Masques d’État contre masques municipaux, à Saint-Mandé, on a choisi – vidéo

© Sputnik . Oxana BobrovitchAu marché dominical de Saint-Mandé en période de confinement
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Les masques, «inutiles» pour le grand public au début de la pandémie, sont devenus un sujet-test pour vérifier le niveau de détermination du gouvernement et des collectivités locales face au Covid-19. Patrick Beaudouin, maire de Saint-Mandé, en région parisienne, revient sur l’initiative dans un entretien exclusif à Sputnik.

Il y a 55 jours, Saint-Mandé, municipalité tranquille de la proche banlieue parisienne, est entrée comme tant d’autres dans la crise sanitaire. Ses quelque 22.000 habitants, encore marqués par l’attaque terroriste perpétrée par Amedy Coulibaly dans le magasin casher de la porte de Vincennes, ont vécu le quotidien de tous les Français confinés. Patrick Beaudouin, maire LR de la commune depuis 1995, qui avait annoncé en novembre dernier qu’il ne briguerait pas de nouveau mandat en 2020, raconte à Sputnik comment, au lieu de prendre tranquillement sa retraite, il s’est retrouvé sur le front sanitaire.

«L’ouverture du marché a eu un effet de détente»

Le marché dominical de Saint-Mandé a fait partie des rares marchés ouverts dans le Val-de-Marne. Face au premier refus en bloc de toute dérogation, 21 élus du département ont écrit directement au Premier ministre. Pourquoi se battre pour un marché?

«En Île-de-France, 40% du ravitaillement est fait par les marchés, détaille Patrick Beaudouin, c’est une tradition sympathique. Je me suis battu pour cette ouverture avec le préfet du Val-de-Marne, qui a très bien compris l’enjeu.»

Et l’argumentaire des élus ne tenait pas seulement au caractère «sympathique» de cette tradition conviviale, mais à une logique de comportement responsable, permettant de gérer au mieux les distances de sécurité dans les échoppes de primeurs et autres denrées alimentaires, souvent installées dans les locaux exigus.

«Cela a aussi eu un effet de détente vis-à-vis de la crise, précise le maire. Nos compatriotes ont retrouvé un semblant de vie collective, tout en respectant les gestes barrières. Ces rencontres étaient comme “la vie d’avant”, ce qui était important pour le maintien du moral.»

L’organisation du marché dominical a également été l’occasion d’«un grand geste de solidarité des retoucheurs de Saint-Mandé» qui, avec l’aide de l’équipe municipale qui «les a aidés à trouver du matériel», ont confectionné huit mille masques à distribuer sur place.

Pour les masques, la mairie s’organise avec la région

Une semaine avant la date de déconfinement annoncée par le gouvernement, la municipalité de Saint-Mandé a affiché les lieux et les dates de distribution de masques «grand public» à travers toute la ville.

Les premiers servis ont été les personnes de plus de 70 ans, livrées directement dans leurs boîtes aux lettres par les membres du conseil municipal. Les autres, munis de leur carte d’identité, n’avaient qu’à se rendre dans l’un des 16 bureaux de vote habituels de la commune.

«Ce sont les masques gratuits de la mairie de Saint-Mandé qui aident à sortir du confinement. Ce ne sont pas les “masques du gouvernement”. Nous les avions achetés avec le Val-de-Marne, ça nous a permis d’avoir une commande groupée et des coûts réduits», souligne Patrick Beaudouin.

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Les enfants ne sont pas oubliés dans ce lot de 1,5 million de masques achetés par le territoire, puisque des formats «enfant» sont aussi prévus pour les petits de 3 à 6 ans et pour les 7-11 ans, même si ce n’est pas «une stricte nécessité», mais «une bonne préparation» pour le jour du déconfinement.

«Aujourd’hui, il faut sortir de la crise sanitaire pour rentrer dans un élément majeur: remettre l’économie en marche. Puisque les effets de l’économie à l’arrêt seraient pires que ce que nous avions connu avec le Covid, assure Patrick Beaudouin, nous avons tous la volonté de repartir au travail!»

L’avenir politique de la commune reste encore incertain, après le premier tour des municipales qui a vu arriver en Julien Weil (Union de la droite), «parrainé» par le maire sortant, qui a recueilli 37,73% des voix, et Lena Etner (LREM) et ses 21,62%.

La mixité sociale pour une commune «à maturité urbanistique»

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Parmi les nombreux dossiers sur lesquels bute la municipalité, figure la part insuffisante de logements sociaux sur la commune: ces 11% de HLM «coûtent» à Saint-Mandé 508.000€ de pénalités majorées par an. L’année dernière, la mairie a signé une sorte de fiche de bord: un troisième «plan de mixité sociale», qui

«Je n’ai aucun problème avec la “mixité sociale”, je peux prononcer ce terme sans aucune ambiguïté. Sauf que la loi générale ne peut pas s’appliquer comme un tableau Excel, toute ville a sa structure et son histoire. Par conséquent, appliquer les 25% de logements sociaux à Saint-Mandé est impossible, tout le monde le sait», détaille Patrick Beaudouin.

Le maire sortant assure que «pour avancer, il faudrait sortir la tête du sable» et appliquer la loi, «en respectant la culture, la philosophie et la structure urbanistique de la ville».

«Saint-Mandé, la deuxième plus petite ville d’Île-de-France, est arrivée à maturité urbanistique. Quand on peut faire une opération avec les bailleurs sociaux, on le fait, mais c’est extrêmement rare», souligne Patrick Beaudouin.

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Le foncier «rare et cher» d’une commune proche de Paris et bien desservie par les transports en commun entraîne un «surcoût considérable», ce qui rend les opérations de création de logements sociaux très compliquées. «Nous aimerions que la loi soit interprétée avec intelligence, souligne le maire. Il faut que l’on trouve une solution intelligente avec les services de l’État et les politiques, puisqu’arriver à 25% de logements sociaux à Saint-Mandé, c’est raser 10 ha de la ville.»

Mais, bien que Patrick Beaudouin connaisse à fond les dossiers de sa municipalité, il maintient sa décision de partir:

«Une énergie nouvelle est nécessaire à Saint-Mandé pour poursuivre les gros dossiers mis en place, la ville a besoin d’un nouveau regard, un regard d’animation. Une nouvelle population arrive, il faut lui parler: en gardant le caractère résidentiel de la ville, l’adapter aux temps modernes», conclut Patrick Beaudouin.
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