Ilham Aliev: «L’Azerbaïdjan ne consentira à l’indépendance du Haut-Karabakh en aucun cas» - vidéo

© Sputnik . Vladimir Trefilov / Accéder à la base multimédiaInterview de Dmitri Kisselev, directeur de l'agence Rossiya Segodnya, avec le Président azerbaïdjanais Ilham Aliev
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Les Azerbaïdjanais et les Arméniens doivent coexister en toute paix dans le Haut-Karabakh, mais l’appartenance de la région à l’Azerbaïdjan n’est pas négociable, insiste son Président Ilham Aliev.

Depuis fin septembre, les hostilités se poursuivent au Haut-Karabakh. Suite à la réunion à Moscou, les ministres des Affaires étrangères russe, azerbaïdjanais et arménien sont parvenus à un accord de cessez-le-feu, mais les parties affirment qu'il est peu respecté dans la pratique. Dmitri Kisselev, directeur de l'agence Rossiya Segodnya, s'est entretenu avec les dirigeants azerbaïdjanais et arménien, leur posant les mêmes questions et leur accordant un temps équivalent. Dans une interview, le Président azerbaïdjanais Ilham Aliev a évalué la situation actuelle, les pertes des parties en conflit et a indiqué s’il est vrai que des mercenaires de Syrie et de Libye luttent aux côtés de l'Azerbaïdjan. Il a également énoncé la position de Bakou sur les principes de base du règlement, par quoi la réconciliation devrait commencer. Il a également exposé la vision azerbaïdjanaise du compromis sur la question du Haut-Karabakh, quelles sont les lignes rouges pour l’Azerbaïdjan qu’il ne traversera jamais. Enfin, il a partagé son opinion sur la question de savoir si les Azerbaïdjanais et les Arméniens pouvaient coexister en paix.

Monsieur le Président, je vous remercie sincèrement de m’avoir accordé l'occasion de vous poser des questions en ces temps aussi difficiles pour l'Azerbaïdjan et pour le monde entier. Comment évaluez-vous les résultats des combats déclenchés le 27 septembre? Quelles sont les pertes subies par les parties et combien de prisonniers y a-t-il?

«Le 27 septembre, l'Azerbaïdjan a été attaqué une nouvelle fois par les forces armées arméniennes, ce qui n'était pas la première attaque de ces trois derniers mois. Quelque chose de pareil, mais à plus petite échelle, a eu lieu en juillet à la frontière de l'État, cette fois-là l'attaque a été repoussée. Puis, en août, un groupe de sabotage a été envoyé par les Arméniens pour perpétrer des actes terroristes contre des civils et des militaires et dont le chef a été arrêté, il témoigne. Fin septembre, nos localités ont également été pilonnées par l'artillerie, et dès les premières heures, nous avons eu des victimes, tant parmi les civils que parmi les militaires. À ce jour, nous avons 43 victimes civiles et plus de 200 blessés, ainsi qu'environ 2.000 maisons soit complètement détruites soit endommagées dans les villages et villes adjacentes à la ligne de contact. Malheureusement, les pilonnages d'artillerie perpétrés par l'Arménie se poursuivent après que les conditions du cessez-le-feu ont été convenues, notamment les bombardements barbares de la ville de Gandja, qui ont fait 10 morts et une quarantaine de blessés parmi les civils. Quant aux pertes sur le champ de bataille, selon nos données, les pertes du côté arménien sont beaucoup plus élevées que les nôtres. Nous annoncerons nos pertes parmi le personnel militaire après la fin de la phase chaude du conflit.

Quant aux résultats des combats, ils sont très réussis pour l'armée azerbaïdjanaise, nous sommes parvenus à percer la défense profondément échelonnée de l'ennemi. Dans certaines régions, il y avait même quatre lignes de défense. Le relief montagneux rend, bien sûr, la défense beaucoup plus facile qu'une contre-offensive. Aujourd'hui, des dizaines de localités ont été libérées de l'occupation, dont la ville de Jabrayil et la plupart des villages de la région de Jabrayil, la majorité absolue des villages de la région de Fizuli, le village de Sugovushan, qui est d'une importance stratégique. Nous avons expulsé les occupants des hauteurs stratégiques de la chaîne de montagnes de Mourovdag et nous poursuivons notre opération réussie de restauration de l'intégrité territoriale de notre pays.»

