Aveux d'Agnès Buzyn: elle «devait démissionner et attirer l’attention de l’opinion publique», selon Asselineau

© AP Photo / Rafael YaghobzadehAgnès Buzyn et Stanislas Guerini, le 16 février 2020
Agnès Buzyn et Stanislas Guerini, le 16 février 2020 - Sputnik Afrique
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Les confidences d’Agnès Buzyn font l’effet d’une bombe, alors que le pays subit l’épidémie de Covid-19. Au-delà de qualifier de «mascarade» le premier tour des Municipales, celle qui était alors ministre de la Santé révèle que l’exécutif était prévenu du danger qui menaçait le pays. François Asselineau, président de l’UPR, réagit à notre micro.
«Le 30 janvier, j’ai averti Édouard Philipe que les élections ne pourraient sans doute pas se tenir. Je rongeais mon frein», confie au Monde Agnès Buzyn, ex-ministre de la Santé.

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Maintien des élections municipales: était-ce le bon calcul?
Un «pavé dans la mare»: la presse ne mâche pas ses mots après les confessions qu’Agnès Buzyn a livrées au Monde, qui dépeignent une candidate à la mairie de Paris absorbée, paralysée, par l’ombre du coronavirus SARS-CoV-2 sur les élections municipales. Un scrutin dont le premier tour a été maintenu malgré la pandémie de Covid-19, que la candidate LREM –arrivée troisième– qualifie maintenant de «mascarade». Du côté des responsables politiques, on s’interroge sur ces aveux soudains. «Pourquoi raconte-t-elle cette histoire maintenant, quand il est trop tard?» taclait ainsi Jean-Luc Mélenchon sur les réseaux sociaux, dans la foulée de la publication de l’interview de l’ancienne ministre de la Santé.

Du côté du gouvernement, on affirme avoir «systématiquement pris au sérieux ses alertes», comme le déclare notamment Édouard Philippe, qui s’emporte au micro de France 2. S’il confirme les dire de son ancienne ministre concernant une remise en question du scrutin, il se défend en expliquant qu’«au moment où elle m’a dit ça, beaucoup de médecins n’étaient pas d’accord avec elle.»

«Il y a eu un moment donné où collectivement, les médias –peut-être même les partis politiques, les représentants des différents partis politiques– ne croyaient pas forcément à la catastrophe qui arrivait», a appuyé Sibeth Ndiaye, porte-parole du gouvernement.

Du côté du corps médical, où l’on confirme que l’on était bien au courant du danger qui guettait l’Hexagone, on ne semble plus assumer. «Je me mouille à titre personnel, je n’avais pas perçu fin janvier l’importance de ce que cela pouvait donner», a ainsi déclaré sur RTL Jean-François Delfraissy, président du Conseil scientifique et du Comité national d’éthique qui entourent le Président de la République depuis le début de la crise sanitaire. «Oui, dès la fin janvier, nous avions une série de signaux d’alerte autour des modèles mathématiques qui prédisaient qu’il [le coronavirus, ndlr] pouvait toucher l’Europe», développe-t-il.

«Des déclarations absolument ahurissantes», réagit au micro de Sputnik François Asselineau, président de l’Union Populaire Républicaine (UPR).

Madame Buzyn «veut soulager sa conscience»

Le parti du Frexit qui, dans un communiqué le 17 mars, a réclamé à Agnès Buzyn– après avoir «jeté une pareille bombe contre Macron et le gouvernement»– qu’elle ait «décence minimale» de présenter sa démission des élections municipales à Paris. «On voit que madame Buzyn est absolument embarrassée, on sent qu’elle veut soulager sa conscience, que c’est quelqu’un qui sait qu’elle a mal fait», estime l’ancien candidat à la Présidentielle.

«Si elle était à ce point convaincue que c’était une situation très grave, qu’il fallait agir comme les Chinois et qu’elle voyait que ni Emmanuel Macron ni le gouvernement ne bougeaient, il fallait faire comme d’autres ministres avant elle– tel Jean-Pierre Chevènement au moment de la guerre en Irak sous François Mitterrand–; elle devait démissionner et attirer l’attention de l’opinion publique française sur le fait que la France ne prenait pas les mesures extrêmement urgentes qu’il fallait prendre», assène François Asselineau au micro de Sputnik.

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Coronavirus: les Français, victimes de la communication gouvernementale?
Le président de l’UPR tient à rappeler –quoi qu’on en dise– la réactivité dont ont fait preuve les autorités chinoises pour endiguer la propagation d’un virus qui était encore inconnu. «Dès le début, ils ont pris des mesures urgentissimes […] L’expérience montre que dans ce genre d’épidémie, c’est la rapidité de réaction qui compte», insiste le Président de l’UPR, évoquant également les cas de ces voisins de la Chine, comme Taïwan, dont les autorités ont «extrêmement bien réagi». Des pays du Sud-est asiatique qui à ce jour comptent bien peu de décès en comparaison de la Chine ou dorénavant, des pays européens. Un résultat obtenu au prix de mesures «contraires à celles que recommandait l’OMS», souligne François Asselineau, telles que la distribution de masques de protection respiratoire et le placement en quarantaine des personnes entrant sur leur territoire.

