Dans son discours d’investiture, le Président tunisien rejette «le deal du siècle»

© AFP 2023 ZOUBEIR SOUISSI / Kaïs Saïed lors de son discours d'investiture de 23 octobre 2019Kaïs Saïed lors de son discours d'investiture de 23 octobre 2019
Kaïs Saïed lors de son discours d'investiture de 23 octobre 2019 - Sputnik Afrique
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Il s’agit de la première fois qu’un officiel tunisien fait explicitement allusion à ce projet de paix au Moyen-Orient, concocté par l’administration Trump et désigné dans les rapports médiatiques sous le nom «deal du siècle».

La question palestinienne ne saurait être résolue par le recours à «la force» ou aux «deals», a récemment estimé le nouveau Président tunisien Kais Saïed, lors de son premier discours officiel.

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«La Tunisie va continuer à défendre toutes les causes justes, au premier rang desquelles la cause de notre peuple en Palestine», a assené, mercredi 23 octobre, le Président tunisien à la Chambre des députés, sous une pluie d’applaudissements.

Élu dix jours plus tôt Président de la République, avec plus de 72% des voix, Kaïs Saïed prononçait son discours d’investiture devant les députés sortants, le gouvernement sortant, des personnalités nationales et des délégations étrangères.

«La Palestine restera dans la conscience de tous les hommes et femmes libres de Tunisie, elle demeurera gravée dans leurs cœurs, et ce qui est gravé dans les cœurs ne saurait être estompé par la force… ou les deals», a insisté le Président tunisien, faisant allusion au «deal du siècle».

Il s’agit de la première fois que ce projet de paix au Moyen-Orien est évoqué dans un discours officiel en Tunisie, et ce de façon aussi explicite. Ce «deal», concocté plusieurs mois plus tôt par l’administration de Donald Trump, est depuis désigné dans les rapports médiatiques sous le nom de «deal du siècle».

«Jusque-là, on n’avait pas eu à le commenter officiellement, parce qu’il n’avait pas encore été révélé officiellement. Toutefois, et dans le cadre de rencontres qu’on a pu avoir avec des responsables américains, nous avons exprimé le fond de notre pensée, qui est le refus de cette solution», a déclaré à Sputnik une source diplomatique tunisienne.

Tunis a maintenu, dès lors, le cap sur sa position «inébranlable», celle appelant au respect des décisions du Conseil de sécurité des Nations unies, des «droits légitimes» du peuple palestinien – dont l’établissement d’un État palestinien sur les frontières de 1967 avec pour capitale Jérusalem.

«Et si nous n’étions pas intéressés par la conférence économique de Manama, c’est parce que nous avions compris que cela ne rimait qu’à nous mettre, in fine, devant le fait accompli», a poursuivi la source diplomatique.

Organisée en juin dernier dans la capitale du Bahreïn, avec le soutien des États-Unis, la conférence «La paix pour la prospérité» dévoilait le volet économique du plan en promettant que son volet politique, lui, serait présenté bientôt.

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Plus de 50 milliards de dollars seront ainsi injectés sur dix ans dans les territoires palestiniens pour relancer la région et bâtir des infrastructures, a annoncé Jared Kushner, conseiller et gendre de Donald Trump, à Bahreïn.

Le volet politique – dont il n’est pas attendu à ce qu’il revienne sur l’occupation des territoires palestiniens – est loin de faire l’unanimité au sein des pays arabes, et il serait encore plus impopulaire au sein des populations.

En Tunisie où, contrairement à d’autres pays arabes, «les dirigeants palestiniens qui y ont établi leur quartier général n’ont pas été chassés, le soutien à cette cause palestinienne est fort. Dès lors, l’intransigeance du candidat, puis du Président Kaïs Saïed sur la question a été d’autant plus appréciée», estime l’universitaire et ancien reporter Youssef Seddik, dans une déclaration à Sputnik.

S’exprimant le 11 octobre, pendant le débat du second tour de la présidentielle, sur la question palestinienne, le candidat Saïed avait en effet rejeté le terme de «normalisation» avec Israël, l’assimilant plutôt à de la «haute trahison».

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La véhémence de son intervention avait marqué les esprits et contribué à creuser l’écart avec le second finaliste, l’homme d’affaires et des médias Nabil Karoui, empêtré dans une sombre affaire de lobbying impliquant l’israélo-canadien Ari Ben-Menashe. La ferveur palestinienne du nouveau Président tunisien lui a valu de nombreuses manifestations de soutien dans les pays arabes, y compris en Palestine.

Certaines voix, en Tunisie, l’avaient toutefois appelé à modérer cet élan, notamment après l’annonce de sa victoire, le 13 octobre, quand il avait déclaré qu’il aurait «souhaité que le drapeau palestinien soit ici, à côté du drapeau tunisien».

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