Après les violences policières, les arrestations arbitraires de manifestants: la France pointée du doigt par Amnesty

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Acte 27 des Gilets jaunes à Paris - Sputnik Afrique
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La France se retrouve à nouveau sous le feu des critiques. Après un groupe d’experts de l’Onu qui a dénoncé l’usage excessif de la force par la police, Amnesty International alerte sur les cas de manifestants pacifiques «arrêtés arbitrairement» et «victimes d’acharnement judiciaire». Gérard Filoche explique pour Sputnik la raison de cette violence.
«Utiliser la loi de manière abusive contre les personnes qui prennent part à des manifestations n’est pas aussi visible que les violences policières. Mais c’est une autre forme de violence avec des effets tout aussi dévastateurs.»

Le constat est cinglant. Dans un rapport publié mardi 29 septembre, Amnesty International dénonce le traitement dont sont victimes les manifestants en France depuis 2018.

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Selon l’ONG, en 2018 et 2019, les autorités judiciaires ont condamné plus de 40.000 personnes sur la «base de lois vagues», qui auraient également été «utilisées pour restreindre de manière illégitime les droits à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d’expression

Des accusations fortes qu’Amnesty International étaye dans un rapport de 56 pages, passant en revue certains cas de manifestants pacifiques «arrêtés arbitrairement» et «victimes d’acharnement judiciaire» durant les périodes de mobilisations des Gilets jaunes et contre la réforme des retraites.

«Les manifestants du mouvement des Gilets jaunes ont particulièrement été réprimés par les autorités françaises. Entre novembre 2018 et juillet 2019, 11.203 d’entre eux ont été placés en garde à vue. Plus de la moitié, soit 5.962 manifestants, ont été libérés sans poursuites», écrit l’ONG.

Les autorités auraient ainsi instrumentalisé des lois contraires au droit international pour verbaliser, arrêter arbitrairement et poursuivre en justice des gens qui n’avaient commis aucune violence, avance Amnesty International.

«Une façon d’étouffer la majorité de la population»

Tous ces éléments constituent-ils une menace pour l’État de droit? Interrogé par Sputnik, Gérard Filoche, membre de la Gauche démocratique et sociale (GDS), estime que l’État de droit «n’est pas menacé», mais «régulièrement violé».

«La manière dont les hiérarchies policières procèdent, sous les ordres de Castaner et maintenant Darmanin, c’est une façon d’étouffer la majorité de la population», accuse Gérard Filoche.

En effet, durant les mobilisations, les manifestations sont sous le coup de nouvelles réglementations telles que la Loi anti-casseurs, promulguée en 2019, officiellement pour lutter contre les antifas. Elle interdit notamment de dissimuler son visage pendant les manifestations sous peine d’une amende pouvant aller jusqu’à 15.000 euros et d’une peine pouvant aller jusqu’à un an d’emprisonnement.

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L’organisme pointe également les arrestations préventives injustifiées. Et pour cause, des centaines de personnes –dont des manifestants– ont été reconnues coupables de «participation à un groupement en vue de la préparation de violences». Or, ces peines seraient parfois basées sur «des indices très discutables». En outre, 20.280 personnes ont été reconnues coupables d’«outrage à l’encontre de personnes dépositaires de l’autorité publique», notamment pour des slogans lancés dans le cadre de manifestations.

Comment expliquer que la France, reconnue pour ses grands mouvements sociaux, ait été mise en cause en 2019 par un groupe d’experts des droits de l’homme de l’Onu pour son usage violent et excessif de la force contre le mouvement des Gilets jaunes, notamment à cause de l’utilisation du lanceur de balles de défense (LBD) et maintenant par Amnesty International?

«Empêcher que le pouvoir très minoritaire du Président soit mis à nu»

Le membre de la GDS explique que cette «violence», cette «brutalité policière», a été utilisée pour «empêcher que le pouvoir très minoritaire du Président de la République soit mis à nu.»

«Si Macron n’avait pas par la violence interdit les manifestations, frapper et condamner, il ne serait plus au pouvoir, parce qu’il y aurait eu des manifestations de plusieurs millions de gens», affirme Gérard Filoche.

Une doctrine qui a fait d’ailleurs de nombreux blessés. Selon le ministère de l’Intérieur, on dénombrait près de 2.500 manifestants blessés (chiffres arrêtés en octobre 2019), dont 144 gravement blessés par les forces de l’ordre, d’après un décompte réalisé par CheckNews, s’appuyant sur les données du collectif «désarmons-les» et les recensements effectués par David Dufresne. À noter que du côté des forces de l’ordre, le ministère de l’Intérieur a recensé 1.944 blessés.

«La colère gronde»

Par ailleurs, le syndicaliste fustige une politique du gouvernement qu’il qualifie «d’extrême fric, d’extrême finance» qui «mène à l’explosion». D’autant plus que la «colère gronde»:

«Il va y avoir 474 plans sociaux, 800.000 chômeurs de plus, la précarité fait rage, il y a maintenant des gens affamés, qui ne mangent plus à leur faim. De plus, le plan de relance du ministre est un plan qui consiste à donner sommairement 100 milliards aux riches et quelques aumônes aux pauvres, donc ça ne peut plus continuer», tonne Gérard Filoche.

Alors que les prévisions économiques sont pour le moins moroses, comment les Français pourraient exprimer leur colère, sachant que la crise sanitaire a des conséquences sur les rassemblements et que les risques encourus lors des manifestations constituent un frein?

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Amnesty International propose quelques pistes comme la modification de l’article 431-3 du Code pénal afin de «préciser qu’un rassemblement public non déclaré ne menace pas nécessairement l’ordre public et ne doit donc pas être considéré en soi comme illégal et soumis à la dispersion.» Il alerte sur l’importance de «veiller à ce que toute mesure prise contre la pandémie de Covid-19 soit nécessaire et proportionnée et ne restreigne pas de manière illégitime les droits à la liberté de réunion pacifique.»

Le militant de gauche pense, quant à lui, qu’il faut changer de mode de contestation en privilégiant «l’occupation des entreprises», car «c’est beaucoup plus fort, beaucoup plus puissant que l’occupation des rues.»

«Nous sommes 30 millions de salariés, il y a à peu près 3,2 millions d’indépendants, dont la moitié sont des pauvres. C’est la prise de conscience collective de cette force sociale qui peut permettre de bloquer Macron, dans les luttes d’abord, et dans les urnes ensuite», conclut Gérard Filoche.
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