Les préconisations de l’OMS, «c’est le contraire même du bon sens»

Des fermetures de frontières et de port de masques par les personnes non contaminé que juge inutiles, jusqu’à à présent, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), attachée à la non-interruption des communications mondiales. «C’est le contraire même du bon sens» s’emporte François Asselineau, qui regrette que les expériences chinoise, puis italienne, face au Covid-19 n’aient pas été prises en considération par l’exécutif français, bien au contraire. Dans ce contexte, l’attitude d’Agnès Buzyn, et notamment sa candidature surprise à la Mairie de Paris, ne trouve pas grâce aux yeux de François Asselineau:

«L’impression que ça me donne, c’est qu’elle a un peu sauté sur l’occasion pour partir à la mairie de Paris et laisser le sale boulot au suivant. Puisqu’elle a prévenu, selon ses propres dires, que le tsunami allait arriver», assène-t-il.

«Je rappelle que juste avant de partir pour être candidate à la mairie de Paris, elle a donné le feu vert pour qu’on livre à la Chine des millions de masques, comme si la France n’allait pas en avoir besoin.» Ironie du sort, ce sont maintenant de deux organisations caritatives chinoises qui viennent de faire parvenir un million de masques à la France.

François Asselineau revient également sur les déclarations données «doctement devant la presse» par celle qui était encore ministre, quand elle expliquait que le virus resterait dans la région de Wuhan. «Elle a fait preuve, comme le gouvernement d’une extraordinaire légèreté».

Coronavirus, plus grave que l’affaire du sang contaminé

Pour l’ancien candidat à la Présidentielle, ces aveux ne peuvent rester lettre morte. «Les révélations de Madame Buzyn donnent à penser qu’il y a eu une violation des articles 121 alinéa 3 et 221 alinéa 6 du Code pénal, c’est-à-dire homicide involontaire et mise en danger de la vie d’autrui», assène-t-il, comparant ainsi les recours possibles des familles des victimes à ceux de l’affaire du sang contaminé, qui avait notamment éclaboussé Laurent Fabius, Premier ministre de François Mitterrand dans les années 1980.

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«Cela risque d’être nettement plus dramatique encore que l’affaire du sang contaminé» affirme l’homme politique, évoquant le nombre des victimes appelé à augmenter au fur et à mesure que l’épidémie avancera. «Cela pose le problème des investissements qui ont été faits ou qui n’ont pas été faits» en prévision de l’arrivée du virus. Asselineau évoque le fait de se préparer à l’absorption de la vague de patients grave dans les hôpitaux, le nombre de lits en réanimation équipé d’appareils d’assistance respiratoire, des mesures vitales pour diminuer l’impact de l’épidémie sur la population.

«Le Président de la République n’a absolument pas pris la mesure du problème. Il y a quelque chose que je trouve particulièrement scandaleux, abject et lâche, c’est la façon dont Macron et son entourage essaient de faire de l’inversion accusatoire en reprochant au peuple français d’être indiscipliné, de ne pas mettre en œuvre les mesures, alors que c’est Macron lui-même qui a envoyé pendant des semaines et des semaines des messages aux Français comme quoi il ne fallait surtout pas s’inquiéter.»

Le président de l’UPR évoque la sortie au théâtre Antoine le 6 mars d’Emmanuel Macron en compagnie de sa femme, ainsi que l’inauguration du Café Joyeux, sur les Champs-Élysées, le 9 mars par le couple présidentiel en présence de la presse.

«Ces gens ont une vision altérée de la réalité»

«Un endroit où il y a de la promiscuité», souligne Asselineau, qui fustige le ton léger, plaisantin, du Président sur le Coronavirus, six jours avant la fermeture de toutes les brasseries. Il rappelle aussi l’étonnement dont a fait preuve Brigitte Macron de voir autant de Parisiens sur les quais de Seine, alors qu’elle-même s’y promenait.

«Ces gens ont une vision altérée de la réalité, ils ne se rendent pas compte des messages qu’ils envoient», assène le président de l’UPR, qui s’interroge aussi sur la responsabilité des médias français, qui soulignent peu ce genre d’incohérences dans la communication venant du sommet de l’État.

Le président de l’UPR rappelle l’attitude condescendante de la porte-parole du gouvernement à l’égard des mesures prises par les Italiens. Il revient également sur le «mépris général», la «suffisance» et «morgue d’ancien régime» des élites françaises à l’encontre des Chinois, avec notamment un «soubassement raciste implicite» à leur encontre, alors qu’aucun plan n’était visiblement prévu pour parer à l’éventualité d’une épidémie frappant la France. Peu étonnant, pour François Asselineau, que les Français cèdent à des élans d’individualisme dans cette crise lorsqu’ils perçoivent qu’elle est gérée par un tel exécutif, rappelant que, comme le dit un proverbe chinois, «le poisson pourrit par la tête».

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