Santé mentale, la «troisième vague» de l’épidémie? «Le cerveau émotionnel est un peu en train de lâcher»

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Alors que le deuxième confinement devrait durer au moins jusqu’au 15 décembre, ce dispositif continue de laisser des traces sur le moral de la population. Si bien que le gouvernement redoute une «troisième vague», celle de la santé mentale. Une psychiatre donne à Sputnik quelques conseils pour se prémunir contre ce phénomène.

Les Français à bout moralement? Dans son allocution télévisée du 24 novembre, Emmanuel Macron a souligné l’importance de se préparer aux «conséquences à long terme liées au virus», dont celles qui pourraient affecter la santé mentale. Ainsi, le chef de l’État va demander au gouvernement de «préparer une stratégie pour prendre en compte les conséquences psychologiques de la pandémie et des différents confinements».

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Lors de son point presse du 19 novembre, Olivier Véran tirait déjà la sonnette d’alarme: «Nous voulons éviter une troisième vague qui serait une vague de la santé mentale pour les jeunes et les moins jeunes», avait déclaré le ministre de la Santé. Et pour cause, l’étude CoviPrev, menée par Santé publique France sur la période de mars à novembre 2020, fait état d’une augmentation significative des troubles dépressifs dans l’ensemble de la population. La prévalence «a doublé entre fin septembre (10%) et début novembre (21%)», note le bulletin épidémiologique publié le 19 novembre. Comment peut-on expliquer cette dégradation de l’état psychologique des Français?

Boom des troubles dépressifs

Interrogée par Sputnik, Christine Barois, psychiatre et psychothérapeute, explique que d’un point de vue physiologique, «le cortex préfrontal, qui est le siège du raisonnement logique et de la volonté, est contraint depuis le printemps, et le cerveau émotionnel est un peu en train de lâcher.»

Et cela ne devrait pas s’arranger avec les nouvelles annonces du Président de la République. Ce deuxième confinement devrait durer au moins jusqu’au 15 décembre, et Emmanuel Macron a indiqué qu’il ne serait levé à cette date que si les objectifs sanitaires sont atteints. En outre, il sera remplacé par un couvre-feu national de 21h00 à 07h00. Les épicuriens vont devoir quant à eux prendre leur mal en patience puisque les restaurants ne rouvriront probablement qu’à partir du 20 janvier. Concernant les bars, selon les informations d’Europe 1, une réouverture après le 1er février est envisagée. Si ce climat économique et sanitaire anxiogène devait perdurer dans le temps, quels seraient ses conséquences sur la population?

Pour la psychiatre, le risque est de voir se poursuivre l’augmentation des troubles anxieux, des attaques de panique et des états dépressifs.

«On dit en thérapie cognitive et comportementale que l’anxiété est l’anticipation négative de quelque chose qui ne va probablement pas arriver, ou de ne pas supporter l’incertitude. Et là, nous sommes dans l’incertitude depuis le début de l’année», analyse le docteur Barois.

Elle avance d’ailleurs que l’on pourrait voir le «bout du tunnel» très prochainement parce qu’il y a un «vaccin qui pourra arrêter la pandémie» mais «cela ne nous donne pas le contrôle sur nos vies, et c’est paniquant».

Prendre soin de soi

Un autre élément qui participerait à ce climat de panique serait le mode de communication des autorités, dont le décompte du nombre de contaminations, de réanimations et de morts aurait des effets pour le moins anxiogènes:

«Le gouvernement ne sait pas dire autre chose que “protégez-vous”, parce que pour l’instant, il n’y a pas de solution. S’ils ne disent pas ça, s’ils sont trop positifs, on va leur reprocher après. En termes de communication publique, c’est compliqué», remarque la psychiatre.

Alors, que faut-il faire pour se prémunir contre ce climat ambiant? Pour le docteur Barois, il est important de limiter sa dose quotidienne d’actualité. «Les news sont très polluantes, il faut essayer de se limiter à une source d’information qui soit fiable, mais y consacrer au maximum 30 minutes. Deux JT de 45 min c’est non, car c’est toujours les mêmes choses qui sont dites», explique-t-elle.

À l’échelle personnelle, la psychothérapeute plaide pour l’instauration de «petits rituels, d’une routine, comme se lever, faire sa toilette», afin d’avoir l’impression de «reprendre le contrôle».

«Il faut aussi prendre soin de soi, écouter ses besoins basiques en termes de sommeil, d’alimentation, d’hydratation, il faut faire des breaks. Et pour ceux qui sont au chômage partiel et qui s’ennuient, il faut aussi programmer des activités. Lors du premier confinement, on avait beaucoup rigolé avec les activités sportives, le yoga ou la méditation, mais je trouve cela très bien.»

La psychiatre met en garde contre des abus: «Il faut absolument limiter les sources toxiques». Enfin, elle préconise de continuer à communiquer avec les autres. «Une étude au Luxembourg montre que les 18-44 ans sont très atteints le confinement. J’y vois un manque de contacts sociaux. À 18 ans, on a besoin d’avoir une communauté, son groupe d’amis», appuie Christine Barois.

«Si le contact physique n’est pas possible, le contact social l’est. Alors il faut continuer à échanger des textos, des messages sur WhatsApp, etc.», conclut la psychothérapeute.
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