De divers côtés, nous entendons parler de la participation de mercenaires syriens ou libyens au conflit aux côtés de l’armée azerbaïdjanaise. Ces rapports sont-ils dignes de confiance?

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«J’ai à plusieurs reprises commenté ce sujet. Il n’y a aucun besoin en quelconque participation militaire étrangère en Azerbaïdjan. Notre armée compte plus de 100.000 de combattants et ses effectifs peuvent si nécessaire être augmentés de plusieurs fois grâce à la mobilisation. Aujourd’hui, les formations armées dont nous disposons sont absolument en mesure d’accomplir n’importe quelle tâche. Les images de la destruction du matériel militaire arménien sont disponibles en ligne. Aucun mercenaire ne possède bien sûr de telle qualification et de telles possibilités techniques. Grâce aux seuls drones, nous avons détruit pour plus d’un milliard de dollars de matériel militaire ennemi, et cela sans parler d’autres moyens dans notre disposition. Le potentiel de l’armée azerbaïdjanaise n’est un secret pour personne. De ce fait, nous n’avons pas besoin de forces supplémentaires. L’Azerbaïdjan a toujours lutté contre le terrorisme international, et nous ne permettrons à aucune organisation terroriste de se faire un nid sur notre territoire ni de menacer notre peuple ou nos voisins. Nous ne le permettrons jamais. Personne n’a fourni de preuve de la participation de formations armées étrangères aux hostilités en cours en Azerbaïdjan. Notre position officielle est qu’il n’y a chez nous aucun mercenaire étranger.»

Les ententes conclues à Moscou le 10 octobre évoquent les principes de base de règlement dans le Haut-Karabakh. Quelles sont ces principes et comment les interprétez-vous?

«Ces principes ont été élaborés pendant plus d’une dizaine d’années. Avec la précédente administration arménienne nous avons réalisé des progrès importants dans la coordination de nos positions. Ce n’était pas facile, car les négociations sont toujours un procès difficile, surtout sur un sujet aussi important. Et pourtant, les deux parties manifestaient leur volonté d’un règlement politique. Or malheureusement, après l’arrivée au pouvoir du gouvernement arménien actuel, la partie arménienne a jeté dans la poubelle tout ce qu’on avait atteint. Il y a eu une tentative de changer le format des négociations en y impliquant les autorités de la dénommée république du Haut-Karabakh, ce qui a été rejeté par Bakou comme par les coprésidents du Groupe de Minsk de l’OSCE.

Quant aux principes de base, tout est inscrit d’une façon très claire. Une libération par étapes des zones azerbaïdjanaises occupées est prévue. La première étape concerne cinq districts dans le sud-est des territoires occupés. La deuxième porte sur les districts de Latchin et de Kelbadjar situés entre le Haut-Karabakh et l’Arménie. On attend l’ouverture de toutes les infrastructures, dont celles situées dans d’autres zones de la frontière entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan. Le retour des réfugiés et des déplacés prévoit le retour des réfugiés azerbaïdjanais à Chouchi et dans d’autres districts de l’ex-région autonome du Haut-Karabakh. Les négociations sur le statut final du Haut-Karabakh doivent être approuvées par les parties impliquées.

Voilà en bref les principes de base auxquels l’Azerbaïdjan a toujours démontré son respect et qu’il a développés. Mais la nouvelle administration arménienne a maintes fois déclaré que c’était inacceptable, qu’ils ne céderaient pas un centimètre de terrain. C’est ce que leur Premier ministre a dit. Le ministre arménien de la Défense disait pour sa part que l’Arménie se préparait à une nouvelle guerre pour de nouveaux territoires. Des menaces et insultes régulières proférées à notre égard ont débouché sur une telle confrontation. Je crois que la partie arménienne doit sobrement évaluer la situation qui s’est créée et rester attachée au régime de cessez-le-feu qu’elle a violé dans quelques heures de manière barbare, en attaquant la ville de Gandja qui dormait paisiblement.»

