Antiterrorisme: au Mali, la France «veut, mais elle ne peut pas»

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La France poursuit ses missions contre-terroristes en Afrique et embarque d’autres soldats européens en pleine période de crise du coronavirus en Europe. Leslie Varenne, directrice de l’Institut de Veille et d’Étude des Relations Internationales et Stratégiques (IVERIS) et spécialiste de l’Afrique, analyse les enjeux pour le Désordre mondial.

La France est-elle débordée au Mali? À l’heure où les ressources du gouvernement français sont mobilisées pour mener «la guerre» contre le coronavirus, comme l’a qualifié Emmanuel Macron, les troupes françaises sont-elles encore en mesure de continuer à combattre dans des opérations contre-terroristes africaines, notamment au Mali?

Récemment, la Suède a annoncé qu’elle enverrait 150 soldats de ses forces spéciales pour soutenir la mission antiterroriste française au Mali, dont l’Opération Takuba. L’objectif de cette mission? Combattre Al-Qaïda* et Daech* dans la région du G-5 Sahel, donc au Mali, au Niger, au Burkina Faso, au Tchad et en Mauritanie.

Leslie Varenne, directrice de l’Institut de Veille et d’Étude des Relations Internationales et Stratégiques (IVERIS) et spécialiste de l’Afrique, résume:

«Pour l’armée française, c’est plutôt une opération symbolique, essayer de regrouper des forces européennes d’abord, dans l’esprit d’Emmanuel Macron de la Défense européenne, et ensuite pour la France de sortir de cette situation de solitude sahélienne, où elle est face à ses anciennes colonies.»

Leslie Varenne tire le bilan actuel des efforts contre-terroristes au Sahel:

«Les Maliens, qui sont soumis à de multiples crises, ne voient pas le résultat de cette mission. C’est pour ça que quand on dit qu’il y a un ressentiment anti-Français, c’est aussi et surtout qu’eux ne voient pas d’amélioration sécuritaire dans leur quotidien, donc ils ne comprennent pas. Ils pensent encore que la France est toute-puissante, que c’est un grand pays, et que si elle voulait, elle pourrait. Mais en fait, elle veut, mais elle ne peut pas.»

La directrice de l’Institut de Veille et d’Étude des Relations Internationales et Stratégiques résume la situation: 

«Ils mènent la lutte et ils neutralisent des terroristes, mais pour autant, ça n’empêche pas les terroristes de se propager dans la région.»

Comment le coronavirus risque-t-il d’impacter la mission française au Sahel? D’après Leslie Varenne:

«La France est un grand pays qui gère très mal, à mon avis, cette crise sanitaire. Mais ce n’est pas la crise sanitaire qui va faire que l’armée française va arrêter son opération dans le Sahel.»

Et l’impact potentiel du coronavirus en Afrique? L’experte explique:

«Ce qui est absolument certain, c’est que si le coronavirus arrive en Afrique sous forme d’une pandémie telle que celle que l’Europe est en train de vivre, ça serait absolument catastrophique. Un ami me disait que les Africains doivent plus compter sur leur immunité que sur leur système de santé; je pense qu’il a raison, puisqu’il n’y a aucune structure sanitaire capable de faire face.»

*Organisation terroriste interdite en Russie

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