Mali: des panafricanistes dénoncent une «indépendance sous surveillance de la France»

© Sputnik . Idelette BissuuManifestation du 22 septembre 2020, Bamako, Mali
Manifestation du 22 septembre 2020, Bamako, Mali  - Sputnik Afrique
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Le jour de la fête de l’indépendance du Mali, mardi 22 septembre, a été marqué par des manifestations de mouvements panafricains contre «la gestion» de ce pays d’Afrique de l’Ouest par la France. Un état des lieux néanmoins nuancé par les observateurs interrogés par Sputnik.

Le collectif «France dégage» a choisi le 22 septembre, jour où le peuple malien célèbre le 60e anniversaire de son accession à l’indépendance, pour manifester pacifiquement au cœur de la capitale Bamako. En marge de cette mobilisation, la présence de la Ligue de défense noire africaine, mouvement international dont le siège est en France qui défend les droits des Afro-descendants, a pris part à la mobilisation pour dénoncer «la politique impérialiste française». La ligue pointe «l’asservissement» des Maliens à travers ce qu’elle caractérise d’«indépendance sous surveillance de la France».

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C’est au travers de messages hostiles et parfois même violents sur des pancartes comme «la France un État génocidaire», «Mort à la France et alliés», et de chants au son des vuvuzelas que les manifestants ont occupé la place de l’Indépendance de Bamako mardi 22 septembre.

​La ligue estime que l’indépendance des pays africains, anciennes colonies françaises «n’est que de nom». Pour le leader du mouvement, la justification de la présence française en Afrique «n’est pas à cause du terrorisme ou de l’islamisme», mais n’aurait «pour but que de défendre et de protéger les intérêts de la politique française au Mali», dénonce Egountchi Behanzin, fondateur de la Ligue de défense noire africaine, dans une déclaration à Sputnik, sans préciser en quoi consistent ces «intérêts politiques».

«Aujourd’hui, nous demandons le départ de la France au Mali parce qu’aujourd’hui, la France interdit l’armée malienne de pénétrer [dans, ndlr] certaines zones au Nord. La France n’aide pas les militaires maliens à asseoir son autorité dans leNord du Mali, mais elle contribue à isoler, éloigner l’État malien de ces zones-là», insiste Egountchi Behanzin.

Après 60 ans d’indépendance, les centaines de Maliens qui ont répondu présents jusqu’à une heure tardive estiment que les forces présentes dans le pays sont «des forces d’occupation». Pour eux, il n’est pas possible de parler d’indépendance «tant que ces forces sont là», car malgré leur présence, la peur de se déplacer librement habite toujours les populations dans certaines parties du pays à cause du terrorisme qui fait toujours des victimes.

La Sécurité au centre des préoccupations des manifestants

La question de la sécurité semble être celle qui préoccupe le plus les manifestants regroupés mardi 22 septembre autour du monument de l’Indépendance, date symbolique dans l’histoire politique du Mali.

​Selon le rapport de janvier 2020 de l’Organisation des Nations unies sur le Mali, la situation sécuritaire du pays se « détériore à un rythme alarmant » malgré des progrès enregistrés dans le processus politique. D’après le dernier rapport trimestriel d’avril, mai et juin duSecrétaire général des Nations unies, les forces de défense et de sécurité maliennes ont été la cible de «49 attaques» qui ont fait «67 morts et 86 blessés».

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Si sur cette question la plupart des observateurs constatent que la présence de la force française Barkhane déployée dans le Sahel n’a pas empêché la situation sécuritaire au Mali de se détériorer, ils conviennent néanmoins qu’un départ précipité de l’opération, dont l’ancêtre est Serval avait empêché en 2013 les colonnes djihadistes d’imposer leur présence au nord du Mali, précipiterait le non contrôle  de l’État dans cette partie du pays .«Au Sahel, nous nous retrouvons plus en face d’un "dilemme rwandais". Si l’armée française se retire et qu’il y a une nouvelle flambée de violence, elle risque de subir un contre-feu informationnel, c’est-à-dire qu’on va l’accuser d’avoir laissé faire les tueries. Mais si elle reste et que l’on constate une multiplication des groupes […]"terroristes-djihadistes", c’est aussi perçu comme une catastrophe», nuançait par exemple auprès de Sputnik le chercheur Clément Nguyen, auteur du «Dragon et l’aigle» qui analyse la lutte d’influence entre les grandes puissances en Afrique. Dans cette interview datant de janvier 2020, Nguyen rappelle le lien de causalité entre ce qui s’était passé en Libye en 2011, et dans lequel la France a«une responsabilité écrasante»,et la montée de l’insécurité au Mali.

«D’un autre côté, la présence française ne se résume pas à la seule dimension militaire.Elle s’inscrit dans une présence multidimensionnelle, au niveau de l’appui au développement économique de ce pays»,nuance pour sa partle président de l’Institut Prospectives et Sécurité en Europe (IPSE), Emmanuel Dupuy, auprès de Sputnik.

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Concernant «la non présence de l’armée malienne» à Kidal, dans le Nord du pays, évoquée par les panafricanistes le 22 septembre, celle-ci est «malheureusement assumée par des forces armées maliennes qu'is étaient désorganisées au moment du putsch militaire de Sanogo en 2012. À l’époque, l’intervention française avait permis d’éviter que les groupes terroristes ne s’emparent de la plus grande partie du territoire malien», rappelle Dupuy. Le fait que les militaires français empêchent l’armée malienne d’accéder à Kidal «est une vue de l’esprit», selon le président de l’IPSE.

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Les contestations de toute forme de la présence française (notamment militaire et économique) se sont accrues ces dernières années au Mali et dans d’autres pays du Sahel à mesure que la sécurité des populations et leurs conditions de vie n’ont cessé de se détériorer. Ceux qui gouvernent, assimilés par une partie non négligeable de l’opinion publique à des «pantins» au service des intérêts de l’ancienne puissance coloniale, sont souvent dans le collimateur des populations. Au Mali, le 18 août 2020, le Président Ibrahim Boubacar Keïta a été évincé par un putsch militaire après plusieurs semaines de contestations populaires.
Le pays attend désormais la composition d'un gouvernement de transition après la nomination le 21 septembre du militaire à la retraite Bah Ndaw comme Président de la transition  et du colonel Assimi Goita comme son vice-Président.

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