses collègues les images de l'IRM fonctionnelle de 903 psychopathes emprisonnés sur la durée. Dans l'article paru en mars dernier, les spécialistes notent non seulement une activité réduite des régions du cerveau responsables des émotions, mais également les faibles liens neuronaux entre les zones qui contrôlent les émotions comme la compassion, la culpabilité, la peur et l'anxiété. Les traits caractéristiques des psychopathes sont l'égoïsme, l'insensibilité et la cruauté. Le cerveau des détenus ayant de tels traits manifestes se distinguait plus souvent par des anomalies structurelles.

La marque neuronale du tueur en série

Les psychopathes représentent moins de 1% de la population humaine. Néanmoins, la part des violeurs-meurtriers cruels parmi eux est bien plus élevée. De plus, en règle générale, ils commettent leur crime plus d'une fois.

On compte le plus grand nombre de psychopathes parmi les tueurs en série sexuels. Ils sont parfaitement conscients de leurs actes et perçoivent clairement la réalité. Certains agissent de manière impulsive quand une occasion se présente, d'autres planifient leur crime, espionnent leur victime et effacent les traces. En général ils se font passer pour un membre normal de la société, ont parfois une famille et des enfants, comme Andreï Tchikatilo, l'un des plus violents tueurs en série et parmi les plus étudiés dans le monde.

Les tueurs en série possèdent souvent de bonnes capacités intellectuelles, mais sont complètement privés de lien émotionnel avec les gens. Ils souffrent souvent de trouble narcissique de la personnalité, manipulent à la perfection les autres et se distinguent par des penchants sadiques. Ils tuent par plaisir, ils n'éprouvent pas de culpabilité ou de repentance.

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On estime que le cerveau des tueurs en série est soumis à des changements organiques. Par exemple, des chercheurs de l'université de Californie ont comparé les tueurs aux épileptiques: chez les seconds la hausse de l'activité neuronale du cerveau entraîne une crise, alors que chez les psychopathes elle pousse au meurtre.

En construisant un modèle neuronal mathématique du cerveau du tueurs en série russe Andreï Tchikatilo, les chercheurs ont essayé d'expliquer «l'escalier du diable» - un graphique du nombre de meurtres à l'échelle du temps qui montre que l'activité d'un tueur s'intensifie et l'intervalle entre les crimes se réduit.

Philippe Chassy de l'université de Liverpool Hope (Royaume-Uni) suppose que dans le cerveau d'un tueur en série est codé un certain schéma d'actions en réponse aux fantaisies sexuelles provoquant de fortes émotions – le tueur l'attend comme une récompense.

Il est connu que les criminels sont capables de tromper le polygraphe en réprimant les signes extérieurs d'excitation: la fréquence du pouls, la conduction cutanée. Mais ils ne peuvent certainement pas contrôler l'activité du cerveau, indique Philippe Chassy. C'est pourquoi un scan peut détecter la «signature neuronale» d'un tueur en série – les zones du cerveau excitées avec une mémoire autobiographique régulant le plaisir sexuel, l'agression prédatrice et le contrôle émotionnel.

Le facteur de Breivik

Tous les psychopathes ou les personnes qui ont subi la violence durant l'enfance ne deviennent pas des tueurs en série, loin de là. Du coup, il existe plusieurs autres facteurs qui entraînent des conséquences tragiques pour la personnalité et la société. Des chercheurs britanniques et suédois pensent que cela pourrait s'expliquer par des traumas de la tête, différents troubles neurologiques et psychiques, par exemple les troubles du spectre de l'autisme.

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Le lien entre l'autisme et les penchants criminels est activement étudié après le massacre commis par Anders Breivik en 2011, un citoyen tout à fait normal en apparence. Certains psychologues soupçonnent chez lui le syndrome d'Asperger – trouble de la personnalité où, contrairement à l'autisme, l'intellect reste intact.

Les spécialistes ont analysé les histoires de 239 tueurs violents observés après  1985. Dont 48 – de série, et 58 – de masse. Seulement 10% présentaient des troubles du spectre de l'autisme (TSA), le même nombre présentait des traumas de la tête. Selon les auteurs de l'étude, ces facteurs pourraient jouer un rôle pour devenir un criminel, mais seulement en liaison avec des facteurs sociaux et biologiques.

L'étude des tueurs en série se trouve à un stade précoce, mais les facteurs s'accumulent rapidement. Il est évident que ce phénomène ne peut pas être expliqué par un seul facteur: les troubles psychologiques du développement, les traumatismes du cerveau, la violence dans l'enfance ou la génétique, comme la présence du gène du guerrier (MAOA), qui accroît le niveau d'agressivité chez les hommes. On ignore à ce jour où est la cause et la conséquence – si c'est le trouble du développement du cerveau qui conduit à un comportement asocial ou si, au contraire, les facteurs sociaux et familiaux affectent négativement la formation des régions du cerveau. Les futures études permettront d'identifier les personnes prédisposées à devenir des tueurs en série afin de le prévenir à temps.

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