Covid-19: Français bloqués au Maroc, «certains sont dans une situation catastrophique»

© REUTERS / YOUSSEF BOUDLALDes touristes en attente de rapatriement à l'aéroport de Marrakech, le 15 mars 2020.
Des touristes en attente de rapatriement à l'aéroport de Marrakech, le 15 mars 2020. - Sputnik Afrique
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N’ayant pu embarquer à temps à bord des derniers avions spéciaux affrétés, de nombreux touristes français se trouvent bloqués au Maroc où l’urgence sanitaire due à la pandémie de coronavirus a obligé à la suspension des liaisons aériennes jusqu’au 20 avril. En attendant une solution, ils s’entraident et s’arment de «patience et de sang-froid».

«Je suis ici tout seul. Et en même temps, il n’y a pas que moi dans cette situation.» C’est par ces mots que Jonas, 28 ans, raconte son calvaire. 

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Pour ce Français originaire du sud de la France, tout a basculé le 21 mars. Arrivé à Marrakech pour quelques jours de vacances, il n’arrive plus à rentrer chez lui depuis la proclamation de l’état d’urgence sanitaire et la suspension des liaisons aériennes. Pour lui, la ville ocre est devenue une prison déserte et à ciel ouvert…

«Depuis le 21 mars, des vols censés être annulés sont maintenus, d’autres qui n’étaient pas prévus partent finalement avec la moitié des passagers», raconte Jonas à Sputnik.

Comme lui, de nombreux autres touristes français s’étaient rendus au Maroc en voyage avant la suspension des liaisons aériennes due à la pandémie de coronavirus qui a affecté 534 personnes dans le pays. Certes, depuis, «25.000 voyageurs ont pu rentrer par le Maroc vers la France» via des vols spéciaux affrétés. Mais pris au dépourvu, certains n’ont pu réussir à réserver une place dans les derniers avions autorisés par le Royaume.

Même si certaines sources font état d’un millier de touristes français encore bloqués au Maroc, ce chiffre demeure invérifiable en l’absence de données officielles.

«Depuis le 21 mars, j’ai beau essayer, c’est totalement fermé», explique Jonas. Il partage ses faux espoirs: «Par exemple, sur le site d’Air France, j’avais vu que le 2 avril il y avait un vol vers la France. J’ai appelé immédiatement le consulat mais ils m’ont dit qu’il n’y avait rien à cette date», se désole-t-il.

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Même chose pour Cécile Miramont, qui dirige avec son mari une série de guides de voyage. Celui-ci a été victime d’un accident au Maroc et a décidé de revenir en France début mars. «J’étais venue en catastrophe pour l’aider à rentrer. Maintenant je suis coincée ici avec lui», déplore cette Française au micro de Sputnik.

Concernant ses contacts avec les autorités françaises, Cécile Miramont rappelle avoir pu pourtant contacter le consulat au début de la crise. «On avait promis de nous aider, sachant que mon mari avait besoin de soins. Mais quand ils ont su qu’il était Suisse, ils m’ont dit avoir d’autres priorités», précise-t-elle.

Depuis le samedi 21 mars à minuit, il n’est «pas possible de quitter le Maroc en raison de l’état d’urgence sanitaire décrété jusqu’au 20 avril», peut-on lire sur le site de l’ambassade française à Rabat.

Sur la plateforme de questions-réponses disponible sur le site de l’ambassade, la priorité semble être donnée aux Français non résidents. Ceux qui résident régulièrement au Maroc sont encouragés, eux, à «éviter autant que possible les déplacements internationaux et notamment de chercher à revenir en France».

Reste la question de la subsistance de ces touristes au Maroc. À l’attention de ceux qui n’ont plus d’hôtel, l’ambassade de France a recommandé un portail d’entraide en ligne «SOS Toit». Parrainé par le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, ce service est disponible dans 197 pays, dont le Maroc. Pour toutes les autres questions liées aux moyens de subsistance, «le consulat pourra vous indiquer le moyen le plus efficace pour que des proches puissent vous faire parvenir rapidement la somme d’argent dont vous avez besoin, notamment par transfert d’argent international».

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Certains préfèrent les plateformes numériques. C’est ainsi que dans un groupe Facebook, près de 900 personnes se sont réunies pour s’entraider. Certaines n’hésitent pas à s’enquérir de la façon de faire parvenir des médicaments à un parent âgé et coincé au Maroc.

Nos interlocuteurs, interrogés par Sputnik, s’estiment heureux d’avoir pu trouver où loger. «J’ai loué une chambre d’hôtel pour un mois et là, je ne sors que pour acheter de quoi manger en respectant le couvre-feu», fait savoir Jonas.

Cécile explique «avoir trouvé une location sur Marrakech pour se reposer, propre et confortable. Beaucoup de gens ont été hébergés par des Marocains mais d’autres sont dans des situations catastrophiques». C’est notamment le cas de ceux qui «ont acheté trois ou quatre billets d’avion finalement annulés et qui n’ont pas été remboursés», regrette la touriste.

Le 28 mars, les autorités françaises ont annoncé que les camping-caristes, présents sur le parking de Tanger-Med (nord du pays), allaient finalement pouvoir prendre un bateau à destination de Sète ce dimanche. Une traversée qui devrait permettre le retour en France de près de 200 camping-cars, conduits pour la plupart par des personnes âgées.

De son côté, la ministre du Tourisme, de l'Artisanat, du Transport aérien et de l'Économie sociale Nadia Fettah Alaoui, encartée au parti du RNI, affirme dans un communiqué du 16 mars dernier avoir «mobilisé toutes les autorités compétentes dans plusieurs aéroports, ainsi que sensibilisé les tours opérateurs et leurs compagnies aériennes».

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Elle n’a d’ailleurs pas hésité à lancer une pique à l’adresse du Président français Emmanuel Macron, faisant référence à un tweet posté par le chef d’État rapidement considéré comme «condescendant» par les internautes. «Le Maroc n’agit nullement par injonction ou sur un ordre inapproprié d’autorités étrangères, notre pays traite les touristes de toutes les nationalités sur un même pied d’égalité», affirmait la responsable marocaine, pourtant fraîchement nommée à ce poste et peu habituée aux polémiques.

Autant dire qu’il ne reste aux touristes français au Maroc qu’à s’armer de «patience et sang-froid» face à la crise, ainsi que les y invitait, le 20 mars dernier, le chef de la diplomatie française Jean-Yves Le Drian, dans un entretien à France Info sur la situation des 130.000 touristes français encore bloqués à l’étranger. Entre-temps, l’ambassadrice de France à Rabat, Hélène Le Gal, a invité les Français de passage au Maroc à se manifester. Des vols à l’horizon?

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