En parlant de compromis, à quel genre de concession seriez-vous prêt? Et est-ce qu’il existe une ligne au-delà de laquelle vous ne reculerez en aucun cas?

«Notre position a toujours été constructive et cohérente. Elle s’appuyait sur les normes du droit international en termes de quatre résolutions du Conseil de sécurité de l’Onu qui réclamaient le retrait complet, immédiat et sans condition des forces arméniennes de nos territoires. Notre position est fondée sur une approche pragmatique et je pense que les projets présents à la table des négociations le montrent clairement. En ce qui concerne les lignes rouges, nous l’avons très clairement dit, et les coprésidents du Groupe de Minsk en sont au courant: l’intégrité territoriale de l’Azerbaïdjan ne peut être violée en aucun cas, l’Azerbaïdjan ne consentira à l’indépendance du Haut-Karabakh en aucun cas. Mais en même temps, notre proposition partait de l’idée selon laquelle les communautés arménienne et azerbaïdjanaise doivent coexister pacifiquement dans le Haut-Karabakh, comme c’est le cas dans d’autres localités azerbaïdjanaises, dont à Bakou, où la communauté arménienne compte plusieurs milliers de personnes, en Russie, en Géorgie, dans d’autres pays, où les Arméniens et les Azerbaïdjanais vivent et travaillent parfois dans le même village sans qu’il y ait un conflit entre eux. Il n’y a rien d’impossible, et nous y sommes disposés, mais bien entendu, il faut réparer les effets du nettoyage ethnique et toutes nos personnes déplacées doivent rentrer chez elles. Voilà, en principe, notre approche concernant des compromis possibles.»

Monsieur le Président, la brutalité de cette guerre est déjà entrée dans l’histoire. Et vous-mêmes faites déjà partie de l’histoire de cette guerre. Sous quel aspect voudriez-vous rester dans l’histoire?

«Vous savez, dans toute guerre il y a des cruautés, des sacrifices, la souffrance et la perte de proches, mais la différence consiste en ce que pour le peuple azerbaïdjanais, cette guerre est celle de libération, et pour l’Arménie, c’est une guerre d’agression. Ce n’est un secret pour personne, et les médiateurs internationaux le savent eux aussi, que la soi-disant armée du Haut-Karabakh n’existe pas. Dans la formation que la partie arménienne appelle ainsi, 90% des militaires sont des citoyens arméniens, appelés au service militaire par conscription et envoyés dans les territoires azerbaïdjanais occupés: à Agdam, Fizuli, Jabrayil, Kelbadjar, Qubadly, Latchin, Zangilan. La question est de savoir que font-ils là-bas? Des forces d’occupation arméniennes sont présentes dans les territoires internationalement reconnus de l’Azerbaïdjan. Rien ne peut le justifier ni du point de vue du droit international, ni du point de vue de la morale commune. Il est impossible de poursuivre pendant une trentaine d’années une politique visant à empêcher les Azerbaïdjanais d’entrer sur leurs terres ancestrales. Ce sont des territoires où les Arméniens n’ont jamais vécu. Tout y est détruit, et il faut beaucoup de temps et d’efforts pour que les gens puissent y revenir, mais une telle position ne peut en aucun cas être justifiée. C’est pourquoi nos militaires battent et meurent sur le sol azerbaïdjanais, alors que les soldats arméniens meurent sur la terre que leur gouvernement veut maintenir sous occupation.

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Quant au rôle dans l’histoire, je n’y ai jamais pensé auparavant, et je n’y pense pas maintenant. Ma tâche principale est de justifier la confiance du peuple azerbaïdjanais, de tenir les promesses que j’ai faites depuis mon arrivée à ce poste. Je dois conduire le pays sur la voie du développement et assurer son intégrité territoriale, et ce sera au peuple azerbaïdjanais d’évaluer mon rôle sur la base de nos succès. Je pense donc que cette question devrait être adressée à ceux dont l’opinion a toujours été cruciale pour moi dans la prise de telles ou telles décisions, y compris sur le problème du Haut-Karabakh.»

