En Côte d’Ivoire, le poker menteur d’Henri Konan Bédié

© AFP 2023 SIA KAMBOUUn meeting du candidat à la présidentielle ivoirienne Henri Konan Bédié
Un meeting du candidat à la présidentielle ivoirienne Henri Konan Bédié - Sputnik Afrique
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Le parti de l’ex-Président ivoirien Henri Konan Bédié, l’un des quatre candidats dont la candidature a été retenue pour la présidentielle d’octobre 2020, a annoncé qu’il ne participerait pas aux élections des bureaux des Commissions électorales locales. Un scrutin qui risque cependant de ne pas se tenir.

En Côte d’Ivoire, les quatre candidats retenus par le Conseil constitutionnels pour prendre part au premier tour de la présidentielle fixé au 31 octobre sont désormais connus. Outre Alassane Ouattara, ce sont l’ancien Premier ministre (sous Laurent Gbagbo) Pascal Affi N'Guessan, l'ancien Président Henri Konan Bédié et enfin l’ex-conseiller de ce dernier, le député Kouadio Konan Bertin (dissident du parti d'Henri Konan Bédié, qui se présente en indépendant).

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Au vu de cette configuration, Henri Konan Bédié serait, à n’en point douter, le principal rival d’Alassane Ouattara à cette élection. Mais la décision de sa formation politique de ne pas participer aux élections des bureaux des Commissions électorales locales vient susciter des interrogations quant à sa participation effective au scrutin d'octobre.

Un préalable toujours pas satisfait

Toutefois, les élections dont le parti de Bédié annonce le boycott… ne vont vraisemblablement pas se tenir. Son parti, le PDCI (Parti démocratique de Côte d’Ivoire) a d’ailleurs relevé que le gouvernement ivoirien «n’a à ce jour posé aucun acte pouvant être regardé comme un commencement d’exécution» de cette injonction de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP).

Cette cour de justice africaine avait été saisie, en septembre 2019, par l’opposition ivoirienne, et notamment le PDCI, pour contester la composition déséquilibrée de la Commission électorale indépendante (CEI, la structure chargée d’organiser les élections).

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Dans une décision rendue le 15 juillet 2020, la CADHP avait ordonné au gouvernement ivoirien d’organiser de nouvelles élections dans les commissions électorales locales (CEL), qui vont ainsi élire de nouveaux membres de la CEI, dans un délai maximum de trois mois. La CADHP avait présenté cette mesure comme un préalable avant «toute élection», et par conséquent avant la présidentielle. Mais depuis, Abidjan ne semble pas en mesure de s’exécuter. Pas plus qu’à une autre injonction de cette même cour, en avril 2020, de suspendre les poursuites judiciaires engagées contre Guillaume Soro -un des barons du régime frappé de déchéance- et de libérer 19 de ses proches (dont des députés) incarcérés depuis décembre 2019. Une fois encore, l’exécution du verdict a été reléguée aux calendes grecques par les autorités ivoiriennes.

«La tenue d’élections nouvelles dans les commissions locales ne peut être regardée comme exécutant l’arrêt du 15 juillet 2020 que si les personnalités proposées par les partis de l’opposition conformément au processus de désignation décrit et validé par la CADHP ne sont pas admises dans les commissions de l’organe électoral. Par conséquent, le PDCI décide de ne pas participer aux élections des bureaux des commissions électorales locales», a déclaré le parti d’Henri Konan Bédié dans un communiqué daté du 14 septembre.

Interrogé par Sputnik sur l’éventualité qu’à terme, cette décision du PDCI implique un boycott de la présidentielle, l’analyste politique Mamadou Habib Karamoko assure que non.

«Le PDCI ne boycottera pas la présidentielle. À travers son communiqué, le parti veut seulement mettre la pression sur le pouvoir», a-t-il estimé.

Henri Konan Bédié a d’ailleurs, dans la foulée de l’annonce, ce 14 septembre, des candidats retenus pour la présidentielle, déclaré que son parti demeurerait «en ordre de marche pour la reconquête du pouvoir d'État et la construction d’une Côte d’Ivoire réconciliée, unie et prospère».

Il a également dénoncé «la validation de la candidature inconstitutionnelle» d’Alassane Ouattara ainsi que «l'exclusion arbitraire et antidémocratique de leaders politiques majeurs» comme l’ex-chef d’État Laurent Gbagbo et les anciens présidents de l’Assemblée nationale Mamadou Koulibaly et Guillaume Soro.

Des «appendices du RHDP»

Pour Guillaume Soro –et cela reste valable pour l’opposition dans son ensemble–, il ne fait aucun doute que la CEI et le Conseil constitutionnel (présidé par Mamadou Koné, un proche d’Alassane Ouattara) sont des «appendices» du Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP, parti au pouvoir).

Lors de la présidentielle de 2010, ces deux institutions avaient été au cœur des contestations qui avaient débouché sur une crise postélectorale sanglante qui a fait plus de 3.000 morts. Cette dernière s’était déclenchée après que le Président sortant, Laurent Gbagbo, reconnu vainqueur par le Conseil constitutionnel, et Alassane Ouattara, proclamé comme tel par la CEI, avaient chacun revendiqué la victoire.

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