Marketing de réseau au Cameroun, entre opportunité d’affaires et «brebis galeuses»

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Le marketing de réseau connaît une ascension fulgurante au Cameroun. De plus en plus d’entrepreneurs tentent l’aventure et réalisent de bonnes affaires. Cependant et malgré les opportunités qu’il offre, ce secteur peine encore à emporter le suffrage universel à cause des «brebis galeuses» qui ternissent son image.

S’il y a un domaine d’activité qui a pignon sur rue et qui suscite la controverse depuis ces dernières années au Cameroun, c’est bien le marketing de réseau. Dans une conjoncture marquée par un chômage endémique, où le secteur informel emploie au moins 80% de la population active, cette activité est apparue pour certains comme un pis-aller, voire un gilet de sauvetage.

Et le contexte de crise sanitaire généré par le Covid-19 ne fait que confirmer cet engouement. En ces temps de pandémie, le marketing de réseau s’est, en effet, révélé être l’un des terrains ayant le moins souffert de la crise sanitaire au Cameroun.

«J’ai vendu en cette période plus de produits que d’habitude étant donné que mon entreprise fabrique beaucoup de compléments alimentaires qui boostent l’immunité. En outre, mon réseau s’est agrandi car de nouveaux vendeurs ont rejoint nos rangs après avoir perdu leur emploi», explique à Sputnik Danielle Christelle Bonam, journaliste de formation et artiste chanteuse.

Le principe du marketing de réseau est simple. Il s’agit tout d’abord de vendre un produit à travers un réseau de distributeurs agréés, et non par le biais de points de vente. Le but de cette stratégie est de réduire au maximum le nombre d’intermédiaires entre l’usine et le consommateur. Second volet du mécanisme: la duplication, qui permet au distributeur de parrainer d’autres vendeurs à qui il apprendra à faire ce qu’il fait, c’est-à-dire vendre des articles et constituer un réseau.

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C’est le cas d’une multinationale de fabrication de produits dans les domaines de la cosmétique, des soins de santé et de l’électroménager. Bien implantée au Cameroun, elle a su bâtir un réseau de milliers de vendeurs à qui elle permet, nous confie une adhérente qui a tenu à garder l’anonymat, «d’avoir un confort physique et matériel». Selon cette responsable de l’entreprise au Cameroun, «le mécanisme de vente fonctionne sur le principe du marketing relationnel». L’adhésion se fait sur une base minimale de 24.000 francs CFA (36 euros).

Le secteur d’activité a fini par s’imposer comme LA solution miracle au problème du sous-emploi, et une alternative sérieuse pour beaucoup de Camerounais. Désormais, étudiants comme jeunes cadres à l’emploi précaire y trouvent le moyen d’arrondir leurs fins de mois. Danielle Christelle Bonam n’a de cesse de louer les mérites de l’activité depuis sa première souscription dans une entreprise de marketing de réseau bien connue au Cameroun.

«Cette activité a changé ma vie. J’y trouve mon compte. J’ai déjà recruté des équipes que je coache dans mon réseau. C’est un métier qui m’a permis de faire des rencontres fructueuses avec des gens de toutes les classes, et même d’autres pays», confie-t-elle enthousiaste à Sputnik.

Des brebis galeuses

Le principe veut que pour gagner davantage il faille attirer du monde dans son réseau. Généralement, c’est dans leur environnement immédiat que les agents recrutent et pour ce faire, ils ne tarissent pas d’imagination. Entre porte-à-porte, cooptation en ligne et appât du gain facile, les moyens les plus divers sont mis à contribution. Des pratiques qui frisent parfois le harcèlement.

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Contacté par une ex-compagne qui voulait l’entraîner dans son réseau, Aristide Mosi est resté sceptique alors que cette dernière lui faisait miroiter monts et merveilles.

«Mon ex-compagne a voulu me convaincre de rejoindre son réseau. Elle est allée jusqu’à me dire que mon adhésion était la seule preuve que je l’aie vraiment aimée, même si nous sommes aujourd’hui séparés. J’ai vu ça comme de la pure manipulation et je lui ai dit que je n’étais pas intéressé», confie-t-il à Sputnik.

Si le secteur du marketing de réseau a permis à certains de se créer une niche d’opportunités, d’autres disent y avoir malheureusement laissé des plumes. Las d’attendre les millions que lui faisaient miroiter les vendeurs d’une entreprise du domaine, Dupara Kamdem a dû jeter l’éponge.

«Je n’en pouvais plus. Ceux qui m’ont recruté sont venus me dire que j’allais gagner de l’argent et devenir riche. Ils m’ont demandé de faire entrer mes amis et les membres de ma famille. J’ai réalisé que c’était faux car je voyais le temps passer et les millions que j’étais censé gagner chaque semaine n’arrivaient toujours pas. Mon chef m’avait expliqué que c’était parce que je n’avais pas réussi à ramener beaucoup de personnes», relate-t-il à Sputnik.

«Qui leur a dit que le marketing de réseau était un reposoir? Il faut mériter le succès», rétorque le leader d’une autre entreprise du secteur. Le problème de ceux qui se plaignent, ajoute-t-il, vient du fait qu’ils sont sous-informés et qu’ils prennent les choses pour acquises.

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«C’est vrai que des brebis galeuses ont envahi le marché et abusent des autres. Certains, pour recruter au maximum dans leur réseau, ne disent pas toute la vérité. Mais ce n’est pas une raison pour jeter l’anathème sur un métier qui crée des emplois et change des vies», défend-il.

Le secteur serait donc victime de pratiques individuelles qui éclosent sous les cieux camerounais. Mais pas seulement. Le marketing relationnel semble souvent confondu avec le système de vente pyramidale, illégal dans plusieurs pays. «Dire que le marketing de réseau est bon ou mauvais n’a pas plus de sens que de dire que travailler dans la restauration est bon ou mauvais», résume pour sa part cet ancien distributeur contacté par Sputnik:

«Chaque entreprise définit un plan de rémunération qui lui est propre, en fonction de sa solidité, de la qualité de son produit. Il y a de grandes multinationales qui comptabilisent plus de 40 ans d’existence, il y en a d’autres qui n’auront qu’une activité éphémère de quelques mois, sans que ce soit une escroquerie pour autant. Naturellement, les opportunités de carrière varient d’un cas sur l’autre.»
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