Monsieur le Président, merci, j’ai posé toutes les questions que je voulais, vouliez-vous peut-être ajouter quelque chose de vous-même?

«Je voudrais profiter de cette occasion dont je suis reconnaissant pour m’adresser au public russe et l’inviter à plus de compréhension envers la position de l’Azerbaïdjan. Parce qu’il y a parfois des opinions différentes concernant le conflit, son histoire et son état actuel. Sur la base des faits, je souhaite attirer l’attention des téléspectateurs sur ce qui s’y est passé et ce qui s’y passe. Au début du XIXe siècle, le khan du Karabakh et de Chouchi, Irbagim Khalil, a signé un accord avec la Russie tsariste sur l’entrée du khanat du Karabakh en Russie. Le texte de cet accord dit de Kurakchay est disponible en ligne, chacun peut le consulter. Ce document ne dit pas un mot sur une présence arménienne au khanat du Karabakh. C’est après les deux guerres russo-perses de 1813 et 1828 qu’a commencé l’envoi massif dans cette région des Arméniens depuis le territoire de l’Iran contemporain et de l’Anatolie orientale. Je parle donc de l’appartenance historique de cette région.

Après l’effondrement de l’Empire russe, la République démocratique d’Azerbaïdjan et l’État indépendant arménien ont été créés. La République démocratique d’Azerbaïdjan a été créée dans les frontières de tous ces territoires et en plus, le lendemain de sa création, elle a pris la décision de remettre la ville d’Erevan à l’Arménie comme capitale. C’est aussi un fait historique.

En 1921, le bureau du Caucase du Parti communiste a décidé de laisser le Haut-Karabakh au sein de l’Azerbaïdjan, et de ne pas le lui remettre, comme l’affirment certains pseudo-historiens. Telle est l'histoire de cette région. Ce qui s’y est produit avec l’effondrement de l’URSS, tout le monde le sait. Après tout, l’effondrement de l’URSS a également commencé avec le séparatisme dans le Haut-Karabakh, qui en est devenu le déclencheur. Beaucoup de gens ont oublié ces rassemblements, ils ont oublié qui était derrière eux. Je dis souvent que Pachinian est un produit de Soros. Et je pense que tout le monde est d’accord avec moi.

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Or, Soros n’est même plus une personne, c’est un concept. Je n’exclus pas du tout que de tels instruments aient été utilisés à l’époque pour détruire le grand pays en y semant la discorde et en montant les peuples l’un contre l’autre. Je voulais simplement porter ces faits historiques à l’attention du public russe et souligner que l’Azerbaïdjan et la Russie sont liés par des liens séculaires d’amitié, de coopération et de compréhension. Je suis sûr qu’aucune force ne peut le changer, bien que nous voyons des tentatives de semer la discorde et d’apporter une sorte de méfiance. Mais grâce à la politique cohérente de Moscou et Erevan nous ne reculons pas et allons toujours en avant.

Aujourd’hui, la Russie et l’Azerbaïdjan sont des partenaires stratégiques, et le niveau de coopération entre nos pays peut servir d’exemple pour tous les voisins. Je suis sûr qu’après la fin de la phase militaire du conflit et le lancement d’un règlement politique, auquel nous sommes absolument prêts à condition que la partie arménienne abandonne ses tentatives de restituer par la force ce qu’elle a perdu et ce qui ne lui appartient pas, la Russie continuera à jouer un rôle de premier plan dans la stabilisation de notre région.

Je voudrais ainsi transmettre mes salutations et mes meilleurs vœux à tous les Russes.

L’année dernière, l’Azerbaïdjan a accueilli un million de Russes. J'espère qu’après la fin de la pandémie cette dynamique sera rétablie. Nous sommes toujours heureux d’accueillir les Russes sur notre territoire, et ils savent eux-mêmes que lorsqu’ils viennent en Azerbaïdjan, ils peuvent se sentir chez eux.»

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