Erdogan parle à nouveau du «génocide français en Algérie», une déclaration appropriée?

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 la manifestation contre la guerre en Algérie - Sputnik Afrique, 1920, 12.02.2021
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«Vos ancêtres ont tué un million d’Algériens», lance Erdogan lors d’un séminaire spatial à Ankara à l’adresse de Macron qui «demande à la Turquie de se retirer de Libye». C’est la deuxième fois que le dirigeant turc se mêle de la question mémorielle entre l’Algérie et la France. Comment ces déclarations sont-elles vues depuis Alger?

En pleine polémique autour du rapport de l’historien français Benjamin Stora concernant la question mémorielle relative à la guerre d’Algérie, et alors que le débat fait rage sur le refus de la France de présenter des excuses, Recep Tayyip Erdogan s’en prend, à nouveau, à Emmanuel Macron sur le passé colonial de la France. Cette nouvelle attaque, qui intervient sur fond de désaccords sur le dossier libyen, ne fait pas forcément plaisir aux Algériens qui y voient une instrumentalisation de leur Histoire à des fins politiques.

«Macron demande à la Turquie de se retirer de Libye. Je lui dis de garder son conseil pour lui car nous n’avons fait que notre devoir en vertu de l’accord sécuritaire et militaire que nous avons conclu avec les Libyens», affirme le chef de l’État turc lors d’un séminaire sur le programme spatial de son pays.

Et d’ajouter: «Vos ancêtres ont tué un million d’Algériens. Donnez des comptes sur cela. Quant à la Turquie, il n’y a rien de tel dans son passé et il n’y en aura jamais. Nos mains ne sont pas tâchées de sang, les vôtres le sont».

Qu’en pensent les Algériens?

Ce n’est pas la première fois que le Président turc se lance dans une telle diatribe concernant le passé colonial de la France en Algérie. En effet, en décembre 2011, en réponse à l’adoption par le Parlement français d’une loi concernant le génocide arménien, Erdogan avait accusé la France d’avoir commis un génocide contre les Algériens durant la colonisation.

Or, à Alger, l'Histoire n’est pas vue de la même façon. Pour preuve, les propos échangés entre Recep Tayyip Erdogan et Ahmed Ouyahia en janvier 2012.

«Nous disons à nos amis [turcs, ndlr] de cesser de faire de la colonisation de l'Algérie un fonds de commerce», avait déclaré à la presse M.Ouyahia à l'issue d'une réunion de la direction de son parti, le Rassemblement national démocratique (RND). «Chacun est libre dans la défense de ses intérêts, mais personne n'a le droit de faire du sang des Algériens un fonds de commerce», avait-il ajouté.

Quid de l’histoire des Turcs envers l’Algérie?

En remontant un peu plus dans l'Histoire, le responsable algérien a rappelé que la Turquie «avait voté à l'Onu contre la question algérienne de 1954 à 1962» pendant la guerre d'indépendance contre la France. «La Turquie qui était membre de l'Otan pendant la guerre d'Algérie, et qui l'est encore, avait participé comme membre de cette Alliance à fournir des moyens militaires à la France dans sa guerre en Algérie», avait-il expliqué.

D’ailleurs, en visite officielle à Alger en 1985, le Premier ministre turc Turgut Özal s’était excusé de cela.

«Étant une nation qui a mené le même genre de combat, nous devons soutenir pareilles luttes d’indépendance», avait-il regretté, soutenant que «notre nation est aux côtés du peuple algérien». «Il est malheureux qu’à l’époque [du vote sur l’indépendance algérienne à l’Onu, ndlr]] le gouvernement ne se soit pas conformé à ces souhaits», avait-il ajouté, soulignant qu’«aujourd’hui, nous admettons que ce fut une erreur».

La question mémorielle franco-algérienne est extrêmement sensible des deux côtés de la Méditerranée en raison des questions qui restent toujours en suspens. Ainsi de la décontamination des sols où avaient eu lieu les essais nucléaires français dans le Sud de l’Algérie et l’indemnisation des victimes des irradiations, la question de la torture, le problème des disparus des deux côtés, la restitution de l’archive colonial, les enfants des harkis et la récupération des restes des révolutionnaires algériens. Autant de points qui ravivent les frictions entre les deux pays dès qu’elles sont évoquées et qui ont besoin d’être traitées loin des tribunes politiques internationales.

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