Du vin de banane plantain aux chips de manioc, le travail des femmes rurales ivoiriennes valorisé

© Sputnik . Roland KlohiDes produits agricoles transformés par des femmes
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En Côte d’Ivoire, les femmes rurales jouent un rôle de premier plan dans l’économie mais elles sont particulièrement touchées par la pauvreté. Leurs réalisations, riches et parfois étonnantes, demeurent souvent méconnues, une situation qu’a entrepris de corriger une entreprise de commerce équitable.

Promouvoir le terroir ivoirien et le savoir-faire des femmes au travers du travail, c’est la mission que s’est assignée depuis janvier 2019 Mando Foods&Co, une entreprise créée par Alain Branger.

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Après une expérience à l’international de quelques années dans le trading des matières premières et dans l’agroalimentaire, ce jeune entrepreneur de 29 ans, dont le père est Français et la mère Libanaise, de retour en Côte d’Ivoire où il est né et a grandi, a entrepris de sillonner le pays.

«À mon retour au bercail en 2017, j’ai eu l’opportunité, pour la première fois, de prendre ma voiture et parcourir l’intérieur de la Côte d’Ivoire», a raconté au micro de Sputnik Alain Branger.

De cette immersion dans les profondeurs du pays, il est ressorti subjugué par les rencontres qu’il a faites et encore plus par les richesses découvertes.

«J'ai rencontré quantité de personnes, essentiellement des femmes, qui transforment les produits de la terre de façon absolument incroyable. Et quand je voyais les prix dérisoires auxquels elles vendaient leur production, j’étais scandalisé. J’ai eu à cœur de les rassembler, échanger avec elles et leur proposer de faire en sorte que le conditionnement et le marketing autour des produits soient le plus attractifs possibles au niveau local, mais aussi international», a-t-il expliqué.

Alain Branger a ainsi décidé de mettre sur pied un projet solidaire et équitable en créant Mando Foods&Co. Le nom a été choisi par les femmes elles-mêmes. En Ebrié, une ethnie ivoirienne, Mando signifie «famille».

Transformer des produits agricoles

Les femmes avec qui collaborent avec l’entrepreneur sont pour la plupart spécialisées dans la transformation des produits agricoles. À titre d’exemple, pour ce qui est de la banane plantain, elles parviennent à en tirer cinq produits finis: de la farine qui sert notamment à préparer des biscuits sans gluten, des chips, du beurre cosmétique et enfin du vin.

Il faut savoir que la banane plantain est largement consommée en Côte d’Ivoire, sous diverses formes. Les mets qui en sont dérivés –alloco, foutou ou encore foufou– sont également prisés en Afrique et s'exportent bien dans certains pays européens comme la France ou l’Italie.

Il n’est donc pas surprenant de voir le vin de banane plantain –élaboré par les sœurs d’un monastère de Yamoussoukro, la capitale– avoir un écho favorable auprès des Ivoiriens. Et ce breuvage atypique est loin d’être le seul de ces religieuses qui font aussi du vin avec d’autres fruits exotiques comme l’ananas, l’avocat ou le tangelo.

Des prix qui tiennent compte du labeur des femmes

Dans sa boutique à Abidjan, Mando Foods&Co, s’évertue à promouvoir et vendre les articles de ses partenaires, tous issus de produits naturels et fabriqués de manière artisanale.

«On n’a pas encore de label commerce équitable, mais on travaille en tant que tel. Ce que nous souhaitons par-dessus tout, c’est que les femmes avec qui nous collaborons soient bien rémunérées. Si nos prix sont en général un peu plus élevés que ceux de produits du même type qu’on pourrait éventuellement retrouver dans de grandes surfaces, c’est en raison de leur qualité, leur conception artisanale et du packaging particulier», a précisé Alain Branger.

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Depuis un peu plus d’un an qu’existe l’entreprise, épices, farines, biscuits, sucreries, miel, jus, vins, liqueurs et autres produits de ce commerce équitable ne cessent d’attirer une clientèle toujours plus nombreuse et variée (Ivoiriens, expatriés).

«Les femmes, de par leur force de travail, sont le premier vecteur de développement en Côte d’Ivoire. Cela est particulièrement vrai dans les zones rurales. Elles sont sérieuses et appliquées dans leurs tâches, en plus de porter sur le dos la responsabilité de la famille. Et elles sont bien souvent les garantes d’un savoir-faire et d’une technicité ancestrales en matière de production et de transformation agricole», déclare à Sputnik Alain Branger.

La femme rurale, actrice incontournable du développement

Dans les pays en voie de développement comme la Côte d’Ivoire, la contribution des femmes rurales à l’économie est indéniable. Elles constituent 67% de la main-d'œuvre agricole –l’agriculture représentant près de 20% du PIB ivoirien– et assurent la sécurité alimentaire (60% à 80% de la production alimentaire) et l’approvisionnement des grands centres urbains en production vivrière. 

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Et pourtant, environ 60% de ces femmes vivent en dessous du seuil de pauvreté, selon les autorités qui multiplient ces dernières années les actions en vue de leur autonomisation.

La FAO estime que si les agricultrices bénéficiaient du «même accès aux ressources agricoles que les hommes, la production des fermes tenues par des femmes dans les pays en voie de développement pourrait augmenter de 20% à 30%, ce qui pourrait réduire la pauvreté et le nombre de personnes souffrant de la faim dans le monde de 100 à 150 millions de personnes».

«La terre, certes, demande un peu de formation et de la technicité, mais elle ne ment jamais. Aujourd'hui, avec la nourriture industrielle qui est très mauvaise pour la santé, l’élevage intensif avec de la viande de qualité médiocre, le monde aspire à un retour à des choses plus saines. Et cela est possible en Côte d’Ivoire avec un travail rationnel de la terre et des femmes en pole position», a déclaré Alain Branger.

Le travail de la terre, Alain Branger en est convaincu, peut permettre aux femmes rurales de «réaliser leurs souhaits, gagner de l’argent mais aussi faire profiter leur famille».

«Ces femmes travaillent beaucoup, il faut par conséquent qu’elles gagnent beaucoup», a-t-il conclu.
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