À Paris, les riverains s’insurgent contre les terrasses provisoires

© Sputnik . Oxana BobrovitchUne terrasse parisienne "provisoire" sur les places de parking devant un restaurant
Une terrasse parisienne provisoire sur les places de parking devant un restaurant - Sputnik Afrique
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À Paris, les terrasses provisoires restent de fait ouvertes bien au-delà des 22 heures autorisées par la mairie. L’opposition des riverains contrariés, qui ne dorment plus la nuit à cause du tapage nocturne, s’organise. Sputnik a mené l’enquête dans le Paris nocturne.

«Si les restaurateurs jouent le jeu, continuent à respecter la charte mise en ligne par la mairie, à ne pas faire de bruit et à fermer à 22 heures», alors l’extension des terrasses pourrait perdurer au-delà du 30 septembre. C’est en tout cas ce qu’a déclaré Anne Hidalgo, maire de Paris, le 18 juin dernier. Mais dans les rues, les riverains ne sont pas forcément d’accord. Les nuisances commencent à incommoder sérieusement le voisinage. Dans le quartier très prisé du canal Saint-Martin, les terrasses sont bondées bien au-delà de l’horaire autorisé… et chacun s’accommode comme il peut de ces infractions chroniques.

À La Base, rue Bichat, dans le Xe arrondissement, un bar repaire d’une dizaine d’associations «ayant pour objectif de mobiliser les citoyens à la justice climatique et sociale», les consignes municipales de fermeture de terrasse sont plutôt respectées.

«À 22 heures, je démonte ma terrasse, elle est officiellement fermée, précise à Sputnik Thomas, bénévole à La Base. Les gens y restent debout, verre à la main. Mais là, je n’y peux rien. Moi, j’ai fermé.»

En face, le Levantine, qui sert des tapas sympathiques d’inspiration méditerranéenne, n’a rien fermé du tout. La terrasse provisoire qui a été installée sur les places de stationnement, le long du trottoir, est pleine à craquer. Keren, fondatrice du restaurant, ne cache pas au micro de Sputnik que de jouer les prolongations sauve son établissement, qui commence tout juste à sortir la tête de l’eau après la période du confinement.

«On nous tolère, assure au micro de Sputnik Keren, pour l’instant, il n’y a au aucune plainte.»

Néanmoins, sur les réseaux sociaux, on voit apparaître des collectifs des conseils syndicaux comme celui de la rue Marie et Louise, adjacente à la rue Bichat, monté «contre les nuisances sonores/non à l’extension des terrasses au-delà du 30 septembre 2020». Ils dénoncent inlassablement chaque transgression des règles instaurées par la mairie de Paris.

​Maître Philippe Meilhac, avocat expérimenté en contentieux de la voirie et du domaine public, rappelle que les décisions de la mairie parisienne sur les terrasses ont été prises au moment du déconfinement. «Tout est allé relativement vite», souligne-t-il. Pour lui, «techniquement, il était difficile de s’y préparer», puisque le système officiel de demande d’autorisation supposait deux à trois mois de délai pour le traitement du dossier.

«Dans la réalité, on est passé de tout à tous. Il n’y a pas de règle directrice. Non seulement le règlement n’a pas été voté par le Conseil de Paris, mais aussi le système est purement déclaratif», explique à Sputnik maître Philippe Meilhac.

Pour l’avocat, habitué à ce domaine de contentieux, l’absence de règlement «permettra difficilement au juge de trancher, si jamais on saisit un juge». Ainsi, tant qu’il n’y a pas de contentieux, il n’y a pas de problème pour poursuivre l’expérience un peu plus longtemps. Mais pour Me Meilhac, «fermer les terrasses provisoires à 22h n’est pas réaliste ni en adéquation avec les pratiques des restaurants», où à cette heure, les clients sont en plein dîner. Et il confirme indirectement les inquiétudes de la propriétaire du Levantine:

«Les établissements plus ou moins en difficulté économique ont tendance à vouloir faire le maximum de chiffre, mais le prochain Conseil de Paris sera obligé de rectifier la situation. La maire aura certainement des questions des élus, il va falloir que l’on adopte un nouveau règlement», conclut l’avocat.

La maire socialiste de Paris s’est réjouie de l’implication des restaurateurs, qui «ont fait des choses très jolies, avec beaucoup de goût» en ajoutant «quelque chose de très beau» sur les places de parking que la mairie souhaite supprimer en partie.

​Mais comme on peut le constater, l’esthétique de la terrasse provisoire se décline de mille manières dans les rues de Paris, et elle n’est pas du goût de tout le monde. Pour l’instant, rien n’empêche la mairie de Paris de poursuivre cet élargissement des terrasses, un dispositif «exceptionnel» et très peu encadré juridiquement. En attendant de voir arriver les contentieux entre restaurants et riverains, la municipalité a le choix entre arrêter l’expérience le 30 septembre, comme prévu, ou essayer de mettre en place un règlement satisfaisant pour tous.

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