«Syndrome de l’escargot»: ces Français qui préféreraient rester confinés

© Photo Pixabay / Free-PhotosUne jeune femme sur le divan
Une jeune femme sur le divan - Sputnik Afrique, 1920, 23.06.2021
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Anxiété, sentiment d’insécurité, peur de sortir de leur domicile… Si pour la majorité des Français la fin du déconfinement est le signe d’une liberté retrouvée, certains n’ont qu’une envie: rester chez eux. Le professeur Abdel Halim Boudoukha, psychologue clinicien, revient pour Sputnik sur les ressorts de ce syndrome.

C’est le début de l’été avec son lot de jours ensoleillés et le gouvernement a lancé son calendrier de déconfinement: fin du couvre-feu, non-obligation du port du masque en extérieur. Les Français ont retrouvé leurs terrasses préférées et pourront même retourner très prochainement en discothèque.

Une femme en masque de protection avec un smartphone (image d'illustration) - Sputnik Afrique, 1920, 23.06.2021
«Sentiment de liberté»: certaines femmes gardent le masque pour une autre raison que le Covid
Si ce «retour à la normale» est synonyme de bonheur pour une partie de la population, pour certains, c’est plutôt un sentiment d’angoisse qui domine. En cause, l’appréhension d’être à nouveau confrontés au monde extérieur après cette longue période où confinements et restrictions sanitaires se sont succédé.

C’est ce que l’on appelle le «syndrome de la cabane» ou le «syndrome de l’escargot», explique le professeur Abdel Halim Boudoukha, psychologue clinicien à l’université de Nantes.

Le monde extérieur perçu comme dangereux

Un syndrome qui renvoie au début du XXe siècle «où des gens [des chercheurs d’or, ndlr] vivaient dans des endroits reclus, dans des cabanes, et éprouvaient des difficultés à revenir à la civilisation.» Or, on peut également retrouver ce phénomène sous des formes plus connues, rappelle le professeur Boudoukha: «c’est par exemple l’adolescent qui reste enfermé dans sa chambre et qui n’a pas envie de la quitter.»

«C’est un ensemble de symptômes qui se développent chez les personnes pour lesquelles on va retrouver de l’anxiété, un sentiment d’insécurité, une appréhension de sortir de chez soi. […] Sur le plan cognitif, c’est ce sentiment d’être en sécurité que lorsque l’on est chez soi, dans son environnement», précise-t-il au micro de Sputnik.

Un sentiment d’insécurité provoqué notamment par des «situations d’épidémie ou des évènements violents, traumatiques». Et c’est peu dire. Depuis le début de l’épidémie, le quotidien des Français a été rythmé par le décompte des morts du Covid-19, des personnes hospitalisées, en réanimation, ou tout simplement des contaminés. Une ambiance pesante pour les Français les plus fragiles. «La soudaineté et la prolongation font que l’on finit par avoir le sentiment que l’on est en danger à l’extérieur. Et donc de fait, à un moment donné, on met en place des mécanismes, des stratégies pour se protéger», analyse le psychologue. Ainsi, l’enquête CoviPrev lancée par Santé publique France en début de la pandémie, indique que 21% des Français souffrent d’un état anxieux. C’est six points de plus par rapport au niveau hors épidémie.

Un ensemble de stratégies pour se protéger

Pourtant une question se pose: les Français sont-ils égaux face au syndrome de la cabane? Comme l’explique le professeur Boudoukha, coauteur d’une enquête sur les effets psychologiques de la crise sanitaire, on va plutôt retrouver des personnes qui ont «des difficultés à réguler leurs émotions et une tendance à percevoir l’environnement comme dangereux.»

«Quand on a à la base des schémas anxieux, une perception augmentée du danger, de fait, on est plus à risque de développer ce type de comportement», appuie le clinicien.

La bonne nouvelle, c’est qu’il existe des solutions pour s’en sortir. Cela passe essentiellement par la «réexposition aux situations qui sont source de détresse, d’anxiété et de tensions», indique le psychologue. En clair, il faut renouer des contacts avec le monde extérieur. Mais le spécialiste prévient: «il faut le faire progressivement». En se lançant par exemple des défis: «demain, je vais faire un tour du pâté de maisons avec le masque, puis le jour suivant je le fais sans masque.» Pour un maximum d’efficacité, il plaide pour le recours aux thérapies comportementales et cognitives (TCC), qui permettront de rapidement faire évoluer la situation.

«L’idée est de réapprendre que l’extérieur n’est pas une source de danger, ça peut l’être certes, mais les activités de la vie quotidienne ne sont pas dangereuses», résume le psychologue.
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