Épinglé par l'Onu, Lomé revoit la copie d'une loi «liberticide»

CC BY 3.0 / Hansueli Krapf / Vue aérienne de Lomé
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Devant le Comité des droits de l’homme des Nations unies, les autorités togolaises se sont engagées à revoir une loi controversée sur les rassemblements publics dans le pays. Ce texte était contesté par l’opposition et la société civile depuis un amendement de 2019 qui a permis au gouvernement d’interdire quasiment toute manifestation.

Au Togo, la loi controversée sur les manifestations publiques, décriée par l'opposition et la société civile comme «liberticide», sera bientôt aménagée.

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L’annonce a été faite par une délégation du gouvernement togolais devant le Comité des droits de l’homme des Nations unies lors de l’évaluation annuelle de la situation des droits de l’homme au Togo. La rencontre s'est déroulée du 28 juin au 1er juillet 2021 par visioconférence en raison du contexte sanitaire.

En août 2019, cette loi avait été amendée à l'initiative de l’exécutif togolais, lui permettant d’interdire quasiment toute manifestation publique. Outre le fait qu'elle faisait basculer le régime juridique des rassemblements des déclarations préalables aux autorisations, la nouvelle mouture de la loi de 2011 a institué nombre de contraintes et de restrictions en invoquant des motifs «stratégiques, sécuritaires ou économiques».

«Si le gouvernement a été amené à modifier la loi [en 2019], c’est qu’à un moment donné, il y a eu des problèmes (des manifestions de l’opposition togolaise qui ont duré plusieurs mois à Lomé et à l’intérieur du pays, d’août 2017 à janvier 2018) qui ont révélé des faiblesses de cette loi. La deuxième raison est sécuritaire. Si le terrorisme qui menace toute la sous-région, est synonyme de dégât de masse, on ne peut pas ignorer que les regroupements de masse lors des manifestations peuvent devenir des opportunités pour des personnes qui de mauvaises intentions. Voilà les réflexions qui ont guidé à la réforme de 2019», explique à Sputnik le ministre des Droits de l'homme, Christian Trimoua.

La loi a depuis été sans cesse dénoncée, aussi bien par l'opposition que par la société civile, togolaise comme internationale, évoquant une loi «liberticide». Saisis par les défenseurs togolais des droits de l’homme, quatre rapporteurs spéciaux du Comité des droits de l’homme des Nations unies, avaient interpellé le 11 septembre 2019 le gouvernement togolais sur le «caractère disproportionné» du nouveau texte. Mais l’exécutif togolais n’y a donné aucune suite à l'époque.

«À ce jour, nous n’avons pas reçu de réponse. Ce qui est regrettable car les réactions substantielles à nos lettres sont un indicateur de la volonté du pays à collaborer avec les mécanismes des droits de l’homme et surtout sa volonté de promouvoir et de protéger les droits en question», se plaignait en juillet 2020 au micro de Sputnik Clément Nyaletsossi Voule, rapporteur spécial des Nations unies sur les droits à la liberté de réunion pacifique et d’association.

Interpellé de nouveau ce 28 juin sur la question, le ministre togolais des Droits de l’homme, Christian Trimoua, a rassuré les experts des Nations unies en annonçant que le gouvernement était déjà en train d'envisager une nouvelle modification de cette loi, bien avant cette session avec le Comité des droits de l'homme.

Retour improbable à la loi initiale

Le gouvernement togolais va-t-il juste faire un retour au texte du 11 mai 2011? Le ministre togolais des Droits de l’homme a précisé:

«Le gouvernement dit qu’il est sensible à la réflexion et qu’à partir de ce moment-là, il est disposé à améliorer le cadre de la loi de 2011 et ses modifications de 2019. Cela ne veut pas dire, et j’insiste là-dessus, que le gouvernement va retirer [toutes] les modifications introduites en 2019».

Pour le ministre, le gouvernement pourrait procéder, par exemple, à «une réécriture des modifications faites en 2019, ou des suppressions, ou faire d’autres ajouts pour tenir compte du contexte politique et sécuritaire dans lequel se trouve le Togo».

Une révision avec l’apport de tous

Le ministre assure aussi que le gouvernement togolais prendra en compte dans cette perspective «les contributions: de la société civile, de la commission nationale des droits de l’homme, des rapporteurs spéciaux des Nations unies, mais aussi du cadre de concertation des acteurs politiques du Togo récemment mis en place par le ministre de l’Administration territoriale pour préparer les prochaines élections régionales».

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D’autres questions relatives aux droits de l’homme ont été également abordées lors de cette session, notamment: les détentions arbitraires, les mauvais traitements infligés aux détenus; les restrictions à la liberté d'expression des journalistes, des défenseurs des droits humains et des militants politiques; la criminalisation des relations homosexuelles et les violations des droits humains des personnes LGBT.

Sur toutes ces questions, le gouvernement togolais dit attendre les recommandations du Comité des droits de l’homme des Nations unies pour améliorer la situation des droits de l’homme dans le pays.

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