Reconfinement au Québec: «alcoolisme», «troubles mentaux», «toxicomanie», un «sacrifice générationnel»?

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Au Québec, le reconfinement suscite grogne croissante dans les couches de la population les plus affectées par les mesures. On craint de plus en plus les dommages collatéraux économiques et psychologiques. Selon Benoît Girouard, entrepreneur et auteur d’une vidéo virale sur le sujet, le gouvernement Legault délaisse des millions de personnes.

Au Québec, où des complications dues au Covid-19 ont fait jusqu’à présent 5.915 morts, le Premier ministre, François Legault, commence à devoir composer avec une certaine insatisfaction.

Ces derniers jours, François Legault a laissé paraître quelques signes d’exaspération durant ses points de presse, estimant que son objectif n’était «pas d’être populaire, mais de sauver le réseau de la santé».

«On a des commentateurs qui nous disent: “Vous auriez dû le faire avant”. Puis on a d’autres commentateurs qui disent: “Vous êtes en train de sacrifier une génération”. Donc, même si on voulait essayer de plaire à tout le monde, là, c’est impossible parce qu’il y a des gens qui disent qu’on va trop loin puis d’autres qui disent qu’on ne va pas assez loin. Donc, je ne sais pas comment on pourrait plaire à tout le monde», a laissé tomber le Premier ministre le 7 octobre.

Benoît Girouard est l’un de ceux qui estiment que le gouvernement va trop loin –et même beaucoup trop loin– dans l’imposition de mesures pour contrer la propagation du Covid-19. Le 30 septembre dernier, il a publié une vidéo sur les réseaux sociaux qui est rapidement devenue virale.

​Insatisfaction grandissante

Ex-président de l’Union paysanne, importante association agricole au Québec, il est dorénavant président du Conseil d’administration de Gym X-coopérative de solidarité, une entreprise gravement affectée par les mesures sanitaires. En l’espace de quelques semaines, son gymnase a perdu des plusieurs dizaines de milliers de dollars, une situation qui est appelée à perdurer en raison du reconfinement. En entrevue avec Sputnik, Benoît Girouard dénonce ce qu’il perçoit comme un «suicide économique et psychologique».

«Premièrement, qu’est-ce que la santé publique? L’OMS nous dit que la santé concerne la santé physique et mentale des individus et des collectivités. En voyant la politique du gouvernement Legault, je me demande où sont passées la santé mentale et les collectivités. C’est complètement éclipsé. L’angle mort du gouvernement Legault, ce sont 8,5 millions d’habitants», s’indigne l’entreteneur.

Benoît Girouard est loin d’être le seul à s’inquiéter des impacts psychologiques du confinement. Selon une récente étude menée par une équipe de chercheurs de l’Université de Sherbrooke, au Québec, un adulte sur cinq affiche des symptômes de dépression majeure ou d’anxiété généralisée. Des résultats de deux à six fois plus élevés qu’en temps normal.

«Dans ma communauté, les troubles mentaux (suicides, psychoses, dépression. etc.) ont triplé par rapport à l’année passée. Cette donnée est complètement ignorée dans le discours du gouvernement. […] Le problème central, ce sont les fonctionnaires de la santé publique. Ces gens-là sont incapables de concevoir la santé dans sa totalité, au-delà d’un microbe ou d’un virus», tranche l’entrepreneur, qui a invité ses collègues affectés par la crise à livrer leur témoignage sur les réseaux sociaux.

Benoît Girouard déplore aussi que les plus fragiles et démunis –parmi lesquels de nombreux adolescents– ne fassent pas l’objet d’une plus grande attention.

Explosion des problèmes de santé mentale

La Ville de Saint-Jérôme, où est situé son gymnase coopératif, est l’une des moins favorisées du Québec et son centre sportif aidait selon lui beaucoup de jeunes à «se prendre en main». Il observe également que le reconfinement partiel favorise l’alcoolisme et la toxicomanie chez des jeunes de sa communauté:

«Les centres de désintoxication et de prévention de la toxicomanie sont pleins. C’est une autre réalité extrêmement grave qui échappe au radar de l’État. […] J’ai appris que la direction de la santé publique avait limité le nombre de places disponibles dans ces centres durant la crise, alors que leurs demandes explosent», poursuit-il.

Le 5 octobre dernier, l’Association des pédiatres du Québec a accusé le gouvernement Legault de nuire gravement à la santé mentale des élèves en renforçant les règles sanitaires dans les écoles. Les pédiatres québécois évoquent même un «sacrifice générationnel».

«En resserrant les mesures sans tenir compte de la nature profonde de l’adolescence, nous contribuerons assurément à une quatrième vague bien plus dévastatrice, déjà amorcée: décrochage, dépressions, toxicomanie, cyberdépendance, troubles alimentaires, peurs incontrôlables, distorsions de la pensée», a assuré l’Association dans une lettre adressée au Premier ministre Legault.

 

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