Fausses déclarations de chômage partiel: vers une envolée des fraudes?

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Euro inservible - Sputnik Afrique, 1920, 26.02.2021
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Un réseau de fraudeurs aux aides de l’État dans le cadre de la crise du Covid vient d'être démantelé. Un parmi tant d’autres… Alors que Bercy annonce un tour de vis dans ses contrôles, le «quoi qu’il en coûte», et ses facilités d’accès, attise plus que jamais l’appétit des aigrefins. Sur fond de crise, va-t-on vers un record d’abus?

Qui dit solidarité nationale dit fraudes. Alors que le montant des aides aux entreprises confrontées aux restrictions sanitaires n’a jamais été aussi important (près de 4,5 milliards d’euros par mois par le biais du seul fonds de solidarité), une affaire d’escroquerie vient entacher le «quoi qu’il en coûte».

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Quatre hommes ont été interpellés le 23 février dans les régions de Lyon et de Marseille. Ils seraient impliqués dans une vaste triche. Montant estimé du dol? Pas moins de 2,4 millions d’euros. 400.000 euros avaient notamment été versés à une société fantôme de location de véhicules ayant déclaré quarante-neuf salariés au chômage partiel, tous rémunérés 4.000 euros par mois. Le faux gérant avait vu l’administration valider sa demande d’indemnisation. Sans justificatif! Ce sont les importants mouvements d’argent qui ont fini par éveiller la suspicion de Tracfin. L’organisme a signalé cette piste à des enquêteurs qui ont découvert sept autres entreprises dormantes.

«Ces escrocs récupéraient de l’argent issu des indemnités non seulement liées au chômage partiel, mais également liées au fonds de solidarité Covid», détaille devant les caméras de TF1 la responsable de la division de lutte contre la criminalité financière (DLCF) de la police judiciaire (PJ) de Lyon.

Sur place, ses hommes ont découvert 30.000 euros en espèces. En outre, près de 1,4 million d’euros ont été saisis au titre des avoirs criminels sur plusieurs comptes bancaires. C’est donc au minimum un million d’euros d’argent public qui a été détourné dans cette affaire.
Or les demandes frauduleuses pullulent. Après le premier confinement, sur 92.000 dossiers jugés «suspects» transmis aux services de Bercy, ceux-ci ont repéré 33.000 fraudes. Le tout représentant un montant global de 43,6 millions d’euros indûment versés, rappelle Le Monde.

Chômage partiel: un dossier sur cinq suspect

Un chiffre refait surface dans les médias: 225 millions d’euros soutirés par grivèlerie. Mais ce montant est bien en deçà de la réalité. D’une part parce qu’il ne correspond qu’à la fraude détectée, mais surtout parce que ces données datent de l’été dernier. En effet, elles avaient été communiquées à la presse le 17 septembre 2020 par le ministère du Travail.

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Celui-ci annonçait avoir franchi le cap des 50.000 contrôles menés après le versement des aides sur des dossiers de demandes de chômage partiel et que 9.500 suspicions de malversations étaient alors recensées: pour faire simple un contrôle sur cinq. La rue de Grenelle tenait alors à se montrer rassurante en annonçant que «plus de la moitié a déjà été bloquée ou récupérée, sur un dispositif global de 30 milliards d'euros».

«On ouvre une caisse pleine de billets et on dit: "Servez vous"», déplorait à l’époque un représentant CGT interrogé par l’AFP. Le syndicaliste suspectait une triche «massive au niveau national». Il dénonçait l’octroi d’indemnités sans justificatif. En plus des contrôles a posteriori opérés après le premier confinement, des contrôles menés a priori ont fait leur apparition en octobre. 15% des dossiers auraient été rejetés, évitant le paiement indu de 2 milliards d’euros, s’est félicité Bruno Le Maire le 24 février.

Les vérifications sont plus indispensables que jamais. En effet, au mois de septembre dernier, quand on a atteint les  225 millions d’euros de détournés, le montant des aides était plafonné à 10.000 euros par mois. Et ce coup de pouce était réservé aux petites PME, aux très petites entreprises (TPE), aux indépendants et aux micro-entrepreneurs.
Depuis décembre, le dispositif a été élargi par Bercy à toutes les entreprises. Cette manne peut même aller jusqu’à 200.000 euros mensuels (dans la limite de 20% du chiffre d’affaires) pour les entreprises de certains secteurs perdant plus de 70% de leurs recettes.

Dans la presse, on dénonce plutôt les sociétés bien réelles qui ne respectent pas les consignes du gouvernement vis-à-vis du télétravail ou s’inventent des salariés. Pourtant, la lutte contre le fléau des entreprises fantômes est d’autant plus importante qu’il est connu de longue date et qu’il est grandement facilité à l’époque du tout numérique.

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Fraude sociale: ces milliards qui manquent plus que jamais
«Rien qu’à Bobigny, pour plus de 16.000 entreprises créées en 2016, nous avons procédé à 5.500 radiations d’office dans le cadre de nos échanges avec l’Urssaf et l’administration fiscale», avançait un greffier du tribunal de commerce de la préfecture de Seine-Saint-Denis auprès du magazine Challenges. Cela donne un avant-goût du phénomène hors crise sanitaire.

Hélas, l’État se montre plus efficace pour matraquer le contribuable distrait que pour appréhender le filou bien organisé. Il faut dire qu’abreuver des fonds d’aide pillés par des arnaqueurs, c’est un peu comme remplir le tonneau des Danaïdes.

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